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Billet de blog 23 mai 2018

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L'UNEF en hijab

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L'UNEF en hijab... 

Même si, dans le passé, nombre des responsables de nos syndicats étudiants, sitôt atteint la 28e année fatale à leur maintien en fonction étudiante, qui était la voie royale qu'ils avaient choisie pour entrer en politique ; faut-il vous citer ici après les grands anciens commeJulien Dray, Benoit Hamon, Isabelle Thomas ou Delphine Batho, des cas plus récents comme Julie Coudry ou Jacques Juilliard ? Mais voilà soudain qu'une obscure Maryam Pougetoux surgit d'emblée dans tous nos médias pour une raison aussi nouvelle qu'inattendue : elle est en effet, apparue soudain en "hijab" sur nos écrans de télévision ; attention, non pas avec un simple voile maghrébin, couvrant vaguement sa chevelure mais dans une  vraie tenue « islamiste »! Comme vous l'imaginez tous nos journalistes l'ont aussitôt sollicitée pour des interviews ; consciente de ce foudroyant succès médiatique, pour certains entretiens, elle a même déjà enlevé ses lunettes afin de se donner une allure moins austère sans doute ! 

Le principal n'est toutefois pas là, car, dans nos universités, on voyait des étudiantes, généralement caucasiennes d'ailleurs et ignorant tout de l'arabe standard comme de la langue du Coran, voilées le plus souvent de noir, dans des tenues plus austères assurément que celle de Mademoiselle Maryam Pougetoux dont le patronyme fleure bon la ruralité nationale. Ces dernières toutefois n'étaient en rien des représentantes syndicales... er en outre de l'UNEF

Qu'elle soit présidente de l'UNEF (nous reviendrons sur ce détail) est toutefois presque moins étonnant que son université de rattachement qui est Paris-IV où l'on préfère l'appellation "Paris-Sorbonne" à cette dénomination si platement administrative. Vous vous souvenez sans doute qu'Edgar Faure, en 1968, a supprimé l'antique et unique SORBONNE de Paris, comme d'ailleurs le titre et l'indice particuliers de « professeur à la Sorbonne », en faisant, par le partage de cet établissement, treize universités nouvelles. Il aurait dû assurément éviter le nombre 13 qui porte toujours malheur dans nos croyances populaires nationales (la 14e université parisienne depuis longtemps rêvée à l'INALCO, n'a d'ailleurs jamais vu le jour) ;  les treize conseils d'universités se sont naturellement immédiatement empressés de changer ces dénominations prosaïquement numérales, Paris 3 se baptisant  "Sorbonne Nouvelle", Paris V devenant "René Descartes" et Paris-VII "Denis Diderot", etc. 

Pour en revenir au hijab inattendu de notre présidente de l'UNEF, le vrai pittoresque de la chose et qu'elle est de Paris IV ( Paris-Sorbonne) ; cette université a toujours été unanimement regardée comme l'une des plus réactionnaire de toutes ; Paris IV est toutefois devenue, le 1er janvier 2018, l'université "Sorbonne université" au sein d'une étrange alliance dénommée « Projet Sorbonne Universités » où sont entrés aussi l'université Pierre-et-Marie-Curie (Paris VI) , le Museum National d'Histoire Naturelle, l'université de technologie de Compiègne et l'INSEAD. L'essentiel, vous l'avez compris, étant de conserver dans toutes ces mutations le nom auguste de « Sorbonne » qui est non seulement illustre, mais aisément vendable jusque dans les sables de l'Arabie Heureuse.

Comme je n'aurai plus le temps de traiter ici le sujet que je voulais aborder, je me laisserai aller à la facilité de reprendre une petite partie du blog que j'avais consacré à la « Sorbonne des sables », ici même, le 3 août 2014 : 

«« Nous n’avons pas de pétrole mais nous avons des idées ». On connaît la formule ; tout nous disposait donc à nous entendre avec les émirs qui, eux, ont du pétrole mais pas d’idées ! 

En 1925, Victor Lustig tenta de vendre la Tour Eiffel, sans y parvenir d’ailleurs puisqu’il me semble bien l’avoir aperçue lors de mon dernier séjour à Paris. On a fait mieux depuis, puisque, au terme d’un accord signé en 2006, Jean-Robert Pitte, qui présidait alors l’Université Paris IV, a vendu la Sorbonne à Abou Dabi ! Ah! Il est fort le bougre ! Bien plus que Victor Lustig ! Comme le dit un de bons mes amis, qui est dans les affaires, en forme de suprême éloge d'un de ses vendeurs : « Il vendrait dans un cimetière! ». Pour moi, je préfère, dans ce même registre laudatif, la formule de ma grand-mère : « Il vendrait des guêtres à un serpent ! ».

Il faut ici quelques explications supplémentaires, car, à l’instar de la Tour Eiffel, mais rue des Ecoles, la bonne vieille Sorbonne est toujours en place, ce qui pourrait donner à penser que, tout comme Victor Lustig avec la Tour Eiffel, Jean-Robert Pitte a échoué dans son entreprise. 

Que nenni puisque, non seulement la Sorbonne est bel et bien à Abou Dabi, mais les chaires parisiennes sont même désertées par nombre de leurs professeurs qui, au terme d’un confortable voyage en business class et d’un séjour de deux semaines en hôtel de luxe (tous frais payés) gagnent, en un petit demi mois d’enseignement, 7500 euros, donc bien plus qu’ils ne perçoivent à Paris pour un mois total d’activité, cette rémunération s’ajoutant naturellement, à l’insu du fisc et sans la réduire, à celle qu’ils perçoivent en France et sans qu'ils aient besoin de rattraper les cours qu'ils n'ont pas donnés à Paris!

(La suite demain)

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