PROCÈS COLONNA : LETOURNANT ?
Hier mardi 24 mai, unéchange a eu lieu qui pourrait changer toute la donne du procèsColonna.
C'était le tour d'AlainFerrandi de venir déposer à la barre.
Alain Ferrandi était lechef du commando Erignac. C'est de lui que l'ancien préfet Bonnet adit qu'il savait tout ce qui s'était passé et qu'il détenait doncla clé de tout ce mystère tragique. D' Alain Ferrandi, on serappelle les propos qu'il a tenus face à Yvan Colonna, au cours duprocès de première instance fin 2009 : « Je sais que tu esun homme d'honneur. Si tu y avais été (dans l'attentat contre lepréfet Erignac), tu l'aurais dit. Tu ne l'as pas dit, donc tu n'yétais pas. » A cette époque, les parties civiles etl'accusation avaient fait de cette déclaration si manifestementtordue un élément de preuve de la culpabilité d'Yvan Colonna. Etde fait, planait sur les propos de Ferrandi et sur ceux des autresmembres du commando et de leurs épouses, une impression de gènedans la façon dont ils dédouanaient le berger de Cargèse. Toute lapresse en avait déduit qu'ils affirmaient son innocence àcontre-cœur parce que Colonna refusait d'assumer, au contraire deses complices, la gravité de son acte.
Et voilà que quasimenten deux phrases tout s'éclaire.
Yvan Colonna raconte àla barre – c'est la révélation annoncée en début de procès –qu'après l'attentat de Pietrosella, Alessandri a pris contact aveclui pour lui proposer un attentat plus important. Colonna refusebrutalement et ne veut pas en savoir davantage. Voilà pourquoi ilavait « un moment » eu connaissance du groupe desanonymes.
De son côté, Ferrandidit à la barre qu'ils ont pensé que l'informateur du préfetBonnet, le mystérieux Corte, c'était Yvan Colonna. Non seulement,le militant nationaliste a refusé de « franchir le pas de laviolence » (déclaration d'Alessandri au premier procès enappel) mais de surcroît, il aurait trahi en livrant les noms desmembres du commando. S'ils ont été arrêtés les 21 et 22 mai 99,ç'aurait été à cause de lui. Il ajoute que la rumeur (répanduepar qui ?) en avait couru dans tout le mouvement nationaliste :Colonna était un traitre et un donneur.
A partir de là, oncomprend tout. Quand le commando est appréhendé, il accuse celuiqu'il considère comme responsable de ces arrestations d'avoir étéle tueur. Maranelli le fait dans la nuit du 22 au 23 mai et lesautres suivront dans la foulée. Leurs épouses aussi. S'ils le fontaussi vite et avec une telle unanimité, c'est que cela avait ététrès vraisemblablement décidé à l'avance. Au cours des procèssuivants, ils restent sur cette conviction de la lâcheté de Colonnaet ils auront donc l'attitude évoquée plus haut.
Tout cela, je le disaisdès avril 2009 dans « LE ROMAN DE Ghjuvanni STEPHAGESE, cléspour l'affaire Colonna » et je l'ai repris dans l'opusculesorti il y a un mois, « YVAN COLONNA : L'INNOCENCE QUIDÉRANGE ». Je n'ai pourtant aucun don de divination. Ilsuffisait de voir deux choses. D'une part, tous les témoignagesétaient favorables à Yvan Colonna, et les contradictions dans lesaccusations du commando étaient telles qu'elles s'annulaientd'elles-mêmes. D'autre part, sur cette base, les attitudes et lesaffirmations des uns et des autres pouvaient être lues d'une façonradicalement différente. Ainsi par exemple, plusieurs membres ducommando ( Versini et Alessandri notamment) avaient déjà laisséentendre au procès de 2009 que si Colonna avait été accusé,c'était pour le punir de ne pas avoir participé aux attentats. Maiscela, personne n'avait voulu le comprendre.
Cependant, il y a autrechose de capital à quoi personne ne veut prêter attention. Ainsipar exemple, Michèle Alessandri, dans son récent passage à labarre a évoqué les réunions préparatoires à l'attentat qui apermis d'assassiner le préfet Erignac. Elle a parlé de la présencede deux complices inconnus. Cela nous renvoie à la déposition deVinolas comme à toute une série de phrases sur des complices nondésignés et qui n'ont jamais intéressé les enquêteurs. Descomplices qu'il s'agissait de couvrir en mettant en avant le nom deColonna. La Cour du Président Stéphan changera-t-elle sur ce point? Le tournant du procès Colonna pourrait être là.
Un dernier mot. On a faitgrand cas du fait que, pendant trois heures de déposition, MichèleAlessandri n'ait pas eu un regard pour l'accusé. On n'a pas vuqu'elle n'a pas eu un regard non plus pour la famille Erignac. Elleavait d'un côté et de l'autre ceux qu'elle avait honte de regarder: les deux camps des victimes. Ceux dont le père ou le mari a ététué ; celui dont la vie a été dévastée par des accusationsmensongères.