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Billet de blog 21 mars 2024

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Carte blanche aux associations ariégeoises

Mercredi 20 mars le public était nombreux pour la carte blanche donnée aux associations mémorielles ariégeoises. Extraits de cette soirée mémorable.

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Maylis Bouffartigue, coordinatrice et directrice artistique de l'événement a convié les associations ariégeoises (Les Amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation d'Ariège, Mémoire et Résistance solidarité transfrontalière https://memoire-resistance-ariege.fr/,  Mémoire et Histoire vivante Aulus-les-Bains, le musée du château de la Hille, l'amicale du camp du Vernet) pour une carte blanche sur la Seconde Guerre mondiale en Ariège intitulée: "Ces étrangers de race juive". La discussion était menée par Gilbert Lazaroo, président des Amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation d'Ariège et maire de Biert. La soirée à débuté par une présentation de Raymond Cubells, président de l'amicale du camp de concentration du Vernet, avec son camarade Fernando Sanchez. https://www.campduvernet.eu/pages/asso/   

Par ailleurs l'interview de Maylis Bouffartigue et de Raymond Cubells est en ligne sur le site de Radio Transparence, l'un des partenaires médias d'Histoire-s de se rencontrer https://www.radio-transparence.org/post/histoire-de-se-rencontrer-une-semaine-de-rencontres-au-carla-bayle-pour-comprendre-notre-histoire

Carlos Duchatellier

Le 20 mars donc, l'amicale du Vernet a mis en avant dans une exposition à la salle des fêtes du Mas-d'Azil une série de dessins de Carlos Duchatellier. Une donatrice a transmis à l'amicale un fond exceptionnel de dessins de cet artiste méconnu qui fut détenu au Vernet. Fabien Roussel, secrétaire du Parti communiste, dont le grand-père y fut interné et Carole Delga, présidente de la Région Occitanie sont venus au camp en octobre 2022. À cette occasion,  la même  donatrice, qui souhaite garder l'anonymat, a envoyé 450 dessins supplémentaires inédits de Carlos Duchatellier à l'amicale. Né le 4 novembre 1907 à Port-au-Prince, ce dernier est décédé à Pithiviers en 1991. Sur sa tombe est inscrite: "Carlos, citoyen du monde." Cela situe le personnage. Charles dit "Carlos" était le fils cadet d'un exportateur de rhum. Il était ami de Jacques Roumain, fondateur du Parti communiste haïtien. En 1936,  il s'installe dans le XXeme arrondissement de Paris et devient caricaturiste pour des revues proches du Parti communiste français. Il s'engage dans le 1er régiment de marche de volontaires étrangers le 19 octobre 1939 et sera au camp de Barcarés dans les Pyrénées-Orientales. En raison de ses convictions communistes, il passe par trois prisons, la Santé, Lodève et Montpellier avant d'être détenu au Vernet du 25 avril 1941 au 27 mai 1944. Sa production de dessins est selon l'expression de Fernando Sanchez un véritable reportage sur le camp et un témoignage unique sur les conditions de détention au Vernet. Un fascicule de l'amicale intitulé Biographie de Carlos Duchatellier, artiste peintre haïtien, engagé... incarcéré... interné... déporté" revient l'itinéraire singulier et trop méconnu de Duchatellier. Parallèlement l'exposition sur les Étrangers indésirables" concoctée par l'amicale avec son fond de dessins est visible jusqu'au 6 avril au Mémorial d'Argeles-sur-mer, lieu emblématique de la mémoire des républicains espagnols. https://www.ville-argelessurmer.fr/s-informer/agenda-complet/etrangers-indesirables-1939-1944 

Les quatre jeunes juifs du château de la Hille

Annick Vigneau, directrice du musee du château de la Hille a présenté une autre exposition affichée dans la salle des fêtes du Mas-d'Azil.  Celle-ci porte sur cette centaine de jeunes juifs entre 5 et 16 ans qui se réfugiérent en ce lieu à partir de 1940 pour échapper aux persécutions nazies. Leur histoire est expliquée ici https://www.ariege.com/decouvrir-ariege/occupation-et-resistance/chateau-de-la-hille Olivier Nadouce spécialiste de la Résistance en Ariège, auteur de plusieurs ouvrages, a recueilli les témoignages de Joseph Dortort et Rudi Oelbaum en 2000. Ceux-ci sont revenus sur les lieux de leur jeunesse. Olivier Nadouce rappelle le contexte: 6 juin 1944, débarquement des Alliés en Normandie. Le 9 juin a lieu le premier grand affrontement en Ariège entre les résistants FTP et guérilleros d'une part et l'occupant nazi d'autre part. Les jeunes Juifs qui restent au château de la Hille en entendent parler. Quatre d'entre eux décident de "monter" au maquis. Ils se prénomment Egon Berlin, Joseph Dortort, Rudi Oelbaum et Kurt Klein

