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Billet de blog 24 août 2015

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LE PSYCHANALYSTE, VARIABLE D'AJUSTEMENT

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le contexte auquel se rapport notre propos, est celui de quelqu’un : un proche, un enfant, un frère, une soeur, un parent, et qui se voit confisquer son  initiative de sujet par un élément, lequel peut être très différent d’une personne à l’autre : une idée, une phobie, une pulsion, des hallucinations, un passage à l’acte, une dérive mélancolique irrépressible, des événements de corps invalidants, un sentiment intense d’abandon, un sentiment de vide, de décalage. Cette abolition de l’initiative déborde, contourne sa volonté, et ce qu'il peut avoir comme idéal de lien social, familial, amoureux. Par contrecoup, ce débordement envahit, heurte, questionne, malmène les personnes de l’entourage : mère, père, frère, sœur,   proche…Pour ces dernières cependant, on peut dire me semble t il  que la plupart du temps, c'est de ce qui entre en résonance avec leur propre histoire que sourd leur difficulté à déjouer la souffrance insupportable qu’elles éprouvent dans ce lien, résonance d’un point problématique qui devrait , quand c’est possible, pouvoir être recueillie, accueillie, avec les affects et les sentiments qu’il suscite. Quand une personne, quelle qu’elle soit, vient ainsi consulter pour un de ses proches, mais aussi plus largement quelqu'un de son entourage, c’est cependant ce qui la concerne intimement dans ce qu’elle nous raconte de cette situation qui est le nucleus des entretiens, c’est-à-dire la ou les difficultés qui sont les siennes au regard de ces liens familiaux, amoureux,  ou sociaux. Si on y regarde de prés, toute personne, quelle qu'elle soit, qui consulte se rend seule au cabinet de l’analyste, mais c’est toute la famille qui y est convoquée et présente. Alors comment concevoir cette consultation avec un psychanalyste, alors qu’il ne s’agit d’aucune demande de suivre une psychanalyse ?

Voici, pour nous guider, les précieux témoignages que nous pouvons lire dans le  dossier du numéro 84 de La lettre UNAFAM où chacun s’exprime sur le fil de sa parole et au plus près de son expérience. Chacun parle certes de lui-même, mais aussi de la place qu’occupent les parents, ou qu’il voudrait leur voir attribuer. Comment faire au jour le jour pour tel parent en difficulté? Il ne s’agit certes pas de maintenir un lien avec l’enfant idéal, imaginaire, que chacun peut avoir gardé en tête, mais avec l’enfant réel tel qu’il se présente. Cela passe nécessairement par tendre à une modulation symbolique, modulation qui est à trouver, qui est chaque fois à inventer, néanmoins toujours précaire, toujours à ajuster et qui peut n’être jamais stable dans le temps. Modulation qui n’est cependant pas possible dans tous les cas, les éléments destructeurs étant trop présents, trop pesants, trop conflictuels, sans respiration pour personne. Un homme me racontait récemment que le fait d'être en souffrance dans son travail, n’était pas certainement pas sans rapport avec un père qui rabaissait constamment ses enfants. Il n’y avait eu avec ce père, aucune possibilité d’instaurer un lien tempéré par une médiation modulée symboliquement. Devenu adolescent, il a demandé à être placé en pension pour pouvoir s’éloigner de cette atmosphère délétère et passer son bac, qu’il a d’ailleurs réussi brillamment «  Cela a été une des plus belles années de ma vie », nous dira- t il. Alors vous vous poserez la question, à juste titre, de ce que peut être  cette médiation symbolique à moduler ? Evidemment le terme de symbolique est un terme plutôt surchargé de sens, de sens psychologique, de sens psychanalytique, de sens historique, de sens commun aussi. Mais cela peut n'indexer, quelquefois ne serait ce qu’une toute petite trouvaille, juste de quoi instaurer la bonne distance entre parent et enfant, le bon tempérament. ET c'est déjà beaucoup. A défaut, la séparation pure et simple, temporaire ou prolongée,  s’impose alors, comme dans le cas de notre patient.

 Nous en avons des indices, sinon des indications dans ce dossier de la Lettre 84. L'écriture y déjà est abondamment présente, activité qui devrait pouvoir se faire en toute sérénité. Un certain dosage de la parole aussi «  En ne leur parlant pas profondément, je les protège et je me protège », dit W de ses parents. Où il faut entendre que l'indication est réversible, c'est à dire des parents vers l'enfant. " Mon père coupe court à toute question un peu métaphysique". Peut être ici peut on y entendre aussi la mise en place d'une protection. La contrainte à l'insertion pour un travail qui ne serait pas ajusté à la personne, est aussi un point délicat. Donc ici prudence. L'excès d'amour qui, par rétorsion, peut induire des phénomènes intrusifs : « J’adore mes parents, mais je les aime trop, c’est mauvais. C’est fusionnel " . A l'inverse la peur du lien rompu, de l'abandon fait appel pour une parole rassurante «  J’avais tellement peur qu’on m’abandonne ». ( Mathilde «  sans mes parents je ne serai plus là »), et Demande de réassurance qui a trouvé à s’appuyer, pour cette personne,  sur cette phrase générique que lui a glissée judicieusement son psychothérapeute : "J'ai peur que vous m'abandonniez" Ce sont des indications que donne la personne en difficulté et qui sont à recueillir pour les proches, mais aussi par le psychanalyste Disons qu'en tenant compte de ces éléments,  l'entretien avec un psychanalyste serait plutôt de l'ordre d'une conversation propre à trouver ce qui serait le plus propice à déceler les éléments qui pourraient tendre vers un lien tempéré avec ce qui peut se présenter comme le plus insupportable chez l'autre. Ceci en tenant compte de la singularité de chacun. René Fiori ( Article paru dans la Lettre de l'UNAFAM Paris N°85- 2014)

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