Robert Chaudenson (avatar)

Robert Chaudenson

Abonné·e de Mediapart

1484 Billets

0 Édition

Billet de blog 7 octobre 2018

Robert Chaudenson (avatar)

Robert Chaudenson

Abonné·e de Mediapart

Lelièvre : Hic jacet lepus

Robert Chaudenson (avatar)

Robert Chaudenson

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Lelièvre : Hic jacet lepus

Dès lors, plutôt que d'aborder le fond des problèmes dont j'ai déjà traité cent fois, mieux vaut "tourner autour du pot" (si j'ose dire) en ne retenant que des détails amusants ou curieux.

À lire Claude Lelièvre, on a vite compris qu'il est et se veut, d'abord et surtout, un spécialiste de l'histoire de l'éducation ce qui n'est guère ma tasse de thé. Il démarre avec Napoléon Ier ce qui nous rapproche de notre sujet central puisqu'il fut l'inventeur des académies et donc des recteurs, son souci étant de séparer l'administration de l'école de l'administration générale ;  un mouvement inverse s'est manifesté dans la suite quand les grands recteurs d'autrefois, qui restaient souvent dix ou quinze ans dans le même poste ont été remplacés par des recteurs dont les séjours dans leur académie ne dépassaient guère deux ou trois ans ! 

Ma remarque liminaire sur les commentaires me dispense de discuter certains critiques du blog en cause qui ont été faites par B. Girard « Le décret en question a été rejeté par le CSE (Conseil supérieur de l'éducation, uniquement consultatif) à l'unanimité (49 voix contre, 1 abstention). Nouvelle illustration de l'école de la confiance chantée par Blanquer » ou par Lancêtre en réponse au précédent : « Faut-il regretter Alice Saunier-Séité ? [Voir plus haut pour le rôle de  cette dernière ]. Les recteurs, nommés en Conseil des Ministres, ont toujours été, comme les préfets, chargés de mettre en oeuvre, sans états d'âme, la politique décidée par le gouvernement. Qu'ils soient ou non titulaires d'une HDR, je ne vois pas bien ce que cela changera. » . 

Plus drôle dans ce blog est l'évocation de la proximité voire de la collaboration de Claude Lelièvre avec Bruno Julliard ramené sur le devant de la scène par sa très récente démission.

Ce dernier comme bien d'autres avait, dès le début de ses études universitaires, choisi l'activité syndicale pour préparer sa carrière politique ultérieure. Comme on le lit dans sa biographie (sans doute, comme souvent, rédigée par lui-même) : « Après avoir obtenu son baccalauréat en 1999, il devient étudiant en droit public à l'université Lumière Lyon-II. En 2007, au terme de huit années universitaires, il obtient une licence ». 

Bruno Julliard-Landau (il a très vite renoncé au "Landau" trop propre à lui attirer les quolibets !) se montre ici trop modeste ; avant d'être écarté de la représentation syndicale par son âge (28 ans est la limite d'âge pour être officiellement "étudiant"), je crois qu'il avait obtenu, non pas une simple et modeste licence (en principe trois ans) mais aussi un bout de  maîtrise ! Cette limite d'âge pour les activités syndicales estudiantines, est bien entendu ce que, en novembre 2007, il nomme « raisons personnelles » et invoque pour ne pas solliciter son renouvellement (bien entendu impossible de ce fait) à la présidence de l'UNEF. Est-il une raison plus "personnelle" que la date de naissance ? 

Quoiqu'il ait rendu en 2005, sa carte du Parti socialiste, qu'il jugeait incompatible avec sa fonction de Président de l'UNEF (Tu parles !) , il fera, dans cette mouvance socialiste, une carrière aussi fulgurante qu'étonnante. En 2007, il officialise sa présence sur la liste socialiste pour les municipales de 2008. Il est élu au Conseil de Paris dès mars 2008, puis nommé adjoint chargé de la jeunesse, auprès du  maire de Paris, Bertrand Delanoë. Qui dit mieux ?

Dans la mesure où Bruno Julliard ne fait nul mystère de son homosexualité puisque le 24 août 2011, dans Têtu, il fera son coming out avant de se marier avec Paul-Valère Le Goff le 8 juillet 2017,  on peut donc supposer que la rapidité extraordinaire de sa carrière au sein du parti socialiste n'est pas sans relation avec la protection amicale du maire de Paris, Bertrand Delanoë. La "gay connection" !

