C’est pas par ce que c’est de pire en pire qu’on va arrêter de faire les soirées électorales entre amie.e.s. Au contraire, c'est bien connu, ça permet d’apaiser un tantinet le seum.
Boire quelques coups en crachant sur le poste ça reste une tradition sûre : avec à l'écran le gang Duhamel au complet, l’affreux Brice Teinturier qui ressemble vachement au mec du R.N qui est à côté de lui (tiens, d'ailleurs, y a plein de nouveaux chez les fafs), et Rachida Dati qui va bien finir par débarquer à un moment sur le plateau.
Les résultats tombent.
Bon, c’est à quelque chose près le pire qu’on pouvait imaginer.
On zappe un peu sur BFM. Ah, ici Manon Aubry a un point de plus. Peut être que sur LCP elle est à 10 ?
On résiste pas à zapper un coup sur CNews,
Alors là, bien sûr, ils ont déjà poussé la dystopie un peu plus loin et en sont à se fighter entre fachos. « Mais c’est vous qui refusez l’union de l’extrême droite » « Ah mais non, je ne peux pas vous laisser dire ça… ».
Elles ont beau être européennes ces élections, sur toutes les chaînes, pas un mot des résultats dans les autres pays.
Pourtant, ça pourrait être bien d’avoir une idée des endroits où imaginer un éventuel transfert dans les prochaines années. A ce que je comprends, la peste aurait été un peu contenue au Danemark, en Espagne, voire en Roumanie…
Quoi qu’il en soit, on risque pas d’entendre beaucoup plus parler d’Europe ce soir puisqu’il y a l’Autre qui débarque et nous sort sa dinguerie : il dissout !
Il a pas bougé d’un iota face aux manifestations monstres, ne s’est pas écarté d’un centimètre de sa trajectoire à chaque mouvement social… Mais là, le R.N pousse à la porte et il fait tout péter.
L’élection sera donc dans trois semaines.
Autant dire que l’idée qu’un scrutin, et qui plus est avec un enjeu de la sorte, ait besoin d’un minimum de temps de campagne et de débats ne lui traverse pas l’esprit un instant. Sans doute, si on pouvait même faire ça dans la foulée, ce soir, en appuyant sur une touche de l’ordi, ça lui irait très bien.
Alors, on fait les comptes (d’ailleurs entre temps LFI a dépassé les 10 %), et on se dit que, tout additionné, il y a encore quand même un petit semblant de Gauche dans ce pays et qu’on pourrait, malgré tout, tenter quelque chose.
Mais, cerise sur le gâteau, pour conclure cette soirée horrible, l'intervention de Glucksman.
Au fil du discours le plus ennuyant et langue de bois entendu depuis les pires heures du mandat Hollande, le beau gosse revenu d’entre les sarkozystes et les autocrates géorgiens pour se transformer en icône glamour de la gôche nous fait comprendre qu’ « Il » (puisque visiblement le parti n’a pas trop été consulté) est désormais le boss, qu'il a ouvert un "espace politique" et qu'il ne veut pas d’Union. Et à travers ses mots affreusement creux mille fois répétés de « démocrate », et de "clarté" ponctués d'une bonne dose de « Jacques Delors » et de "Mendès France", on entrevoit tout un walking-dead du PS qui se met en branle, et fait revenir d’entre les morts les Manuel Valls, les Cazeneuve et autres Le Foll pour finir de plomber l'histoire. Un genre de machine qui pourrait très rapidement se trouver plein d'excuses pour s'allier avec le libéralisme autoritaire macronien plutôt qu'avec un programme commun écolo et social.
Alors ça, il faudrait déjà peser de tout notre poids pour ça n'arrive pas.
On va rappeler à Raph qu'un peu plus de trois points d'avance à Gauche alors qu'on a bénéficié de toutes les couvertures en papier glacé depuis trois mois et d'une mobilisation médiatique et politique sans précédent pour diaboliser la France Insoumise, ça n'autorise pas vraiment à faire le beau. On va espèrer que le P.S se distingue quelque peu de sa tête de liste, que Mélenchon ne sorte pas trop de conneries, que les Verts poussent à l'union. Tiens, on pourrait même tous les menacer en mode #RefaiteslaNupesouonvoteRN !
Bref, comme on dit, la situation est trop désespérée pour être pessimiste. Il va bien falloir trouver quelques moyens de s’organiser. Vite. Et, pas seulement pour se faire des soirées électorales pleine de larmes.