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Billet de blog 18 mars 2015

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charlie et les autres

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Vivre ensemble.

Les libertés de réunion, d’expression, de la presse n’ont pas toujours été unifiées sous la même bannière de la liberté. Au-delà des nécessaires opinions, de leurs pluriels, leurs différences et divergences, c’est la liberté qui est d’abord essentielle. On sait par exemple que les sociétés totalitaires supportent mal la pluralité, toute la pluralité, la pluralité tout court. La pluralité ne doit cependant pas effacer la singularité, pas plus d’ailleurs que le masculin n’écrase le féminin, et inversement. C’est un équilibre, une harmonie à trouver, ce n’est pas simple.

A une autre échelle, pas très loin de nous, au pays des libertés, de la liberté d’expression, on peut rencontrer au café, dans la rue, dans son voisinage, ses amis, sa famille, etc… des individus, groupes d’individus dont le discours à un profil totalitaire, radical, ne supportant, n’acceptant pas l’alternative, une autre voie pour regarder les choses et le monde. Il est important d’écouter et, autant que c’est possible pour qui ne porte pas trop d’œillères, de convaincre, semer le doute au moins chez ces esprits tourmentés, prisonniers qu’ils sont de parcours de vie trop imprégnés de misères, de dévalorisations profondes et d’appréciations jugeantes qui les rassurent mais qui ne le permettent pas de s’élever au-delà de courtes et tristes vues.

On oublie trop souvent qu’il n’est pas de toute éternité que notre pays n’a pas toujours été celui des droits de l’Homme et du citoyen. Il faut croire que ses principes mêmes de 1789 n’ont pas suffi et qu’il a fallu au-delà abattre encore des murailles, briser des chaines pour parvenir ne serait-ce qu’au droit de réunion[1], de liberté de la presse[2], etc....

Vu d’aujourd’hui, il peut paraitre que curieusement, ce ne sont pas des droits innés mais des droits acquis de haute lutte. Il faut croire, malgré l’apport fondamental des Lumières (Voltaire, Beaumarchais, etc…), la révolution de 1789 qui a suivi, avec son cortège d’horreurs et de bienfaits, que des forces contradictoires se sont affrontées avant d’accorder plus ou moins contraints et forcés, d’abord sous forme de restrictions, au final le plein droit à ce type de libertés toutefois cadrées par des limitations.

Eloignée de ce type de grandes causes par des facteurs divers qui affaiblissent la citoyenneté et portent au pinacle l’individualisme, l’époque manque de perspective ouverte sur le vivre ensemble, est plutôt tentée par le recentrage, le centrage sur l’individu et au final engendre autant si ne n’est plus son isolement que son bonheur. A contrario, même si certains y ont cru, des faits historiques ont démontré que le tout collectif ne se revêtait pas que de vertus, était un mortel totalitarisme qui refusait de se regarder comme tel.

Vivre ensemble, ce n’est pas évident, ce n’est pas gagné d’avance, c’est un objectif à sans cesse mettre, remettre en mouvement, « sur le métier ». Il demande de la volonté, de l’énergie, du courage tant il ne va pas de soi, que de soi.

Sans que cela soit, devienne obsessionnel au point qu’absolument toute son énergie soit consacrée, développée à cet unique aspect, et qu’au final on risque d’obtenir exactement l’effet inverse à celui escompté en se retrouvant seul à ramer dans ce sens, il est important d’agir de manière collective et en conscience dans cet objectif, dans ce type de lien social.

Peu importe le véhicule, qu’il soit connoté artistique, économique, etc…, peu importe. Car l’essentiel ne se situe pas au niveau de la forme qu’il revêt, mais qu’il soit vivant c’est-à-dire en mouvement, en paroles.

Avoir des points communs n’empêche pas, au contraire, de cultiver et d’exprimer des différences. L’intérêt n’est pas forcément de les conserver exclusivement pour soi, pour ceux avec qui on est en adéquation, mais de les offrir alentours à qui veut s’en saisir, à qui veut offrir les siennes pour enrichir le débat et cultiver la tolérance.

C’est là un acte citoyen que d’utiliser tous les moyens possibles, et les plus simples sont peut-être les meilleurs, les plus prolifiques, prolixes pour atteindre cet objectif, font office d’éducation permanente, sont des cadeaux précieux que l’on offre aux autres et sont autant d’enrichissements personnels et réciproques.

Il faut utiliser tous les moyens, toutes les armes pacifistes qui servent à faire vivre sa libre pensée. La libre pensée est source de créativité, de lien, d’ouverture d’esprit, d’accès à la culture et nous éloigne un peu plus chaque jour du risque, de la tentation de la pensée unique et de la bestialité qui annihile notre participation à une ’humanité digne de ce nom.

