La question se pose de savoir si les forces de l’ordre-établi (établi par le 49-3, par exemple) débordent de violence, malgré des recommandations contraires de leur hiérarchie, ou, au contraire, à la demande explicite de leur hiérarchie, elle-même aux ordres du gouvernement. Quel qu’il soit, il reste européen, donc foncièrement capitaliste, autoritaire et violent en soi, parce que c’est la nature même de l’ordolibéralisme que d’être socialement violent en soi.
Le problème n’est pas le même si les forces de l’ordre sont chaotiquement violentes, et si elles le sont sur ordre donné.
Or si quelqu’un pose ce problème, ce ne sont en tous cas ni les chiens de garde de la presse à grande écoute, ni les représentants des policiers (et gendarmes ?) contestataires. Les citoyens n'ont pas vraiment d’éléments de réponse concrets, et peuvent se perdre en conjectures.
Il faut reconnaître que les manifestations des dix dernières années ont été orientées contre des décisions politiques de plus en plus autoritaires, de plus en plus contraires aux intérêts publics (c’est à dire aux intérêts généraux des peuples) et que, les peuples constatant qu’une démarche civique (le vote) ayant perdu toute portée dans l’orientation et les choix que ces politiques mettent en œuvre contre eux, leur environnement, le santé, leur qualité de vie, leur sécurité sanitaire et sociale, il n’y rien de surprenant à constater que les manifestations de ces peuples deviennent de plus en plus exaspérées, et donc violentes en soi, en réaction contre la violence des choix politiques contre lesquelles elles se dressent (qui plus est, en vain).
Dès lors, il parait assez probable que les gouvernements ordolibéraux successifs (droite dure, dite soit « républicaine », soit « socialiste ») aient donné des ordres assez clairs aux policiers dans le sens de la violence à exercer, afin de tenter de contenir les mouvements de contestations de leurs politiques de plus en plus détestables et inacceptables, malgré les règles déontologiques jusqu’alors en vigueur, voire même au plus total mépris de ces règles.
Peut-être que les forces de l’ordre établi se retrouvent donc dans une situation impossible, étant d’une part assignées à la violence montante par la violence montante, et, d’autre part, encore assignées à respecter une déontologie citoyenne (qu’il faut absolument préserver), de relative non-violence en totale contradiction avec le contexte critique actuel ?
Auquel cas, les policiers et les civils auraient un ennemi commun, que les fonctionnaires en uniforme ne semblent pas avoir identifié : l’ordolibéralisme européen financiariste anglo-saxon. La première violence a consisté à graver cet ordolibéralisme qui piétine les démocraties dans le marbre des traités européens et, désormais, avec du CETA et des traités transatlantiques. La racine de la violence est là, dans l’indiscutabilité des décisions très à droite imposées unilatéralement à tous, au mépris des résultats des urnes citoyennes.
Il est à craindre que, sans détruire ce mal à la racine, tous nos efforts civiques, pacifiques et constructifs, soient à jamais infructueux et voués à l’échec. Et, par voie de conséquence, que les manifestants et les forces de l’ordre se sentent de plus en plus contraints et acculés à la violence, dans un effondrement global de nos précieuses mais de plus en plus fragiles démocraties.
L’ordolibéralisme, ça n’a rien de nouveau, nous jette tous les uns contre les autres : diviser pour régner. C’est vieux comme le monde. Et il semblerait bien que ça marche toujours…