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Billet de blog 12 septembre 2011

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Un curé peut-il accepter l'argent de la drogue ?

Une nouvelle fois, un haut responsable de l'Eglise mexicaine aborde le problème : que faire des narco-aumônes, cet argent que les capos de la drogue offrent pour construire des chapelles ?

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Une nouvelle fois, un haut responsable de l'Eglise mexicaine aborde le problème : que faire des narco-aumônes, cet argent que les capos de la drogue offrent pour construire des chapelles ?

Les liens entre certains ecclésiastiques et les barons de la drogue au Mexique sont choses connues depuis 1993. Après l'assassinat du cardinal Posadas Ocampo alors qu'il sortait de sa voiture à l'aéroport de Guadalajara, le Nonce apostolique d'alors, Girolamo Prigiome avait accepté de rencontrer les principaux suspects de l'assassinat: les frères Arrellano Félix - leaders d'un des 7 cartels du pays - . Le nonce aurait ensuite été chargé de plaider leur cause auprès du président de la république de l'époque, Carlos Salinas...

Aujourd'hui c'est un autre problème qui empoisonne la hiérarchie romaine du Mexique : faut-il accepter les millions de dollars qu'offrent certains barons de la drogue très enclins à prouver économiquement leur foi ?

En effet la religion, comme d'autres secteurs de la société tels que la politique, les institutions ou même la musique, n'échappe pas au raz de marée de l'argent de la drogue.

Si officiellement, les responsables de la Conférence de Episcopale mexicaine refusent de donner leur bénédiction aux narco-aumônes, ils reconnaissent que le phénomène existe. Les dons peuvent en effet être effectués anonymement et en liquide. A tel point que certains narcotrafiquants financent des constructions d'Eglise dans des communautés reculées. De gros soupçons se portent sur la chapelle de Tezontle, dans l'Etat d'Hidalgo (voir vidéo ici, en espagnol) qui comporte une plaque de remerciements en l'honneur d'Heriberto Lazcano, leader du groupe ultra violent des Zetas.

Cependant, les propos de l'évêque du diocèse d'Aguascaliente Ramón Godínez Flores, illustrent la collusion entre l'Eglise et les narcos. Par choix ou pas... Dans un entretien au journal Reforma, Godínez Flores accepte que « n'importe où, on offre des narco aumônes, mais ce n'est pas notre rôle d'enquêter sur l'origine de l'argent ». Appliquant la maxime selon laquelle « l'argent n'a pas d'odeur », l'évêque cite même le passage de la Bible où Marie-Madeleine lave les pieds du Christ avec un parfum coûteux : « Jésus ne lui a pas demandé ‘avec quel argent as-tu acheté ce parfum ? ' » !

On n'est finalement pas si loin du film El Infierno de Luis Estrada, où un curé à l'air louche bénit les pistolets incrustés d'or des hommes de main des cartels: