Washington : le bras de fer judiciaire des tarifs

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Le 2 avril 2025 Trump annonçait, lors de son discours du « Liberation day », des droits de douane (tarifs) universels de 10 % sur presque toutes les importations.
Des droits de douane qu’il qualifiait de « réciproques » s’y ajoutaient avec des taux de 11 % à 50 % à partir du 9 avril pour une soixantaine de pays accusés de pratiques commerciales abusives à l’égard des États-Unis (EU). Finalement compte tenu de réactions négatives des marchés financiers, l’application de ces droits de douane, parfois renégociés pendant cette pause, fut repoussée au 7 août.
« Un mensonge répété mille fois… »
Le 7 août il écrivait sur son réseau Truth Social « Des milliards de dollars de droits de douane entrent maintenant aux États-Unis », feignant de croire que ce sont les pays étrangers qui payent les droits de douane. L’argument avait été déjà avancé lors de son premier mandat puis dans la campagne électorale
Ainsi le 24 octobre 2024 il déclarait : « Je propose des droits de douane sur les autres pays qui profitent de nous… Ces droits de douane sont payés par le pays qui abuse de nous, PAS PAR LE CONSOMMATEUR AMÉRICAIN. »
C’est évidemment faux. Ces droits sont payés par les importateurs états-uniens qui les répercutent, pour l’essentiel, sur les consommateurs.
Malgré les démentis répétés des économistes, Trump et son entourage ont martelé ce discours. Le secrétaire au Trésor, Scott Bessent, a d’abord nié que les États-Uniens paient ces taxes, avant de reconnaître que les chèques de dédouanement étaient bel et bien signés par les importateurs.
Mais la « réalité alternative » ne change rien aux faits : ces droits de douane provoquent une hausse des prix. Ce sont surtout les ménages populaires ou moyens qui sont touchés car ils consacrent une plus grande part de leur revenu à la consommation de biens importés moins coûteux.
Les entreprises ont ralenti ou gelé les embauches ou même procédé à des licenciements du fait des incertitudes économiques créées. Les mesures de rétorsion de la Chine ont lourdement touché les producteurs de soja.
Le front judiciaire
En avril 2025, la Cour du commerce international, qui traite les litiges relatifs aux lois douanières et au droit commercial, saisie par des PME et douze États démocrates, jugeait illégale l’imposition de droits de douane généralisés, estimant que Trump avait outrepassé son autorité et que ces mesures s’apparentaient à une taxe ne pouvant être décidée que par le Congrès. Le tribunal ordonnait donc la suspension des tarifs mondiaux, tout en maintenant ceux ciblant certains secteurs (acier, cuivre, automobile).
La cour d’appel fédérale confirma en août ce jugement, estimant que Trump avait abusé de la loi sur les pouvoirs économiques d’urgence internationaux (IEEPA). Néanmoins, les droits de douane restent en vigueur pendant la durée de l’appel, le gouvernement ayant saisi la Cour suprême.
Un test politique majeur
L’affaire dépasse de loin la question des droits de douane. Une confirmation par la Cour suprême ne se contenterait pas de rebattre les cartes du commerce mondial. Elle porterait un coup sévère à un élément fondamental de la politique économique de Trump et à l’unilatéralisme. L’affaire sera plaidée début novembre.
Reste l’incertitude : si Trump perd, faudra-t-il rembourser les centaines de milliards déjà encaissés ? Et comment indemniser les consommateurs ?
Trump a tenté de couper court : « Tous les droits de douane sont toujours en vigueur ! Si ces droits venaient à disparaître, ce serait un désastre total pour notre pays. »
L’enjeu est de taille. Avec une majorité de juges républicains – 4 sur les 7 juges – les pressions sur la Cour Suprême vont se multiplier.