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Billet de blog 15 avril 2018

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Ils sont "trop" ces "cheminots" de la CGT

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Ils sont « trop » ces "cheminots" de la CGT

On m'a assez reproché d'avoir qualifié Monsieur Philippe Martinez, SG de la CGT, d'«espingouin » pour que je me risque à user de cette expression « Ils sont "trop" à la CGT », sans pourvoir le terme "trop" de prudents guillemets qui montrent que j'use de cette formule dans le sens que lui donnaient, naguère encore, les "djeunes" (sans que je sache pourtant si cet emploi est encore en usage) au sens de « Ils sont super l ». 

Je prends cette précaution car, sauf erreur de ma part, la CGT doit affronter, en cette année 2018, une élection dans laquelle, le nombre des voix recueillies sera essentiel, comme dans toute élection ; il  vaut donc mieux être "trop" que "pas assez" en ce genre de circonstances !  La CGT risque fort, une nouvelle fois, d'être battue par la CFDT, ce qui donnerait évidemment à la formule « ils sont trop » une valeur ironique dont je me garderai bien ! 

Pour en revenir au qualificatif dont j'avais machinalement affublé Monsieur Philippe Martinez, le distingué Secrétaire Général de la CGT dont vous connaissez, à n'en pas douter, la somptueuse moustache, il n'était nullement dans ma bouche péjoratif, pas plus que "rital" dont Cavanna n'hésitait pas lui-même à user pour se désigner ainsi que ses compatriotes d'origine italienne. J'ai fréquenté autrefois l'école primaire à Villeurbanne et la moitié de ma classe était composée de fils d'immigrés (les classes primaires n'étaient pas mixtes à cette époque) avec lesquels je n'ai jamais eu le moindre problème relationnel, qu'ils fussent "ritals" ou" polaks". Ce qui a attiré mon attention sur Monsieur Philippe Martinez était plutôt l'alliance quelque peu oxymorique entre un patronyme populaire, d'origine clairement espagnole (même s'il est porté par des Français) et un prénom, socialement « distingué », comme Philippe employé là où l'on attendrait plutôt Marcel (l'initiale commune du nom et du prénom étant en outre censée porter chance!). 

Mais venons-en à la CGT dont, dans un précédent blog (« Tariq et la CGT » je crois), j'avais rappelé le principe fondateur de toute négociation, toujours valable, même dans les plus actuelles, : « Ce qui est à moi est à moi ! [les statuts intangibles des employés de la SNCF comme de la SNCF elle-même par exemple]. Pour ce qui est à toi, on va discuter ! ». Tout indique que Monsieur Philippe Martinez s'inscrit sur ce point dans la ligne de ses grands prédécesseurs, Krasucki compris, du moins cet égard. 

Je n'ai guère eu l'occasion de discuter avec des syndicalistes, hors du milieu universitaire mais je pense que le modèle cégétiste est à peu près universel chez nous, au moins dans la fonction publique française (ou assimilée), même si quelques signes d'évolution se font jour peu à peu. Si je me réfère au milieu scolaire et universitaire, qui est celui que je connais le mieux, par la force des choses, les contenus des activités en cause (pour user d'une terminologie aussi vague que possible) ne semblent avoir en général aucun intérêt pour les syndicalistes qui ne veulent « causer » que "postes" et "moyens" ! Si l'on prend le sujet actuel le plus brûlant, dont on nous rebat les oreilles à longueur de journées, la "réforme du statut du personnel de la SNCF", le premier mot de Monsieur Martinez a été qu'il n'est pas question d'y toucher, ce qui rend évidemment des plus difficiles toute tentative de négociation et donc de réforme. Si Philippe Martinez rencontre un jour "les yeux dans les yeux" notre Président il devrait évoquer avec lui son "pépé" dont il nous a confié lui-même qu'il était "cheminot" (et cégétiste peut-être...qui sait ?). 

De même que la plupart des syndicalistes de l'éducation nationale ne se préoccupent en aucune façon de ce qui se passe  dans les classes (pour un certain nombre d'entre eux, on se demande d'ailleurs s'ils y ont jamais enseigné), de même Philippe (Un peu de ce "soft skill" tellement à la mode aujourd'hui : "Cher Philippe, vous permettez que je vous appelle Philippe!"....), votre stratégie syndicale qui consiste, tout en acceptant le cadeau du gouvernement (au titre des avantages acquis), qui consiste à maintenir pour tout le personnel de la SNCF en place, le statut actuel et donc les conditions dans lesquelles ils ont été recrutés, à demander que les tous nouveaux recrutements se fassent avec ces anciennes conditions statutaires, revient naturellement à empêcher toute espèce de changement

Non seulement vous bloquez toute réforme du système, mais en outre, et il y a un point essentiel que vous semblez ignorer. Des dizaines de milliers de recrutements ont été faits en effet, dans ces dernières années, par la SNCF sous des formes contractuelles qui ignorent totalement les statuts du personnel actuel de la SNCF ! Vous semblez ne pas vous en être aperçus car, comme souvent, les syndicats sont arc-boutés sur la défense des privilèges acquis par leurs cotisants (de moins en moins nombreux) en s'abstenant de toute vision globale et stratégique de l'avenir de la société qui les emploie.

Les discussions que la CGT entame avec la ministre et sans doute bientôt avec le Premier Ministre voire avec le Président de la République, me font irrésistiblement penser à une vieille caricature de l'époque pré-révolutionnaire que comportait notre bon vieux Mallet-Isaac d'autrefois ;  on y voyait le ministre des finances de l'époque, Calonne me semble-t-il, déguisé en cuisinier. Il avait réuni les États généraux (les différents États étant représentés par diverses volailles, toutes comestibles) pour leur demander « à quelle sauce ils voulaient être mangés ? ». "Mais nous ne voulons pas être mangés !"  répondaient naturellement, en chœur et d'une seule voix, toutes les volailles qui représentaient l' ensemble de la société française de l'époque.

Et Calonne de leur répondre non sans bon sens : « Mais vous sortez de la question ! ».

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