Le jugement peut être visualisé sur libération.
Pour être précis, en ce qui concerne la citation directe, et la culpabilité d’ Anne-Sophie Leclère, il n’y a rien de plus à dire. Il s’agit bien d’injure raciale au sens juridique (en tant que scientifique, je ne pense pas qu’il existe plusieurs races d’hommes ou de femmes, mais c’est un autre problème).
Il ne s’agit pas d’une analyse morale, sociétale, politique.
La provocation à la haine raciale ne fait aucun doute, puisqu’une petite fille lors d’une manifestation a repris les mêmes mots à l’encontre de Madame TAUBIRA.
Ce sont bien les articles 23 et 24 de la loi de 1881 sur la presse qui sont appliqués par le juge.
Ceux qui, par l'un des moyens énoncés à l'article 23, auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, seront punis d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende ou de l'une de ces deux peines seulement.
Autant l’article 23 est indiscutable juridiquement, autant l’article 24 peut être discuté.
L’article 23 est puni de 6 mois et 22500 euros d’amende.
L’article 24 est puni d’un an et de 45000 euros d’amende.
C’est donc bien cet article 24 qui a été utilisé par le juge (9 mois de prison).
Le juge fait appel aux articles 29 et 33-3. Ce n’est donc pas la ministre qui est mise en cause, mais la personne Madame Taubira.
Sera punie de six mois d'emprisonnement et de 22 500 euros d'amende l'injure commise, dans les conditions prévues à l'alinéa précédent, envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.
Le fait que ce soit une injure est une chose sûre.
Le fait que ce soit une provocation à la haine raciale est moins évident et certainement discutable par un avocat.
Par contre en ce qui concerne le FN (j’en suis désolé), d’après l’article 42 de la loi de 1881 et du code pénal, il ne peut être condamné.
Seront passibles, comme auteurs principaux des peines qui constituent la répression des crimes et délits commis par la voie de la presse, dans l'ordre ci-après, savoir :
1° Les directeurs de publications ou éditeurs, quelles que soient leurs professions ou leurs dénominations, et, dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article 6, de les codirecteurs de la publication ;
2° A leur défaut, les auteurs ;
3° A défaut des auteurs, les imprimeurs ;
4° A défaut des imprimeurs, les vendeurs, les distributeurs et afficheurs.
Dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article 6, la responsabilité subsidiaire des personnes visées aux paragraphes 2°, 3° et 4° du présent article joue comme s'il n'y avait pas de directeur de la publication, lorsque, contrairement aux dispositions de la présente loi, un codirecteur de la publication n'a pas été désigné.
La loi pénale est d’application stricte.
Seules des personnes peuvent être condamnées, pas des personnes morales.
La cour de cassation l’a clairement dit dans un arrêt du 10 septembre 2005.
Attendu que, pour mettre hors de cause le Syndicat national du travail temporaire, poursuivi en qualité de prévenu, l'arrêt énonce qu'aucune disposition de la loi du 29 juillet 1881, ni aucun texte ultérieur, n'autorisent la poursuite d'une personne morale du chef dediffamation, et que le régime juridique de la contravention de diffamation non publique étant celui des infractions de presse, le premier juge ne pouvait pas entrer en voie de condamnation à l'encontre de ce syndicat ;
Certes, il s’agit ici de diffamation, mais pour l’injure, la problématique est la même.
Enfin le jugement dit que le FN n'est pas l'auteur matériel de l'infraction, il sera démontré qu'il y a participé par instigation et fourniture de moyens
prouvant que le FN n'a pas commis une infraction mais qu'il aurait fourni des moyens sns indiquer lesquels.
Même la participation par instigation est tirée par les cheveux.
Cette femmes est raciste.
Le magistrat motive assez fortement le fait qu’il n’y a pas de sursis comme la Loi lui en fait obligation.
Par contre le magistrat dit que la peine de 9 mois est insusceptible de conversion alors que la loi ne le dit pas. De plus le JAP peut décider tout autrement.
Article 132-24 En savoir plus sur cet article...
Modifié par LOI n°2009-1436 du 24 novembre 2009 - art. 65
Dans les limites fixées par la loi, la juridiction prononce les peines et fixe leur régime en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur. Lorsque la juridiction prononce une peine d'amende, elle détermine son montant en tenant compte également des ressources et des charges de l'auteur de l'infraction.
La nature, le quantum et le régime des peines prononcées sont fixés de manière à concilier la protection effective de la société, la sanction du condamné et les intérêts de la victime avec la nécessité de favoriser l'insertion ou la réinsertion du condamné et de prévenir la commission de nouvelles infractions.
En matière correctionnelle, en dehors des condamnations en récidive légale prononcées en application de l'article 132-19-1, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; dans ce cas, la peine d'emprisonnement doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une des mesures d'aménagement prévues aux articles 132-25 à 132-28.
Il me semble qu’ici, le magistrat est « allé un peu loin ».
Le magistrat n’a pas motivé en quoi la personnalité et la situation de la condamnée ne permettent aucune mesure d’aménagement. Le magistrat n’explique ni ne motive en quoi aucune autre sanction n’est envisageable. Il me semble qu’obliger la délinquante à aller travailler pendant plusieurs mois dans des associations de réinsertion en Guyane aurait pu être envisagée.
Que doivent faire la société et la justice?
L’enfermer dans son racisme ou lui donner la possibilité de l’éclairer de ses errements ?
La justice doit être universelle et être la même en Guyane qu’à Paris ou Orléans.
Taper sur des délinquants ne les rend pas moins délinquant.
Tant que cette dame ne se sera pas rendu compte de la gravité de ce qu’elle a écrit, cette condamnation ne servira pas la cause de l’humanité.
Un dernier point n’a pas été abordé.
La délinquant prétend qu’aucun avocat en Guyane n’a accepté de la représenter.
Si ce fait était avéré, ce serait particulièrement grave pour la justice française.
Le FN, lui a les moyens de payer un avocat et de lui payer le voyage.
A mon avis, le FN et Mme Leclère ne feront pas opposition, mais appel du jugement.
En cas d’opposition, ils se retrouveraient devant le même Tribunal.
Ce qui serait amusant c’est que l’une fasse opposition et l’autre appel devant la cour d’appel de Cayenne. Dans tous les cas, les prévenus auront tout intérêt à être présents et représentés par un avocat.