Lors du congrès de Reims de 2008, il est nommé Secrétaire à l'éducation du Parti socialiste. Durant la campagne présidentielle de 2012, il choisit à nouveau le bon camp et le voilà responsable de l'enseignement scolaire dans l'équipe de campagne de François Hollande. Dès lors, de mai 2012 à janvier 2013, il est membre du cabinet de Vincent Peillon, ministre de l'Éducation nationale dont il soutiendra la candidature lors de la "primaire citoyenne" de 2017. 

Il a su toutefois négocier avec adresse le changement à la mairie de Paris et la perte de son protecteur naturel, "l'Anne" de B. Delanoé n'ayant pas les mêmes raisons de s'intéresser à lui ! Le 4 juin 2013, Bruno Julliard est nommé, avec Myriam El Khomri, porte-parole de la campagne d'Anne Hidalgo. Le 5 mars 2014, il prononce même , au nom du Conseil de Paris, le discours d'inauguration de la plaque commémorative de Maurice Boitel et de l'attribution du nom de « Maurice Boitel (1919-2007) peintre » à l'allée piétonne qui ceinture le lac Daumesnil. Il est élu, le 5 avril 2014, adjoint à la mairie. Le 11 avril, il est nommé Premier Adjoint, adjoint à la culture. Ça roule toujours ! 

2017 et 2018 semblent  toutefois s'annoncer comme des années plus difficiles pour Bruno Julliard ! Le 17 septembre 2018, il démissionne de son poste de premier adjoint à la maire de Paris critiquant « l’inconstance » d’Anne Hidalgo, ainsi qu’une « gestion inefficace et solitaire ». Que se passe-t-il ?

Il s'est marié, on l'a vu, avec Paul-Valère Le Goff. Or, selon  Valeurs actuelles ( 20/11/17), ce dernier aurait été embauché par la "société d'événementiel" , Noctis, qui règne sur la vie nocturne parisienne, peu de temps après que son patron fondateur a obtenu un appel d'offres avec la Mairie de Paris.

L'opposition municipale dénonce un conflit d'intérêt, compte tenu du fait que c'est Bruno Julliard qui attribue les concessions des lieux de fêtes disponibles dans l’espace public parisien. Paul-Valère Le Goff nie toutefois tout conflit d'intérêt et affirme que son cas a été soumis à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. 

« Le nouveau scandale qui ébranle la mairie de Paris », titre cependant Challenges qui souligne que Bruno Julliard est chargé de proposer à la location les lieux d’exception, situés au cœur de la capitale comme d'attribuer les concessions des lieux de fêtes disponibles dans l’espace public parisien.” Challenges, ne manque pas aussi de rappeler que Bruno Julliard lui-même était “à l’initiative, il y a un an et demi, du rejet brutal de Marcel Campion et de ses forains." 

Est-ce en rapport avec le fait que Bruno Julliard après avoir décliné la proposition de la maire d'être son futur directeur de campagne en vue des prochaines municipales, a soudain, le 17 septembre 2018, démissionné de son poste de Premier adjoint à la maire de Paris, critiquant « l’inconstance » d’Anne Hidalgo, ainsi qu’une « gestion inefficace et solitaire ».

Evoquant ce  choix «douloureux», l’élu explique avoir pris cette décision après un été de "réflexion". Prenant acte de son départ, Anne Hidalgo a aussitôt nommé pour lui succéder son adjoint au budget, Emmanuel Grégoire. Si les tensions entre la Maire et son Premier Adjoint étaient connues, jamais ce dernier n’avait frontalement et publiquement attaqué la mairesse jusqu’alors. «J’ai toujours fait en sorte d’émettre mes réserves en tête à tête [...] J’arrive au bout de l’exercice», prévient-il dès le début de cet entretien qui, "malgré tout le soin qu’il prend pour ne pas jeter l’opprobre sur la totalité de la politique menée depuis quatre ans," est un "véritable coup de poignard politique."

"Hic jacet lepus" (Ici est tapi le lièvre, disaient les Latins !) ; le lièvre ("lepus") sera-t-il remplacé désormais par le loup ("lupus") ?

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.