Cheval et tapis volants. Judaïsme, arabité et islam (suite 4).
Ce quatrième blog est un prolongement, triplement inattendu, des trois précédents. Tout d'abord, il emprunte une partie de son titre d’un remarquable article de Laurent Guyénot (dont je dirai un mot dans la suite) paru le 20 janvier 2018 dans Kontre Kulture. Le titre initial et complet de ce texte est en effet «Du yahvisme à l'islamisme.Judaïsme, arabité et islam primitif ». Cette référence est doublement inattendue puisque ce texte est paru dans Kontre Culture, un magazine électronique qui a peut-être une autre forme, éditoriale que je ne connais pas et dont le responsable est Alain Soral dont les œuvres me sont peu familières(à mon grand tort peut-être) mais dont la réputation est sulfureuse et dont l'idéologie (également à tort peut-être) me semble à géométrie très variable. Vous aurez sans doute deviné le troisième élément inattendu qui m'a attiré vers ce texte et ce média ; il tient au rapport établi par cet auteur entre le judaïsme et l'Islam (ne lésinons pas ici sur les majuscules) dont j’ai déjà traité.
Le mieux est sans doute ici, pour tenter, probablement en vain, de faire court, car le texte de Laurent Guyénot est très long, d’en citer les premières lignes tout de suite, car elles éclairent à la fois le débat et le support de publication :
« Comme Alain Soral ne cesse de le répéter, par l'idéologie du choc des civilisations, l'élite judéo-sioniste exacerbe et instrumentalise l'opposition séculaire entre les civilisations islamique et chrétienne. Plus précisément, ce réseau qui travaille à l'accomplissement du projet biblique de domination des nations par Israël, se sert de l'islamisme pour monter la chrétienté contre les pays arabes ennemis d'Israël, et se sert de l'Empire chrétien pour les détruire militairement. ».
Le nom d'Alain Soral apparaît dès la première ligne du texte, mais le personnage est assez connu pour me permettre d'être très bref à son propos, si singulier qu'il soit. « Alain Bonnet, dit Alain Soral, est un essayiste, idéologue et chef d’entreprise franco-suisse, né le 2 octobre 1958 à Aix-les-Bains. Alain Soral affirme avoir été membre du Parti communiste français dans les années 1990. » ( Wikipédia). Il est toutefois défini par Le Monde 24/1/ 2018) comme « la PME rentable de l'extrême droite malgré les procès ». Il y a déjà là de quoi donner à réfléchir !
Laurent Guyénot, lui, est un personnage bien différent, même s'il se retrouve avec Alain Soral sur certains points. Ingénieur (Ecole Nationale Supérieure de Techniques Avancées, 1982) et médiéviste confirmé (thèse en études médiévales anglaises sous la direction de Leo Martin Carruthers : « La mort merveilleuse : la féerisation des morts dans le roman médiéval français et anglais : essai d'anthropologie littéraire », Paris IV, 2008), il est également très versé dans les études sur le judaïsme et l'islam pour avoir longuement étudié l’histoire biblique à New York, puis avoir mené des recherches approfondies en histoire des religions à Paris. On peut toutefois, après un tel parcours scientifique s'étonner un peu de l'attrait qu'il semble éprouver pour le « récentisme » . Ce mouvement, également appelé "nouvelle chronologie", remet en effet en question la chronologie universellement admise des faits historiques !
L'hypothèse que semblent, pour le moment du moins, partager Alain Soral et Laurent Guyénot, se trouve ainsi résumée dans le début de l'article de ce dernier, texte que je suivrai désormais pas à pas mais en ne le citant que de loin en loin, vu sa longueur mais aussi son engagement résolu dans les perspectives « complotistes ».
« Israël se sert aussi de l'islam pour détruire de l'intérieur ses ennemis parmi le monde arabe. Depuis le début du 20e siècle, les États laïcs arabes, tout comme les projets panarabiques qu'ils ont inspirés (ceux de Nasser et Kadhafi), ont été les ennemis d'Israël, tandis que l'islamisme (l'islam exclusif, politique et conquérant) a toujours été son allié objectif, pour ne pas dire son instrument, dans la destruction de ces États laïcs - Liban, Syrie, Irak, Libye. L'islamisation de la résistance palestinienne par le Hamas, pour prendre un autre exemple, fut particulièrement avantageuse pour Israël, dans la mesure où elle a permis d'inverser l'image de cette résistance dans l'opinion publique mondiale. D'une manière générale, les Frères musulmans, dont le Hamas est issu, ont toujours été utiles pour affaiblir les ennemis d'Israël ; quand ils ne commettaient pas eux-mêmes des attentats contre Nasser en Égypte, le Mossad en organisait en son nom (Opération Susannah en 1954).
Les islamistes sont doublement les idiots utiles du sionisme : non seulement ils détruisent de l'intérieur les États laïcs hostiles à Israël, mais en plus, ils répandent dans le monde entier une image détestable des populations musulmanes. Après chaque attentat revendiqué par DAECH ou toute autre groupe d'inspiration wahhabite, l'islamophobie progresse et la sionosphère renforce son contrôle sur les institutions et les consciences d'Occident ».
Or nul n'ignore que l'islam wahhabite, qui est la matrice de l'islamisme moderne, se revendique de l'islam conquérant des origines, et qu'il le fait d'autant plus facilement qu'il partage avec l'islam primitif son enracinement dans l'arabité historique.[...]. Pour comprendre et combattre l'islamisme, il faut donc clarifier sa relation avec l'islam des origines. La nier purement et simplement ne fait rien avancer. Et pour comprendre comment Israël instrumentalise l'islamisme, il faut remonter aux relations complexes entre l'islam primitif et la communauté juive du 7e siècle de l'ère chrétienne. [...] ». Fin de citation du texte de Laurent Guyénot.
(La suite demain).