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Billet de blog 1 février 2010

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Frêche connote dur

La tradition linguistique aussi bien que la logique ont retenu deux concepts très utiles pour distinguer ce qui dans un propos est manifestement dit de ce qui est simplement suggéré. La dénotation recouvre en quelque sorte le sens commun, littéralement ce qui est communément admis au sujet de ce dont on parle, généralement consigné dans les dictionnaires. La connotation regroupe tous les autres éléments qui sont simultanément présents à l'esprit comme une sorte de surcharge sur ce qui est dénoté. Ce sont des "sens en plus" qui peuvent surgir hors du contrôle des locuteurs ou bien au contraire être recherchés par lui pour dire ce qu'il ne peut pas dire mais qu'il veut néanmoins communiquer. Ils n'appartiennent pas par essence au sens commun car ils sont fortement dépendants de la forme de l'expression et du contexte de l'énonciation. Ils seront donc l'objet au moins d'un débat serein (par exemple dans un brain-storming de publicitaires) au plus d'une violente polémique (par exemple dans le champ politique où ils servent en général à déqualifier l'adversaire. Deux dénotations dans l'actualitéAinsi "la tronche pas catholique de M. Fabius"* dénote la tête de la personne qui a impressionné la couche sensible du dispositif technique à l'origine de la photo ci-dessous, ni plus ni moins :Pareillement, "l'équipe réserve du PSG" **dénote l'équipe qui a posé pour faire la photo ci-dessous :

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La tradition linguistique aussi bien que la logique ont retenu deux concepts très utiles pour distinguer ce qui dans un propos est manifestement dit de ce qui est simplement suggéré. La dénotation recouvre en quelque sorte le sens commun, littéralement ce qui est communément admis au sujet de ce dont on parle, généralement consigné dans les dictionnaires. La connotation regroupe tous les autres éléments qui sont simultanément présents à l'esprit comme une sorte de surcharge sur ce qui est dénoté. Ce sont des "sens en plus" qui peuvent surgir hors du contrôle des locuteurs ou bien au contraire être recherchés par lui pour dire ce qu'il ne peut pas dire mais qu'il veut néanmoins communiquer. Ils n'appartiennent pas par essence au sens commun car ils sont fortement dépendants de la forme de l'expression et du contexte de l'énonciation. Ils seront donc l'objet au moins d'un débat serein (par exemple dans un brain-storming de publicitaires) au plus d'une violente polémique (par exemple dans le champ politique où ils servent en général à déqualifier l'adversaire. Deux dénotations dans l'actualité

Ainsi "la tronche pas catholique de M. Fabius"* dénote la tête de la personne qui a impressionné la couche sensible du dispositif technique à l'origine de la photo ci-dessous, ni plus ni moins :

Pareillement, "l'équipe réserve du PSG" **dénote l'équipe qui a posé pour faire la photo ci-dessous :

Deux connotations dans l'actualitéLa connotation mobilise des connotateurs, à savoir des éléments présents dans la dénotation : les termes "tronche" et "pas catholique" pour l'un, "réserve" et "PSG" pour l'autre. Ces termes signifient des choix opérés par les locuteurs : - "tronche" n'est pas "tête", c'est un terme populaire qui peut paraître au minimum irrévérencieux à l'égard d'un ancien premier ministre (de la France …). - La réserve n'est pas l'équipe type, elle a priori constituée des ses moins bons ou plus mauvais joueurs, avec un avenir incertain de remplaçants éventuels. Des seconds choix… - " Pas catholique" est certes une expression un peu tombée en désuétude avec l'influence de l'Eglise mais introduit la "tronche" dans le champ de la religion et invite à la situer dans ce champ. - "le PSG" est une équipe qui défraie régulièrement la chronique à cause des excès de ses supporters qui se sont souvent illustrés en conspuant des joueurs noirs y compris les leurs …Ce terme invite donc à considérer la couleur de peau de la personne à laquelle il s'applique, un candidat PS d'origine malienne et à l'enrôler symboliquement dans cette équipe. On admet généralement que les connotateurs qui relèvent du choix du locuteur sont porteurs de son point de vue, a fortiori en matière politique où le jeu consiste souvent à déqualifier un concurrent ou un adversaire dans l'esprit d'une catégorie-cible d'électeurs. Dans chacun de ces exemples il est aisé de voir lesquels …car c'est devenu manifeste dans mon propos …Esquisse d'un modèleEn examinant ces deux seuls exemples on peut déjà extraire une sorte de mode d'emploi de la connotation en vue de déqualifier pour des cibles sélectionnées dont on anticpe l'interprétation, en général à bon escient :1- "péjoration" introductive pour orienter l'esprit vers la déqualification du sujet
(tronche, équipe réserve)2- plongement de l'interprète dans un champ où va pouvoir s'opérer la déqualification recherchée pour une niche courtisée par le discours (ce qui n'est pas catholique, le PSG et ses nombreux joueurs noirs)Je reconnais avoir moi-même utilisé ce procédé dans mon titre en retenant "connote" qui dans le contexte peut suggérer à ma cible le terme "déconne" grâce à un sème commun que je n'ai pas besoin d'énoncer…On retiendra aussi les deux sortes de polémiques possibles :1- le déni de connotation (c'est Frêche avec son dictionnaire sous le bras)2- sur la connotation elle-même (dénier ou soutenir l'antisémitisme du propos). Ce sont les précédents (comme les dérapages antérieurs de Frêche) qui font pencher dans un sens ou dans l'autre.*propos tenus par Georges Frêche à l'égard de Laurent Fabius**appartenance attribuée à un candidat PS d'origine malienne par Francis Delattre ancien député UMP, maire de Franconville

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