Pour la 1ere fois de ma vie, je ne voterai pas.
Contre tous les discours sur la responsabilité du vote, le devoir moral citoyen lorsqu’on a la « chance » de vivre dans un « pays démocratique », bla bla …, j’ai décidé que cette fois je m’abstiendrai.
« Trop, c’est trop », formule usée jusqu’à la corde, récurrente, que l’on veut définitive et qui pourtant réapparait à chaque goutte toujours insupportable car versée dans un vase décidemment trop plein.
Et puis les élections pour renouveler le parlement Européen sont la parfaite opportunité pour renforcer le camp de l’abstention. Quand on sait le huit clos des décisions du Conseil Européen et de la Commission Européenne (en particulier concernant les négociations en cours sur ce monstrueux traité transatlantique[1]), et combien le parlement est de peu de poids sur les décisions dès lors qu’il ne décide pas de l’agenda législatif, alors on finit par ouvrir les yeux et se rappeler cette citation d’Octave Mirbeau : «Les moutons vont à l’abattoir. Ils ne disent rien, et ils n’espèrent rien. Mais du moins ils ne votent pas pour le boucher qui les tuera et pour le bourgeois qui les mangera. Plus bête que les bêtes, plus moutonnier que les moutons, l’électeur nomme son boucher et choisit son bourgeois. Il a fait des Révolutions pour conquérir ce droit. »[2].
On se dit que le bulletin de vote finit par être l’alibi de l’a-démocratie pour acheter la paix des peuples. Entendez non pas celle, absurde, décernée récemment par le comité Nobel ni celle qu’on nous ressert comme une sauce écœurante pour nous convaincre qu’il ne faut surtout pas parler d’alternative à cette Europe-là, à l’Euro, un peu allez , tiens osons ce parallèle (pas si osé), comme si dans un repas de famille, il ne fallait pas parler des actes de pédophilie du grand-père envers ses petits-enfants sous le prétexte que la famille risquerait d’imploser. Non, cette paix des peuples, c’est la convocation à l’assentiment d’une politique économique libérale et tout sauf sociale, d’une violation répétée de la souveraineté des peuples et de leur droit à l’autodétermination, aux règles démocratiques les plus élémentaires[3].
On l’a bien compris, comme l’exprime si bien notre président de gôche, quand le peuple exprime son mécontentement, c’est que les gouvernants n’ont pas fait assez preuve de pédagogie. Comme exercice de contrition, on a connu mieux ! Pour le reste, Rendez-vous tous les cinq ans (de quoi se plaint-on : avant c’était sept, vive le progrès !).
Non cette fois c’est décidé, je ne voterai pas, en déplaise à tous les Européistes convaincus, y compris à la gauche de la gôche, les candidats aux élections y trouvant certainement une manière de financer avantageusement leurs activités politiques nationales[4]. Ceux-ci sont par ailleurs certainement convaincus que leur influence au sein d’une institution Européenne bipolarisée, voire tout entière majoritairement de centre droit, est très négligeable. Peut-être en tirent-ils l’intérêt de se dire être dedans, c’est-à-dire observateurs de l’impuissance en marche de 751 élus recevant substantielles subsides mensuelles. Devrait-on les élire pour cela ? Je ne le crois pas. Je crois au contraire que le seul message audible de représentants de cette Europe-là est l’abstention massive, le pourcentage des votants étant le seul maigre indicateur, le seul petit fil tenu qui les relie encore aux peuples d’Europe. Prêt-s à craquer.
[1] Le traité transatlantique, un typhon qui menace les Européens
[2] In la grève des électeurs, Octave Mirbeau, voir aussi Wikipédia. Merci Christophe !
[3] Comme lorsque le traité constitutionnel de 2005 qui, bien que rejeté par le peuples Français et Irlandais leur a finalement été é-hontement imposé en catimini par Nicolas Sarkozy.
[4] Et non – rendons leur cet hommage – pour tirer au flanc et s’enrichir, du moins l’espère-t-on.