Je perçois tout d'un coup ce qui m'entoure. Au milieu des toitures un tilleul dont les bourgeons très lisses, fourmillants, n'ont pas encore éclaté — ou peut-être si, si je pouvais les voir de près —, sont-ils à l'unisson — ou plutôt dans un complexe accord avec les miens (qu'hier j'imaginais) ? Des gras cris de choucas, passant tout près, m'enchantent, et le trafic sur le boulevard m'emporte dans une quotidienneté nouvelle, comme si la vie voulait malgré tout continuer, persévérer dans son être. Il y a un mail d'un ami qui me parle de phénoménologie, de dasein et aussi d'un livre prêté que je lui ai prêté où il voit des essais-fictions (comme c'est bien dit) à propos "d'habiter". Comme je m'éveille aussi dans la persistance fraîche du brûlant de la voix que france culture redonnait hier soir (Nastassja Martin) et des mots qu'elle écrivit aussi du peut-être partage de l'âme de l'ours, je remarque que le livre (de F. Vigouroux) s'appelle "l'âme des maisons".
Habiter, c'est bien le mot du jour, et c'est plein comme un œuf ainsi que le jardin des délices et l'enfer, d'un seul tenant tout d'un coup. Ainsi de nos concepts, de nos tentatives de com-prendre :
l'écologie — l'histoire de la maison — le temps — l'univers ni plus ni moins — ("il y a des déterminations absolument fatales" selon Héraclite.)
C'est cet instant qui est...
Or, nos heures et nos jours, les années de notre vie, ne sont qu' « un instant », dit Montaigne, « une eloise [éclair] dans le cours infini d'une nuict éternelle » rappelle Marcel Conche.