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Billet de blog 26 février 2014

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France 2 maltraite la souveraineté des peuples (ce n'est pas nouveau)

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Vous faîtes partie peut-être de ceux qui, comme moi, regardent et écoutent encore parfois (même si relativement peu souvent) les grandes lignes des journaux télévisés parce que c’est un moyen de garder un œil sur les choix éditoriaux (contestables) de médias encore très (trop) regardés ainsi que sur la manière dont certains sujets sont traités, manière qui me laisse (selon l’humeur) hilare ou bien furieux devant tant de partialité[1] affichée sans complexe.

Alors vous aurez peut-être assisté, dimanche dernier[2] , au journal TV de 20h sur France 2, à deux épisodes (pris parmi tant d’autres), maltraitant la souveraineté des peuples.

Pour le 1er épisode, Laurent Delahousse conclut la crise Ukrainienne, ayant conduit Viktor Ianoukovytch à quitter et ses fonctions et Kiev, par ces mots : « Vladimir Poutine avait une priorité jusqu’à ce soir, c’était bien sûr ses (sic) jeux Olympiques mais le président Russe sait que ce dossier Ukrainien est plus que jamais sur son bureau. Il va falloir le régler (re-sic) (…) mais comment ? La question n’est pas simple »

Et oui comment Vladimir Poutine va-t-il régler ce problème ? Puisque l’Ukraine faisait partie il n’y a encore pas si longtemps de l’U.R.S.S et que Vladimir Poutine est un homme fort, n’est-il pas naturel que la force reprenne le dessus face à la contestation populaire ? Tout cela est d’ailleurs confirmé par le reportage suivant d’Alban Micoscy appuyant cette vision de la rédaction par de répétés « Ne nous leurrons pas » au sujet de la diplomatie Russe. Tout cela est donc normal. Balayée, une contestation pourtant complexe (avec une composante nationaliste d’extrême droite, agrégée à un mouvement pro-Européen à la recherche d’une certaine image de la modernité, lui-même opposé à une autre partie de la population plutôt pro-russe). Tout cela ne compte pas au regard d’un homme fort, saint-patron de Jeux Olympiques et aux pouvoirs par conséquent si décuplés que la nation qu’il préside aurait le droit en toute impunité de décider, au final, du sort d’un de ses anciens pays satellites. En d’autres mots, la contestation populaire est un problème qu’il faut régler et l’homme fort de la région a la solution.

Le second épisode, quelques minutes plus tard, est absolument confondant. Il s’agit de l’analyse du soutien affiché de Cécile Duflot, ministre du gouvernement,  à la manifestation qui a eu lieu la veille contre le projet de l’Aéroport de Notre-Dame-Des-Landes par Nathalie Saint-Cricq, journaliste politique de la rédaction : « Enfin Laurent, tout ça fait surtout désordre, souvenons-nous de Jean-Pierre Chevènement : « Un ministre ça ferme sa gueule ou ça démissionne ». Un bon sens qui ne semble pas effleurer Cécile Duflot alors que ce soit sur les Roms, sur le pacte de responsabilité, les Verts sont des récidivistes. Ils veulent le beurre, être au gouvernement, et l’argent du beurre, à savoir leur liberté totale d’expression sur une ligne à gauche toute. Pas sûr qu’ils sortent gagnants de ce double-jeu. Mais il est probable que François Hollande en sorte perdant. En fait de Manuel Valls à Cécile Duflot, cette majorité présidentielle est confuse donc pas étonnant qu’elle provoque des couacs. Alors puisque l’heure est à la clarification économique (NDLR : on ne voit pas très bien le rapport entre la manifestation à Nantes et la dite clarification économique soit dit en passant), une clarification politique s’impose. En clair, si aucun pacte de responsabilité ne peut être passé avec les écolos, il serait logique que François Hollande en tire toutes les conséquences. Un remaniement, Laurent, c’est fait pour ça ! ».

Cette analyse est un petit bijou et concentré de la pire pensée conservatrice qui soit : Une pensée et une ligne unique devant régner au sein du gouvernement dans lequel les rapports de force et les divergences de vue seraient synonymes de … confusion. Les écologistes sont au passage traités d’irresponsables turbulents, de délinquants (récidivistes) dès lors qu’ils contestent des décisions (pourtant contestables aux yeux d’un grand nombre de personnes responsables …) : la politique d’expulsion des Roms (dont le bon sens devrait pourtant permettre à Nathalie Saint-Cricq de penser qu’elle est abjecte), le pacte de responsabilité (qui devrait apparaître plus que confus pour une adepte de la clarification !), ce projet d’aéroport enfin absurde pour qui se donne la peine d’étudier le dossier (La journaliste s’est-elle seulement renseignée sur l’histoire de ce projet et de sa contestation ?). Mais nous n’aurons pas droit dans cette analyse de haute volée aux enjeux réels pourtant bien politiques de ces dossiers complexes, seulement à une soupe politicienne qui ne nous livrera pas les raisons pouvant conduire Cécile Duflot à contester un projet soutenu par son premier ministre (depuis si longtemps qu’il en a fait une position de principe, défaut caractéristique de ceux qui ont bien trop de pouvoir).

Qu’ont en commun ces deux épisodes (encore une fois pris parmi tant d’autres exemples) : ils délivrent un message attendu et conforme à la ligne du pouvoir légitimée par l’image véhiculée (par ces mêmes médias) de l’autorité de ceux qui défendent cette ligne. Il ne peut dans ce contexte être envisagé que du fait de la résistance et de la contestation d’au moins une partie du peuple, les termes du débat soient remis à plat et qu’une analyse des enjeux de démocratie et de souveraineté soit posée à nouveau.

La Russie est-elle légitime pour interférer dans les affaires internes Ukrainiennes ? « Ne nous leurrons pas » nous répond Alban Micocsy dans un mélange de cynisme et de realpolitik[3]. Cécile Duflot a-t-elle le droit d’exprimer son opposition à un projet qui heurte ses convictions écologiques ? Bien sûr que non, répond Nathalie Saint-Cricq, pleine d’assurance et par-dessus le marché réclamant, du haut de son autorité médiatique, que la ministre soit débarquée pour cela.


[1] Evidemment cette partialité démontre (à ceux qui nourriraient un espoir vain et naïf) qu’aucun vent révolutionnaire n’est prêt de souffler dans ces rédactions-là.

[2] dimanche 23 février 2014, http://www.francetvinfo.fr/replay-jt/france-2/20-heures/jt-de-20h-du-dimanche-23-fevrier-2014_531657.html

[3] Un concept récent, particulièrement nauséabond, et si souvent invoqué par Nicolas Sarkozy, concept qui a tant fait de mal à la vraie politique au sens premier et noble du terme.

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