Les idées de rejets des droits des minorités, sont partout, dans toute la société française.
Le FN en est juste devenu le symptôme, le catalyseur depuis plusieurs décennies.
Car voilà des années que la pensée du FN oriente la vie politique française à droite comme à gauche.
Sur un point précis par exemple, avec l'expression devenue commune de "candidats anti-système" qui est un terme issue directement de l'idéologie réactionnaire de l'extrême droite. Ce qui s'appelle un réductionnisme en sciences humaines et sociales ; car de fait il n'existe qu'un système général, qui s'appelle le champ social, et dont nous sommes tous de fait agents et acteurs.
Mais au delà, le cœur des idées de l'extrême droite résume toujours le fait d'une majorité qui s'attaque aux droits, et déni la reconnaissance, des spécificités culturelles d'une minorité.
Ces idées sont partout au delà du FN, je propose un petit florilège de déclarations politiques à ce sujet des candidats à l'élection présidentielle qui se sont classés respectivement 3eme et 4eme :
Fillon, novembre 2016 : "la France n'a pas vocation à être multiculturelle"
Mélenchon, septembre 2016 : le port du burkini "est une provocation politique". Et sur un tweet de 2015 "je conteste le terme d'islamophobie. On a le droit de ne pas aimer l'islam, comme on a le droit de ne pas aimer le catholicisme".
Dans tout les cas (comme il est expliqué dans cette vidéo) il s'agit là de discours qui ne parlent en aucun cas de l'islam ; mais des projections imaginaires, des fantasmes, d'une majorité à l'encontre d'une minorité.
La France est malade, elle est malade de sa pensée coloniale qui est toujours présente et qui fonctionne sur un modèle assimilationniste. Ce n'est pas pour rien que le FN est un parti politique qui a été crée par des anciens de l'Algérie Française. L'absence de reconnaissance du droits des minorités musulmanes fait partie de son essence depuis 50 ans.
Mais là encore le FN n'est qu'un vecteur de cette pensée assimilationniste qui parcourt l'ensemble de la nation française depuis sa constitution à minima en tant qu'État republicain.
Le terme d'assimilation utilisé pendant toute la période coloniale ; puis trop connoté, à été remplacé à partir des années 60 et 70 par le terme d'intégration qui fut alors véhiculé par les médias. Mais l'idée était la même, et est bien résumé dans la chanson Le Bruit et L'Odeur de Zebda, qui fait référence à un discours clairement raciste de Chirac. Dans cette chanson, Zebda prend le point de vue de la minorité qui s'adresse ainsi à la majorité : "Intégré je le suis ; alors dites-moi ou est la solution ?"
Aujourd'hui le terme intégration tombe en désuétude ; c'est le terme laïque qui le remplace ; mais en creux c'est toujours le même fantasme d'une majorité petit-blanc (pour faire référence aux écrits de Frantz Fanon), qui est celui de la pensée coloniale et assimilationniste française. Et d'ailleurs au passage cette pensée là, assimilationniste, n'a pas fait que structurer les colonies françaises, mais également les régions métropolitaines françaises en méprisant les folklores et les langues locales (ce qui est dénoncé par le terme de centralisme). Il est d'ailleurs significatif que le mot folklorique soit devenu un terme péjoratif en France ; et que pendant longtemps l'école de la 3ème république brimait tout les élèves qui osaient en récréation parler leurs langues maternelles (breton, walof, languedocien, arabes..). Tous à la même enseigne dans l'objectif de s'unir et de devenir un seul et même peuple civilisé..; la dérive idéologique de la pensée raciste n'est pas très loin..
Or pour revenir au cas du terme laïcité et à son emploi, là encore le processus est le même qu'avec le terme d'assimilation ou d'intégration : c'est toujours la majorité qui fixe ses propres critères d'évaluation de ce qui est, et de ce qui n'est pas laïque (voir la vidéo postée sur les règles du foulard à l'école, alors que la loi interdisant les signes religieux n'existait pas encore, est édifiant à ce sujet).
Voir ce très bon documentaire si vous voulez aller plus loin
C'est toujours la même pensée assimilationniste qui voudrait voir la société française comme une nation indivisible, comme un seul corps, un seul peuple.
Dans ce sens le débat sur l'identité nationale en 2007, et le ministère crée dans la foulée, était terrible. Il ne peut pas exister une seule identité nationale, il n'y'a que des identités nationales, multiples.
Serions-nous atteint d'un complexe national, car en tant que français, nous portons le nom d'un peuple barbare qui a envahit la gaule romaine civilisé ?
Bref, tout cela est du mythe, de l'imaginaire, mais qui parcourt le champ social.
Et le FN aujourd'hui et un précipité de l'histoire coloniale et raciste de notre nation ; histoire dont nous occultons le devoir de mémoire derrière une colère faite à la reconnaissance du droits des minorités.
Qui sait par exemple, alors que tous les brillants orateurs politiques de cette élection se réclament de l'esprit des lumières que Voltaire était raciste ?
Ou encore que Jules Ferry, grand défendeur de la laïcité, figure de la gauche républicaine, estimait qu'il était "du devoir des races supérieures de civiliser les races inférieures" ?
Pourquoi cette absence de reconnaissance de notre histoire récente face à notre racisme colonial ?
