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Producteur et musicien, fondateur de Nzolex Productions (www.nzolex.com), passionné d'histoire et de sciences, rêveur d'une Afrique juste et heureuse qui exploite toutes ses richesses qui sont infinies.

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Billet de blog 3 septembre 2019

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Dans quelle langue chanter?

Les langues européennes sont en Afrique pour rester. On peut le déplorer (l'esclavage, la colonisation,...) ou s'en réjouir car elles permettent à des peuples aux langues innombrables de se comprendre (plus de 250 langues rien qu'au Cameroun pour 22 millions d'habitants). Quel est l'impact de cette pléthore linguistique sur les artistes ?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Pour un chanteur ou une chanteuse, le choix de la langue d’expression n’est pas anodin. En effet, il circonscrit de façon extrêmement précise la portée du message de l’artiste. Dans l’usage des langues, il faut distinguer les locuteurs natifs de ceux qui en font un usage minimal pour leurs activités.

En effet, si l’on analyse la liste des langues par locuteurs telle que la présente Wikipedia :

Liste des langues par nombre total de locuteurs, on remarque que la 1ère langue africaine est le Swahili (98 millions de locuteurs) suivie par le haoussa (63 millions). Les autres langues notables en Afrique noire et qui n’apparaissent pas dans la liste sont le Dioula, le pulaar, le Yoruba, l’amharique (Ethiopie)…

Alors que le succès planétaire d’une poignée d’artistes aux voix uniques et au charisme indéniable (Youssou Ndour, Papa Wemba, Richard Bona, Rokia traoré, Oumou Sangaré, Koffi Olomidé…)  pourrait laisser penser que la compréhension du message véhiculé par une chanson n’a pas d’importance, rien n’est moins vrai. Les artistes anglo-saxons ont un rayonnement mondial parce que l’anglais est devenu la langue internationale de facto. Si vous demandez votre chemin en Mongolie extérieure ou au Mozambique, il y a fort à parier que vous le ferez en anglais si vous ne connaissez pas les langues locales.

Il est donc une question capitale pour un artiste africain qui souhaite conquérir un large public et vivre de sa musique tout en véhiculant, il faut l’espérer, un message positif : qui achète les disques et quels sont les marchés qui permettent de rentabiliser un produit d’exportation comme la musique ? Force est de constater que le marché du disque, déjà difficile en Occident, est pratiquement mort en Afrique. Cette situation est rendue encore plus difficile par la multiplicité des ethnies et des langues qui ne facilitent pas l’internationalisation des artistes.

Il en résulte que l’artiste qui souhaite toucher le plus grand nombre doit choisir avec soin la langue dans laquelle il (ou elle) chante. A fortiori, s’il y a un travail poétique important comme l’on peut l’observer au Cameroun dans les textes de chanteurs comme les regrettés Eboa Lotin, Francis Bebey (chansons en Douala) ou, plus proche de nous, Etienne Mbappé, Richard Bona… Il y a, dans le meilleur des cas, 20000 personnes capables de vaguement comprendre la complexité du Douala authentique dont use Richard Bona dans ses chansons. Fort heureusement, il a cette voix d’ange pour nous faire croire à tout ce qu’il chante même si l’on ne comprend pas un traître mot ! 

Il convient  donc de se demander si Fela Anikulapo Kuti ou Bob Marley aurait eu cet impact mondial si l'un avait chanté en Yoruba tandis que l’autre le faisait exclusivement en créole jamaïcain (patwa).

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