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Billet de blog 7 mars 2025

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La paix envolée

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Illustration 1

Je m'apprêtais à écrire sur le drapeau blanc éclatant que quelqu'un avait brandi à sa fenêtre facebook en signe de ralliement pour la paix, mais il a été emporté, lui et son ciel bleu avant que j'aie eu le temps de tourner ma réponse.
J'aurais voulu lui envoyer une petite giclée de mots pour le salir un peu, non pas délibérément mais pour marquer mon passage de quelques gouttes d'encre, pas même des taches de sang...
Et voilà que mes mots, finalement, se trouvent par grand vent sur un balcon à essorer la lumière, comme dit le photographe Thami Benkirane, d'une lessive plus quotidienne, ce qui leur conviendra mieux, ils ne sont pas faits pour les drapeaux ni pour l'héroïsme des grandes causes.
Nous aspirons tous à la paix. Nous sommes l'immense majorité des humains à la désirer. L'organisation des nations unies devrait se donner pour mission de préserver — ou de rétablir — la paix partout dans le monde, c'est ce qu'elle fait, théoriquement. Mais c'est une tâche très difficile, très compliquée. C'est pourquoi on préfère ne pas trop y penser et, bien que cette tâche incombe sans distinction à chacun d'entre nous, on préfère la déléguer à une organisation. Le fait est que l'organisation comprise comme celle de tous devrait organiser démocratiquement toutes ces aspirations individuelles pour les transformer en actions efficaces. Mais le stade de l'aspiration individuelle isolée n'est qu'un souhait, ce qu'on appelle aussi un vœu pieux.
Je marchais ce soir sur la large esplanade d'une ville française, il faisait doux, des gens détendus étaient aux terrasses, ou se croisaient, échangeaient parfois des regards confiants ou bienveillants, on sentait le bonheur d'être dans une ville en paix. On dit dans les sondages "un sentiment de" ou "un ressenti de" paix, car la paix n'est pas une valeur en soi et l'on sait bien depuis longtemps qu'il n'y a pas de paix sans guerre, les deux forment un coupe comme tous les couples, pour le meilleur et pour le pire. Ici, ce soir, on avait le sentiment du meilleur. J'entendais un enfant derrière moi relatant des personnages de bédé ou vidéo en action, "tu connais son nom au boss" interpellait-il sa mère — qui suivait distraitement —, l'enfant était très présent, très attentif à son récit.
Puis la soirée pour chacun sera conforme à sa vie. Peu échapperont à une forme de conformisme que les enfants ne connaissent pas, car ils sont à l'âge de l'action.
Mais bientôt on leur dit : Tu dois réfléchir avant d'agir. Et c'est le début de l'immobilisme. Mais peut-être pas.

Photographie de Thami Benkirane

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