Pourquoi les centaines de milliers de manifestants le 17 août en Israël ?
Le 17 août, des centaines de milliers de personnes ont manifesté en Israël. Les principales artères du pays, y compris les autoroutes, ont été bloquées par des protestataires. Des rassemblements importants ont eu lieu dans tout le pays, notamment à Tel Aviv — la plus massive — mais aussi à Haïfa et dans d'autres villes. Des appels à la grève ont émergé, bien que la Histadrout (la centrale syndicale israélienne) ait refusé d’y participer.
À l’origine du mouvement : les familles d’otages
Cette mobilisation exceptionnelle a été déclenchée par une nouvelle décision du cabinet de Benjamin Netanyahu : l’extension de l’occupation militaire directe sur l’ensemble de Gaza, avec pour objectif affiché la poursuite de l’éradication du Hamas. Il s'agit en réalité d’un approfondissement du nettoyage ethnique et du génocide en cours contre les Palestiniens.
Face à cette politique, les familles d’otages ont tiré une conclusion claire : si la guerre continue, leurs proches ne reviendront pas vivants. Elles ont donc lancé un appel à une journée nationale de blocage, articulée autour de deux exigences : la conclusion d’un accord immédiat pour la libération des otages et l’arrêt de la guerre.
La réaction du gouvernement ne s’est pas fait attendre. Netanyahu et ses ministres ont accusé les manifestants de compromettre les chances de libération des otages, de servir les intérêts du Hamas et de s’aligner sur ses positions. Ils ont toutefois évité de les taxer d’antisémitisme…
Une mobilisation aux contours complexes
La mobilisation n’est pas dirigée contre les crimes de guerre d’Israël, ni contre le nettoyage ethnique, ni même contre le génocide. L’objectif : sauver les otages ce qui implique nécessairement l’arrêt de la guerre.
Cela ne fait pas des familles d’otages des défenseurs du droit international ou des « pro-palestiniens ». Il ne faut se bercer d’aucune illusion. Elles défendent un intérêt personnel qui entre en convergence avec la revendication d’arrêt de la guerre. Ainsi, le Parti communiste israélien, le mouvement Standing Together et d’autres organisations progressistes ont activement participé aux manifestations. Le PCI a appelé les Juifs et les Palestiniens israéliens à s’unir pour faire de cette journée un succès. L’ensemble de la communauté arabe d’Israël a également été appelée à se mobiliser.
Une contestation plus large prend forme
Les familles d’otages ne sont pas seules à réclamer la fin de la guerre. Des réservistes expriment également leur épuisement dans une guerre sans fin. Israël a l’habitude de mener des guerres courtes. L’opération visant à « éradiquer » le Hamas devait initialement durer trois ou quatre mois. Or, plus de 22 mois après son déclenchement, le Hamas est encore là — affaibli certes, mais toujours actif. Combien de temps encore ? Six mois ? Un an ? Indéfiniment ?
De nombreuses voix, y compris au sein de l’establishment militaire, affirment que les objectifs fixés sont irréalisables et servent de prétexte à une guerre permanente.
Pour pallier l’usure des réservistes, une loi a été votée pour enrôler les Haredim (Juifs ultra-orthodoxes). Des dizaines de milliers de convocations ont été envoyées, mais la mesure se heurte à une résistance farouche : affrontements violents avec la police, brûlage public des convocations… Le Shas, parti orthodoxe sépharade, a menacé de provoquer un exode massif si l’on persistait à vouloir enrôler les ultra-orthodoxes par la force.
Une fuite en avant coûteuse
À la guerre contre les Palestiniens s’est ajoutée celle, entre autres, contre l’Iran. Le mythe de l’invulnérabilité du Dôme de Fer s’est effondré. Les pertes humaines et matérielles ont été lourdes, avec un coût estimé à 7 milliards de dollars — en pure perte.
Depuis le début de ses multiples offensives, la facture globale pour Israël dépasse les 80 milliards de dollars. Le PIB a chuté de 3,5 % au deuxième trimestre 2025. Parallèlement, l’isolement international d’Israël s’aggrave sur le plan diplomatique – notamment la reconnaissance de l’Etat palestinien annoncée par de nombreux pays occidentaux - et dans l’opinion publique internationale. Les initiatives de boycott se multiplient : refus de charger des armes par les dockers et les employés d’aéroports dans plusieurs pays, refus d’accueillir des croisières israéliennes, etc. faisant d’Israël un Etat paria.
Face à cette impasse militaire, politique et économique, le gouvernement Netanyahu s’enfonce dans une fuite en avant.