Avec Olivier Nadouce en 2000 Joseph et Rudi sont donc revenus dans les collines où ils avaient vécu quelques semaines en juin 1944. La totalité de leurs témoignages est consultable sur internet et dans le livre d'Olivier Nadouce "Combattants sans uniforme "paru en 2001. Extraits.

Joseph: "À notre arrivée,on a raconté notre histoire,tout le monde autour de nous. On nous a gardés! Nos futurs camarades se sont mis à nettoyer leurs armes. J'ai réalisé que maintenant je n'aurai plus peur d'être pris par les gendarmes. Oui j'allais pouvoir me défendre ,avec ces armes et mes camarades.Cette peur qui me poursuivait en fait depuis mon enfance,elle était vaincue. Nous étions dans un morceau de France LIBRE! Mon premier coup de main,ce fut l'affaire du tabac à Pamiers. Oscar, notre chef, nous ordonna à l'entrée de la ville de nous mettre à plat ventre dans le camion... Mon travail consistait à saisir les cartons de tabac pour les ranger sur le camion; mais j'étais tellement excité que j'ai laissé ma mitraillette posée sous l'amoncellement de cartons..."

À Roquefixade, le 6 juillet 1944, une bataille s'engage entre les résistants Francs-tireurs et partisans (FTP) et la Milice.

Joseph: "J'étais dans la 2ème section commandée par Oscar... Très vite, des camarades ont été pris sous le feu d'armes automatiques des miliciens. Je me faufilais dans les rochers. Nous étions encerclés. On nous tirait dessus à la mitrailleuse... De temps en temps, des miliciens se rapprochaient de notre position. Nous les repoussions à coups de mitraillettes et de grenades...et cela dura des heures. Enfin, vers le soir, nous entendîmes tirer de la crête. C'étaient les nôtres qui venaient nous dégager. Tout à coup, tout devint calme autour de nous: nos assaillants s'étaient retirés... Nous sommes un peu descendus. Et alors ,quel spectacle! des morts un peu partout! Nos camarades tués là..."

12 FTP ont été tués au combat-parmi eux des blessés que les miliciens ont atrocement achevés.Egon Berlin fut l'un des 12 tués. Kurt Klein fut fait prisonnier par les Groupes mobiles de réserve (GMR) aux ordres de Vichy.

Témoignage de Rudi: "Oui,c'est bien là ,dans ce fossé,que les Allemands se cachaient pour nous surprendre... Avec Pierre Barthes,nous étions allés chercher chez une femme du hameau (commune de Malléon), un agneau destiné au maquis espagnol... Dans le fossé, malgré le soir qui tombait, nous avons aperçu des hommes armés, des Allemands! Barthes leur cria: "Hauts les mains!"et il lâcha une rafale de mitraillette. Mais nous n'étions que deux! Et en face ,sans doute des dizaines, venus en camion! Lui s'est enfui dans un champ de maïs et moi j'ai sauté par dessus une haie. Quelle fusillade dans notre direction! J'avais tellement peur que je crois que je n'ai jamais couru aussi vite de ma vie! Puis je suis tombé dans un trou qui contenait un peu d'eau;je n'ai plus bougé de cette cachette et j'y suis resté toute la nuit. Le lendemain matin, je suis monté sur une colline pour m'orienter. À un paysan rencontré j'ai demandé: "Où sont les patriotes?" Il m'a indiqué, ce n'était pas loin. À mon arrivée au maquis, les camarades m'ont dit:"Oh! on te croyait mort!"

Les petits cailloux blancs 

Le titre du film "Les petits cailloux blancs" fait référence à une tradition juive qui consiste à semer des petits cailloux blancs sur les tombes a été projeté lors de cette soirée du 20 mars 2024 au Mas d'Azil.  Ce court-métrage de Mathieu Orlieb montre le parcours d'Isi Veleris. En 1942 il a 9 ans et échappe contrairement à sa mère à la déportation en étant caché au château. Le film est en ligne https://youtu.be/s0vNcNyv_5o?si=SXLfN5Pco1Pbq7-a

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