Tel est l’objectif de Manuel Valls. C’est le nouveau coup de pied de l’âne. Gageons que ce ne soit pas le dernier.
Au mois de mai 2008, ce personnage s’était déjà illustré en jetant Jean Jaurès aux oubliettes et en faisant de Georges Clémenceau sa référence. A ce moment-là, j’avais déjà commis un billet d’humeur que j’avais titré : « Manuel Valls : Du reniement à l’infamie ». Il est plus que jamais d’actualité.
J’y rappelais que Clémenceau n’a jamais été socialiste et qu’au début du 20ème siècle, alors qu’il était président du Conseil, il s’était proclamé le « premier des flics », n’hésitant pas, pour faire « honneur » à son titre, à réprimer sauvagement les grévistes. De ce jour, Jaurès s’était brouillé avec lui.
Aujourd’hui, le nouveau cheval de bataille de Manuel Valls ce sont les 35 heures. Pour la plus grande satisfaction de l’UMP, mais curieusement pas de nombreux employeurs.
Dans cette contradiction réside toutes les faiblesses des deux lois Aubry (13 juin 1998 et 19 octobre 1999) instituant comme durée légale les 35 heures de travail par semaine.
A cette époque, au sein de mon syndicat préféré, la CGT, j’avais exprimé de nombreuses réserves sur ces lois.
J’étais et je suis toujours pour le principe de la réduction du temps de travail à 35 heures ou même à moins. Il s’agit d’une conquête sociale allant dans le sens du progrès. J’étais et je suis toujours contre tous les aménagements qui ont été apportés à l’occasion de l’application de ces lois.
La mise en œuvre des 35 heures a été très souvent accompagnée d’une flexibilisation du travail dans les entreprises (annualisation, modulation), supprimant de fait le paiement des heures supplémentaires. Elle a aussi signifié la modération salariale, voire le blocage de toute augmentation de salaire pendant plusieurs années. Elle a enfin été assortie du versement, depuis et toujours, de subventions de l’Etat en faveur de toutes les entreprises, pour en compenser le coût. Le coût de ces subventions permet aux hypocrites contempteurs des 35 heures de justifier leur volonté de revenir aux 39 heures payées sans majoration de salaire pour les 4 heures supplémentaires, voire de ne les rémunérer qu’au même niveau que pour 35 heures, ou même de supprimer toute notion de durée légale du travail.
L’autre justification à la suppression des 35 heures, c’est que la France aurait la durée moyenne de travail la plus faible du monde, et qu’ainsi elle ne serait désavantagée dans la compétition internationale. Qu’en est-il en réalité ? Selon la revue révolutionnaire « Challenges », publiant en 2010 une statistique européenne, la durée réelle annuelle moyenne du travail en France est supérieure à celle de l’Allemagne, de l’Italie, des Pays-Bas, de l’Espagne, de la Suède et du Royaume-Uni.
En ces temps de déficit budgétaire public astronomique, je suis pour le maintien des 35 heures comme durée légale du travail, mais pour la suppression de toute subvention aux entreprises pour ce motif.
En réalité, les contempteurs des 35 heures ne veulent pas revenir sur les contreparties que malheureusement trop de salariés, influencés par des syndicats collaborationnistes, ont acceptées.
Ici, je tiens à rappeler que les syndicats, qui ont signé les accords d’aménagement des 35 heures, ne représentaient quasi systématiquement que la minorité des salariés de leur branche professionnelle ou de leur entreprise. Ces accords ont donc été imposés à la majorité des salariés. Ainsi va la démocratie en France.
Donc Valls et ses amis de l’UMP veulent préserver la flexibilité, la modération voire le blocage des salaires et les gains de productivité. Quant aux subventions versées aux entreprises pour compenser le coût des 35 heures, aucun de ceux-là comme des membres du gouvernement ne disent si, en supprimant les 35 heures, ils sont pour l’arrêt de toute subvention aux entreprises pour ce motif.
Ainsi, si le mauvais coup de Manuel Valls et de ses amis de l’UMP réussit, les salariés paieront deux fois les effets des 35 heures. Une fois par la flexibilité, les gains de productivité, la modération voire le blocage des salaires pendant plusieurs années. Une deuxième fois par l’augmentation de la durée du travail de 35 à 39 heures sans paiement des majorations des heures supplémentaires différentielles, voire sans augmentation de salaire.
Et dire que Manuel Valls est toujours membre du parti socialiste.
Robert Mascarell
Le 8 janvier 2011