Les plus fulgurants d'entre nous

C'est comme une vague de fond qui fauche. Une vague qui lamine et qui écrête, qui décrète et qui décide. Qui dit ce qui doit être ce qui est à la mode : glamour.
Je hais ce mot, glamour, d'une haine féroce, viscérale.
Je hais aussi cette usure des mots, cette correction faite d'euphémismes qui assassine dans l'œuf nos mozarts, nos verlaines, nos léonards.
Lobotomisés nos vincents et nos kafkas.
En prison nos dalis.
Enfermés nos rimbauds.
Les clochards célestes finiront la nuit au poste de police pour trouble à l'ordre public.
Je vois déjà leurs grands yeux éperdus derrière les barreaux.
Ils castreront les plus beaux, les plus jeunes, les plus fulgurants d'entre nous.
Et pendant ce temps là les bourgeois feront du lard en silence, assis devant leur canalplus et leur match de foot.
Moi, ne le répétez pas : j'aurai fui dans la forêt.