RENE FIORI (avatar)

RENE FIORI

Abonné·e de Mediapart

220 Billets

0 Édition

Billet de blog 9 octobre 2015

RENE FIORI (avatar)

RENE FIORI

Abonné·e de Mediapart

DE L'ERE DES FOULES (4) ET DE SON INFAILLIBLE ACTUALITE DANS LES AFFAIRES PASSEES, PRESENTES, ET FUTURES

RENE FIORI (avatar)

RENE FIORI

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Louis-Gérard Varnet, lui non plus n’est pas tendre avec la foule, dans son remarquable et lucide essai, L’ignorance et l’irreflexion. Mais ces réflexions sont on ne peut plus d’actualité à l’heure de la généralisation des connections numériques où la moindre émotion se répand comme traînée de poudre. Et à lui aussi, à propos de la foule sous son aspect de masse, lui vient le terme de pression. « Toujours les foules diminuent la personnalité, écrit-il. Les états communs de joie ou de peine, d’enthousiasme ou de colère, les larges courants de sympathies ou de haine effacent les préoccupations individuelles. Chacun se perd et s’absorbe dans le groupe, prêts aux explosions du sentiment ; en revanche, l’aptitude à la réflexion lucide, la possession de soi, le sang-froid diminuent  de toute la pression qu’exerce la masse environnante. »  Cette pression, psychique, qui est le cœur de notre propos, non mécanique a, il faut bien l’avouer, quelque chose de newtonien.  Elle déploie autour d’elle et sur les éléments qui s’y trouvent, un champ de forces. Elles sont des automates collectifs que des impulsions extérieures, harangues des meneurs,  événements accidentels, soutiennent et gouvernent. (p50). Nous avons là en effet, un fonctionnement similaire à celui d’un robot, sinon que chacune des parties de la foule agit et pense par hystérisation mutuelle. L.G Varnet lui-même n’hésite pas à se référer à la balistique sinon au phénomène d’inertie inclus dans le mouvement uniforme à partir duquel Newton va mettre au point sa loi d’attraction et de gravitation. « Elles persévèrent dans l’attitude actuelle de même qu’un mobile continue la direction commencée ; mais de même aussi que le mobile est incapable de modifier  le sens ou la vitesse de son mouvement, de même les foules sont  impuissantes  à change , à suspendre, ou à précipiter une suite d’événements.  Tout pouvoir d’innovation ou d’initiative leur fait défaut » (p.71). Il faudrait d’ailleurs préciser que c’est pour chacun de ses membres au un par un qu’il en est ainsi. C’est là une des figures du pouvoir captateur de la foule, quelle qu’en soit la configuration. Il s’ensuit dans ce cas, ce que LG Varnet appelle plus loin (p.68) une interversion des rôles. A l’état normal, pour la personne vivante et active, ses idées ne sont que des instruments et des moyens d’actions, elles  n’ont donc qu’un reflet d’existence, qu’une réalité d’emprunt, dit-il, dans cette interversion c’est la conception qui vit et agit et le sujet est son docile instrument. L’homme s’agite et l’idée le mène. D’un certain point de vue, on peut se sentir tout près de l’automatisme mental de Gaëtan de Clerambault, mais il y faudrait quelque chose de plus, la résurgence d’un affect, d’un sentiment comme celui de l'humiliation qui revient et impose ses paroles au sujet, ce que reprend Jacques Lacan dans son séminaire  Les psychoses. Ici la personne est agie, dans le sens où elle est parlée. Le schéma de de Freud indique lui que l’idée qui mène, captive, hypnotise, prolonge,  se place dans la continuité de ce qui a autrefois captivé le sujet, ce ou ces signifiants idéaux auxquels elle se met maintenant en synthonie. Le prestige de la parole et son efficacité persistante, dans l’immersion grégaire, serait aussi à rapporter  à cette mise en continuité de l’histoire passée de chacun -où a été pour la première fois mis en jeu ce lien libidinal spécial, installé dans la durée- avec son actualité qui est actualisation de ce lien toujours présent mais latent.

Illustration 1

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.