Pourquoi ce besoin au contraire des hommes politiques d'orienter le travail des historiens et de l'éducation nationale ? Ainsi cette fameuse loi de 2005 qui stipule que « Les programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord et accordent à l’histoire et aux sacrifices des combattants de l’armée française issus de ces territoires la place éminente à laquelle ils ont droit » (article 4, alinéa 2)
De fait le Front National, c'est là ma thèse qui me semble évidente n'est pas un problème issu de la mondialisation. Le Front National est un problème issue de la rencontre de la mondialisation avec notre pensée coloniale, assimilationniste qui parcourt toujours, électrise toujours le débat national d'un pays qui n'a jamais réellement voulu faire son devoir de mémoire face a son histoire coloniale.
Toutes les sociétés ont à faire avec la question de la reconnaissance du droit des minorités qu'elles accueillent. Concrètement, dans l'histoire, certaines sociétés occidentales et orientales ont été beaucoup plus accueillantes que d'autres avec les communautés juives.
Et la façon dont les minorités sont accueillis, traités, par la société d'accueil (qui représente la majorité) conditionnera tout sentiments futurs pour la minorité de se sentir accueilli ou au contraire rejetté. Qu'observons-nous aujourd'hui ? Et parmi tout les bons republicains français se disant athée et laïque : combien pensent qu'un ou qu'une musulmane pratiquante aura quelque chose à lui enseigner ? Et au delà, pourquoi dénier que c'est toujours l'autre, l'étranger qui de part le regard qu'il porte est le plus à même de nous apprendre quelque chose sur nous même ?
Asterix le gaulois n'est qu'un mythe de bande dessinée qui a bien pris dans les années 50 car il a permis d'oublier un temps la débandade, les divisions françaises lors de l'occupation allemande et de la dictature pétainiste. Asterix n'était qu'une bande dessinée pour enfants, notre nation est issue d'un nom qui n'a pas de rapport avec la gaule. Et après tout les francs n'ont peut être pas vraiment "envahit" la gaule, peut être qu'ils ont juste migré au sein d'une civilisation gallo-romaine, en pleine déliquescence..
Car voilà, tout cela ne sont que des mythes fondateurs qui plus est, instrumentalisé par la 3ème république pour forger un sentiment nationaliste, en pleine expansion coloniale, avec une volonté d'opposition à l'Allemagne à la veille de deux guerres mondiales. Charles Martel a t-il vraiment arrêter les arabes à Poitiers ou à t-il seulement fait une partie de dés et bu un thé avec eux ?
N'y a t-il pas la quelque chose à purger dans notre roman national toujours matinée d'impérialisme ; tout comme l'Allemagne a du y procéder au lendemain de la defaite de 45 (et ce en réformant profondément ses institutions) ?
Ou est le racisme aujourd'hui ? En France, alors que le FN qui est arrivé au second tour est crédité de 40% d'intentions de votes ; et que la jeunesse (contrairement à il y'a 20 ans) ne manifeste plus aucun rejet pour les idées réactionnaires de Le Pen ? Ou en Allemagne, qui a accueilli sur les deux dernières années plus de 1,5 millions de réfugiés de guerre syrien, erythréen,... ; et alors que 10% de la population civile des villes et des campagnes allemandes se sont aujourd'hui engagés bénévolement pour l'accueil de ces réfugiés ? Qui des deux pays traduit aujourd'hui en 2017 le mieux l'esprit des lumières de Montequieu, Goethe, Olympe de Gouges, Franklin.. ?
Alors, de quoi avons-nous peur en étant incapable de nous distancier et de faire face à notre nationalisme héritée du passé ? Quand est-ce que nous arriverons à affronter nos erreurs pour reconnaître que nous pouvons et que nous avons à être fier de nos diversités culturelles ?
Et puis, pour y revenir de quel voile nous nous habillons en étant incapables de reconnaitre les injustices archis connus et démontrées faites aux minorités dans ce pays ?
Le FN est ce parti raciste, issue d'anciens absolutistes de l'Algérie Française. Le parti d'une guerre qui était perdu d'avance et qui a fait plus de 400 000 morts algériens pour 30 000 morts français. Une guerre que nous avons nommé pudiquement jusqu'en 1999 sous le vocable de "événements d'Algérie" C'est ce parti, le FN, qui est issue de l'OAS, des tenants absolu de l'Algérie Française, ce parti qui cristallise la pensée coloniale, la pensée assimilationniste qui parcourt toute notre société.
Aujourd'hui, le FN arrive une deuxième fois au second tour des élections présidentielles en 15 ans. Le FN est ce dimanche 30 avril à 41 % d'intentions de votes (son score a progressé de 5 point en une semaine) ; là ou Le Pen père n'avait fait que 18% en 2002.
Quel est le drame qui se joue, sous nos yeux ? Quel est cette apathie à le combattre aujourd'hui en comparaison d'il y'a 15 ans ? Ses thèses ont-elles gagnés ?
Aider Marine Le Pen le dimanche 7 mai a faire un score élevé en n'allant pas voter, en votant blanc, ne pourra servir justement qu'à l'aider à arriver plus facilement au pouvoir dans un futur proche ou dans l'immédiat.
Est-ce vraiment cela que nous voulons : d'une France de l'ordre, coloniale, réactionnaire, combattant la diversité des modes de vies et des idées ?
Et de fait, nous qui sommes bien nés, du bon côté, qui faisont partie de cette majorité ; quels qualificatifs pouvons-nous employer pour parler aux minorités de ce pays (couleur de peau, religions, étrangers, ..) et leurs dires sans aucunes hontes et pour de multiples arguments que nous ne voterons pas Macron contre Le Pen dimanche prochain ?