Se soumettre ou riposter
Une semaine après avoir annoncé le 2 avril des droits de douane allant jusqu’à 50% pour 70 pays Trump reculait face à l’effondrement des marchés financiers et d’une levée de boucliers internationale. Trump qui se vantait de ne pas reculer a dû faire machine arrière. Une pause de 90 jours était décrétée pendant laquelle les droits de douane étaient réduits à 10% ... sauf pour la Chine qui osait riposter. L’Union européenne a demandé à négocier tout en déclarant être prête à riposter si nécessaire.
Finalement les EU ont porté à 145 % les droits de douane sur les importations de Chine et en réponse elle imposait des droits de douane de 125% sur les importations américaines, restreignait l'exportation de terres rares lourdes, annulait des commandes d’avions à Boeing et les importations de GNL des EU etc.
Pendant cette pause les EU, seuls, essaient de construire un front anti-Chine. Les pays qui s’engagent à réduire leurs échanges avec la Chine seront récompensés par une baisse des taxes prévues. Le protectionnisme de Trump est avant tout un moyen de chantage. America First n’est pas un simple slogan.
Une manœuvre analogue avait été conduite contre la Russie par la variante Biden de l’impérialisme états-unien et l’ensemble du camp occidental. Les sanctions ne mirent pas la Russie à genoux l’immense majorité des pays refusant de les soutenir. Les pays ne veulent pas sacrifier leur développement.
Les pays qui se soumettraient au chantage des EU n’échapperaient pas aux taxes. Car le but de Trump est de réindustrialiser les EU - ce qui prendrait plus d’une décennie sous réserve des moyens mis en œuvre - et de supprimer leur déficit commercial. Les pays, particulièrement du Sud global, devraient alors auto-limiter leurs exportations vers les EU ou voir les tarifs douaniers augmenter. Les conséquences de la désindustrialisation délibérée des EU sont reportées sur le monde entier.
Le plan anti-Chine se cherche. La Chine a mis en garde : des mesures seront prises contre ceux qui s’engagent à soutenir les efforts des EU de l’isoler.
Des négociations ont lieu avec le Japon et la Corée du Sud. Le vice-président JD Vance a entamé un voyage de quatre jours en Inde qui souhaite conclure un accord commercial.
De son côté le président chinois Xi Jinping est allé au Cambodge et au Vietnam pour étudier les coopérations possibles, deux pays taxés lourdement.
Ce qui était sous-jacent dans la guerre commerciale lancée par Trump est maintenant ouvertement déclaré. Le coup est dur pour la Chine dont les exportations vers les EU s’élèvent à plus de 400 Mds de dollars, il faut trouver de nouveaux clients. Son marché intérieur est immense et reste à développer et elle est la première puissance exportatrice et la première puissance manufacturière.
Pour les EU ce serait encore plus dur car il faut trouver des productions de substitution qui n’existent pas aujourd’hui, plus coûteuses, ce qui alimentera l’inflation, la hausse des taux, la récession, l’amplification de la dette publique et de son coût et un sérieux risque de perte de confiance dans le dollar en tant que « valeur refuge », monnaie de réserve.
Il faut isoler la Chine pour restaurer l’hégémonie des EU quitte à nuire à la croissance mondiale et au développement. Ce ne sera pas si facile. L’heure est à la coopération multilatérale. Le monde a changé profondément même si certains veulent ignorer la réalité.
Le 22 avril 2025
Robert Kissous, économiste, militant associatif