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Billet de blog 26 juin 2017

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L'ANAMORPHOSE D'EMMANUEL MACRON

La politique comme art ? https://www.mediapart.fr/journal/france/300617/il-n-y-plus-d-ecart-entre-le-discours-politique-et-celui-issu-de-l-entreprise?page_article=2

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Avec les articles de Lacan Quotidien, ceux de La Règle du jeu, saluons la Lettre de campagne de Laurent Joffrin dont chaque parution est un régal.  Laurent Joffrin, avec sa grande culture politique, ne manque pas d'utiliser, pour la sous peser à l'aune de l'actualité, la sémantique politique dans toute sa pertinence : "mécanismes gaulliens" "Ve République", "monarchie élective", etc. d'autant que l'éditorialiste ne manque jamais d'infléchir  cette actualité en la rendant vivante par des termes, des vignettes historiques, des métaphores biologiques ( scissiparité), les contes ( Les sept nains) et toute sa culture, qui donnent une vigueur certaine à la lisibilité proposée au lecteur qui s'en trouve agréablement surpris, et qui goûte cette intelligence qu'on lui fait partager. 

Cette vue de biais d'un qui ne s'en laisse pas compter et qui nous restitue un background de ce qui se joue entre les lignes est, oh combien précieuse ! 

Oui Emmanuel Macron a " fendu le système", comme il le disait de Jeanne D'Arc, c'est un acte unique dans l'histoire politique récente ( ce que souligne Bernard Henri Levy). Et ce n'est pas fini, puisque les effets de cette refente gagne le domaine des hauts fonctionnaires de l'administration ( article d'Anne Marie Idrac dans le monde daté du 27 juin " les ministres sont les patrons, pas les hauts fonctionnaires).

Ne sommes-nous pas là devant un cas d'artiste en politique :

" On ne regarde presque jamais, écrit Simone Weil, la politique comme un art d'espèce tellement élevée. Mais c'est qu'on est accoutumé depuis ds siècles à les regarder seulement, ou en tous cas principalement, comme la technique de l'acquisition et de la conservation du pouvoir" ( L'enracinement p.276)

Il y a de plus,  à notre sens, un effet anamorphique de l'action d'Emmanuel Macron, effet qui ne se révèle que par touches progressives, du fait d'ailleurs d'un calendrier forcément graduel dans son application. Il y a un premier tableau, et un second pour peu que l'on change d'angle.

Alors que l'histoire politique, son vocabulaire, le nom des lieux où se joue les enjeux pour l'avenir, les fonctions, les attributions, les organes etc.,  véhiculent une sémantique ancrée dans l'histoire, dirigeant automatiquement, ou de manière réflexe- c'est selon- les commentateurs comme des "aiguillages" des " mots-ponts" ( termes qu'utilisait Freud pour les mots à plusieurs sens) vers l'histoire et la géographie de toute cette mécanique politique, l'expérience dirigeante et organisationnelle d'Emmanuel Macron est, elle, double .

D'abord comme directeur adjoint de la banque Rothschild, ensuite comme ministre de l'économie; d'abord dans une organisation de gouvernance, ensuite dans une organisation de gouvernement; d'abord dans une culture d'entreprise privée, ensuite dans une culture politique au service du bien public; d'abord dans une relation fonctionnelle injectée du discours managérial, ensuite dans une relation fonctionnelle perfusée de langue politique ancrée dans l'histoire; d'abord une expérience des forces en jeu dans un organigramme soumis aux marchés, ensuite de celles qui traversent les organes gouvernementaux soumis aux forces politiques etc.

Ce sont les seconds termes qui sont si bien visibles au public. D'où les cris d'orfraie des commentateurs politiques (voir Le figaro sur le web), par exemple concernant l'annonce d'un Congrès réunissant les deux chambres au château de Versailles, mais indiquant ainsi que leur grille de lecture est périmée.

En effet pour peu que se décantent lentement les lignes de force qui recomposent, sous nos yeux, l'actualité politique, ce sont par contre bien les premiers termes qui risquent de se révéler  être à l'oeuvre, du fait simplement d'une certaine efficacité.

Et pourquoi, malgré cela,  tout ceci semble t il plaire à " cette nation si souvent frondeuse" , comme le souligne Laurent Joffrin dans sa dernière lettre ? : 

"Curieusement, cette conception du pouvoir, verticale, unifiée, hiératique et solennelle, semble plaire à cette nation si souvent frondeuse. En s’emparant de tous les leviers à sa disposition – tous légaux et constitutionnels, il faut le préciser, point de dictature là-dedans - le président rassure de toute évidence le pays".

La réponse n'elle pas donnée par le quotidien La Croix ( sur le web du 23 juin 2017). Titre : "La bienveillance tente une entrée en politique",

"S’inspirant en partie de la « psychologie positive » qui connaît un grand succès depuis les années 2000, le principe de « bienveillance » mis en avant par Emmanuel Macron ambitionne de renouveler nos mœurs politiques." 

Cette mise en oeuvre de la psychologie positive contient un grand potentiel, une propriété détersive  : ringardiser tout se qui se déclarera négatif , oppositionnel, contra-posé, à cette action ( voyez pour cela certains groupes parlementaires ! )

C'est aussi par exemple - en transposant cette idée- ce qui a été expérimenté lors de la semaine mentale organisée cette année par l'ARS ( Agence Régional de Santé) sous le titre " Santé mentale et Travail", dans la ville de Bagneux. La mairie (communiste) n'ayant pas souhaité accueillir dans ses locaux une intervention sous l'égide de l'association Souffrances Au Travail, mais en lieu et place, toutes celles qui étaient proposées sous le titre "Bien être au travail" ( l'intervention a bien eu lieu, mais dans un lieu plus excentré, cependant que le public était lui heureusement au rendez-vous ) 

C'est selon nous cette " bienveillance" qui s'installe, avec son effet retour de/et sur le public, instaurant par là-même un élan vers le positif -ainsi que la langue, le discours , qui y seront syntone- qui possiblement déclassera tout ce qui fera office de toile émeri.

C'est un élan qui a un effet entraînant, qui a la propriété "d"embarquer" tout le monde, avec l'effet concomitant et d'une force égale de relégation, de marginalisation des " non participatifs", à ce qui se décline en humeur enthousiaste et tonique. Eux, deviendront les grincheux, les empêcheurs de tourner en rond.  Et le fond risque de n'y changer pas grand chose.

C'est cette même positivité qui a si bien su autrefois, dans les grands groupes (Depuis les années 90 jusqu'à aujourd'hui) , avec force séminaires d'équipes, constituer un puissant sédatif à l'égard de l'action des groupes syndicaux les moins " constructifs". Il fallait avoir "l'esprit d'équipe"! Esprit propre à dissoudre les moindres réticences, chacun  voulant au fond de lui participer au banquet, à la fête, bref, en être.

Ce nouveau milieu politique aura il le pouvoir de désactiver la nuisance du groupe EffetHaine des huit ? Car il s'agit bien  icid'une première avec l'entrée de MLP, et leur représentation n'est pas à minimiser.

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