Car la cruauté se banalise et l’opinion, l’indignation deviennent subversives, risquées. Et, mondialisation aidant, la cruauté prend tellement d’ampleur qu’il faudrait passer son temps à s’indigner… Les tensions contractent les libertés et, les libertés se contractant sous l’effet d’un sentiment grandissant d’insécurité, la tension s’amplifie...

La responsabilité, les responsabilités n’appartiennent pas à un camp, elles sont indistinctement partagées, sont l’œuvre d’un rapport de forces éminemment aveugle, autodestructeur et stérile où les protagonistes se renvoient à la face un grand déballage de reproches, où finissent par se confondre causes et conséquences.

Les raccourcis, les amalgames, ce qui peut apparaitre comme des évidences, se nourrissent d’une frange médiatique importante et qui déballe un flot continuel d’’information tronquée autant que de distractions plus qu’abêtissantes. Il ne s’agit pas d’élever le débat mais d’alimenter une certaine partie croissante de la population et qui en redemande….

Désigner des fautifs, les montrer du doigt n’appartient pas qu’à l’Histoire. Comme en d’autres temps pas forcément héroïques de notre passé historique, la tentation s’agrandie à mesure de la rumeur qui gonfle de trouver dans l’altérité, l’étranger la source des maux du jour.

Le monde semble de plus en plus divisé en deux parties : le bien d’un côté et le mal de l’autre. Chacune des parts de ce monde bipolaire se renvoie la balle en affirmant que le mal, c’est l’autre camp et il devient bien compliqué de se situer, d’agir, d’être regardé autrement lorsqu’on pense autrement.

Mettre la tête sous le sable n’est pas la meilleure façon de se protéger de la folie meurtrière du monde et qui est là pas loin, à sa porte tant qu’il n’y est pas encore entré….

Même s’il s’avère qu’il est plus facile de détruire que de construire, face à la haine, il faut opposer, proposer du lien, du vivre ensemble. Pourtant, Il ne faut pas vivre dans « un monde bisounours » où « tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ». Le monde est rude et ce constat établi, il s’agit d’en être conscient, d’avertir, de rester vigilant et de faire ce qu’on peut à son niveau, avec ses moyens et avec d’autres qui peuvent s’y fédérer, de faire vivre tout ce qui peut contribuer à renverser le désordre établi avant qu’il ne devienne véritable chaos.

Nous héritons du monde façonné par nos pères, participons à celui dans lequel nous vivons et que nous allons léguer à la génération qui en prendra les commandes.

L’un des intérêts d’être vivant, c’est d’y rester. Alors, il faut souhaiter que cela fasse école et que vive tout ce qui existe déjà qui rassemble, vive tout ce qui est et reste à inventer encore ici comme ailleurs.

Autant que faire ce peut, il parait fondamental de fédérer nos énergies vitales autour de partages conviviaux tant au niveau familial, du voisinage, de la commune au travers de manifestations culturelles qu’il s’agit de diversifier à l’infini de ce que l’esprit créatif humain peut élaborer. Il faut favoriser tout ce qui peut émerger de l’expression de la différence tout en faisant la promotion de l’unité ; la fraternité. Nous vivons sur une même unique planète et celle-ci est vivante parce qu’elle est faite de diversités (géologie, faune, flore, etc…).

La meilleure résistance est probablement celle qui utilise les armes du pacifisme. On ne gagne pas à tous coups et il peut même arriver d’essuyer de cuisantes, graves et meurtrières défaites. Ayons le courage de continuer le combat. En dehors de lui, il n’y a peut-être point de salut.

Tant que nous appartenons au monde des vivants, même les uns à côté des autres, nous sommes condamnés à vivre, communiquer, parler ensemble. Autant que cette peine, si s’en est une, soit la plus douce possible et que la magie opère en nous et nous offre le plus de plaisirs possible à offrir et partager.

Plus que de magie, ce serait ramener un peu de raison, d’intelligence face aux flots perpétuellement mouvants et qui ne cherchent qu’à nous happer dans les glauques tourbillons de l’obscurantisme.

Méfions-nous de nous-mêmes au moins autant que des autres, de la méconnaissance des méandres de nos propres contradictions. Méfions-nous de nous-mêmes, du détournement de soi lorsqu’ au cours de rencontres scabreuses avec d’autres, avec ceux qui savent suffisamment tirer les ficelles et la couverture pour eux-mêmes, qui tentent de nous entrainer dans leurs griffes pour nous mettre au service de leurs propres et uniques intérêts, nous nous éloignons de nous-même au point de nous perdre, nous noyer.

Vivre ensemble et se taire si on en a envie, se parler, s’entendre aussi et se dire si on est d’accord et aussi, surtout, s’écouter même si on ne l’est pas… Vivre ensemble ; vaste et beau programme ! RD

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