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Billet de blog 1 janvier 2018

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De Paris à Millas (n°4)

Les familles des victimes de la collision de Millas pourront-elles donc avoir confiance dans le BEA-TT (Bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre)? Comme on le verra, il y a dans l'accident du passage à niveau de Millas comme des échos de propos déjà entendus au sujet de la SNCF pour l'accident de Brétigny!

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Tout d'abord, dans cette affaire de Millas,  il faut regretter que les journalistes présents sur les lieux se soient tellement consacrés à recueillir des témoignages divers mais si peu au recueil de ceux des  habitants de la zone du passage à niveau (puisque c'est sur ces barrières que se nouera toute la question puisque elles étaient fermées, quand le  car où se trouvaient les enfants les a enfoncées,  elles auraient dû être détruites et non simplement heurtées ou égratignées. Or, alors qu'on ne doit en aucun cas modifier quoi que ce soit sur une scène de crime (comme à la TV) ou sur le lieu d'un accident pareil, elles ont été, semble-t-il,  rapidement retirées par les enquêteurs.

Trois enquêtes sont donc menées parallèlement. Tout d'abord, la SNCF mènera son enquête interne ;  fort bien, c'est son affaire et on tend à deviner déjà le résultat.  Ensuite, une enquête "judiciaire" cherchera les causes de cette collision et en établira les responsabilités, ces conclusions transmises à la justice conduiront celle-ci à déterminer des peines pour la, le ou les "coupable.s". Enfin, le fameux « Bureau d'Enquête et Analyse des catastrophes de Transport Terrestre » (BEA-TT) produira un rapport sur les causes de cette collision d'un point de vue technique.

Ce Bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT) est, en France, le service chargé de réaliser les enquêtes techniques sur les accidents et incidents de transport terrestre qu'il soit routier, ferroviaire, fluvial ou guidé (remontées mécaniques, téléphérique, funiculaire.... Il a été mis en place en 2004, par un décret d'application d'une loi votée en 2002 à la suite de l'incendie du tunnel du Mont-Blanc.  Dans divers cas, le BEA-TT a été mis en cause dans son fonctionnement. Ainsi, le Canard Enchaîné avait révélé le contenu d'écoutes téléphoniques réalisées pour l'instruction judiciaire du déraillement de Brétigny dans l'Essonne (juillet 2013) : dans ces écoutes, il apparaissait que le BEA-TT avait remis son rapport directement à la SNCF et dans une sorte de concertation avec cette entreprise (laquelle se réjouissait sur les enregistrements d'un rapport très favorable). Il est apparu toutefois que la gare de Brétigny était "connue des services de la SNCF comme une zone à risque". Pourtant, "de très nombreuses lacunes" ont été relevées dans le suivi et la traçabilité des opération sur le site", écriront les experts. Des anomalies pour la plupart étaient "connues de la SNCF ou de ses agents", "sans pour autant qu'il y soit remédié de façon adéquate ». 

Les familles des victimes de la collision de Millas pourront-elles donc avoir confiance dans le BEA-TT ? Comme on le verra, il y a dans l'accident du passage à niveau de Millas comme des échos de propos déjà entendus au sujet de la SNCF pour l'accident de Brétigny ! Il en est de même dans le conflit entre les cheminots lanceurs d'alerte et la SNCF auquel il a été fait précédemment allusion, dans le précédent blog. Julien Delion, un des lanceurs d’alerte, avait signalé à ce propos après le grave incident sur la ligne reliant Bayonne à Hendaye : « Le train a disparu sept fois des écrans de contrôle en 11 kilomètres, traversant un passage à niveau, toutes barrières ouvertes, à 130 km/h ! ». On a même pu voir en vidéo (toujours visible) le franchissement d'un passage à niveau, toutes barrières ouvertes, par un train lancé à pleine vitesse !

Sur le réseau SNCF, on compterait en moyenne 40 "déshuntages" par an, l'immense majorité d'entre eux étend fort heureusement sans conséquence ou non repérés ! Comme on l'a vu, la légèreté du train a été mise en cause dans ce type d’incident. Pour y remédier, ces autorails circulent par deux, permettant de réduire les risques de déshuntage du train tout entier. Cette mesure de doublement de la composition d'une rame et donc de la surface de contacts roue-rail, augmente les frais s d'exploitation, mais en outre et surtout n'aurait pas semble-t-il apporté totalement les effets recherchés .

Selon France 2 ( 16/12/2017 ), La ligne entre Villefranche-de-Conflent et Perpignan (Pyrénées-Orientales) fait 47 kilomètres et compte plus de 40 passages à niveau, presque un tous les kilomètres, un record pour le département des Pyrénées-Orientales. À moins de deux kilomètres du lieu de l'accident, selon des riverains, des incidents ont été relevés ces derniers jours dans la commune de Saint-Féliu-D'Amont. 

"Les barrières étaient fermées et les voitures s'arrêtaient, et tout le monde soulevait les barrières et passait. Des trains se sont arrêtés au moins deux fois ou alors ils passaient à pas de fourmis et ils klaxonnaient, donc apparemment il y avait un problème sur ce tronçon", explique l'un d'entre eux. Une autre se souvient : "Je suis arrivée à la barrière, il n'y avait pas de signal, rien. Je suis passée et tout d'un coup, la lumière s'est allumée et le train est arrivé." 

Ce samedi 16 décembre, l'association des usagers de la ligne TER dénonce un manque de moyens : "Ce n'est pas le premier incident sur la ligne. À chaque fois, on constate que s'il y a des accidents, c'est que l'effort matériel pour l'entretien de la ligne n'est pas là", explique François Picq, un usager du TER. Enric Balaguer, de l'association Train en Têt affirme : "Les dysfonctionnements, c'est un passage à niveau très souvent en manque d'alimentation et des barrières qui sont fermées". La SNCF affirme ce samedi 16 décembre que tous les rapports de maintenance de la ligne seront transmis à la justice. 

(suite et fin demain)

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