Le 17 novembre dernier, l’accueil de l’Aide sociale à l’enfance (ASE), à Avignon, est fermé. Aucune personne se déclarant mineur étranger non accompagné ne peut se présenter pour demander une mise à l’abri et une évaluation par les services du Département. Pourtant c’est la période des grands froids qui commence. Pendant ce temps, la sphère médiatique en France est occupée par la nouvelle « loi immigration » et les débats sur la « préférence nationale ».
Suite à cette première fermeture de l’accueil, le Défenseur des Droits national est saisi par le Secours Catholique. Des actions de communication sont entreprises par la Coordination Étrangers Vaucluse et des démarches juridiques se multiplient, portées par l’association Rosmerta : des référés sont déposés pour chaque jeune qui affronte la fermeture des services d’accueil. Par la suite, l’accueil ne sera que partiellement rétabli. Un mot affiché sur la porte apparait et disparait indiquant au jour le jour si l’accueil est fermé. Le Conseil départemental refuse de communiquer et il n’y a pas de vote en assemblée. Lors des questions de la presse et du Tribunal Administratif (TA), la raison invoquée est la saturation du dispositif, pourtant les chiffres fournis à la demande du TA, ne montrent pas de montée significative de l’accueil par rapport aux années précédentes.
Mais une autre pratique va venir aggraver la situation. Les décisions des juges pour enfants ordonnant le placement des jeunes à l’ASE du Département jusqu’à leur majorité ne sont pas appliquées ; les services refusent de les accueillir et font appel systématiquement. Selon la législation, ces recours ne sont pas suspensifs, c’est à dire ne suspendent pas l’obligation d’appliquer les décisions des juges en attendant le jugement d’appel. Nous sommes dans un cas de figure où les lois ne sont pas respectées (1).
Un premier référé est déposé devant le tribunal administratif. La demande ayant été acceptée, le tribunal ordonne la prise en charge du jeune par l’ASE et condamne celle-ci à verser 100€ par jour de manquement. Le Département refuse toujours d’accueillir et préfère payer. Le mardi 13 février, trois nouvelles décisions pour trois nouveaux référés sont retenues contre le département du Vaucluse et fixent une somme de 300€ par jour de non-accueil pour chaque jeune. Les procédures d'appel du département sont actuellement en cours, la première devrait être jugée début mars.
Guerre d’usure ? Un problème local ?
Ce qui se passe dans le Vaucluse doit être regardé de très près mais aussi de loin. Deux jours avant cette nouvelle décision défavorable pour le département de Vaucluse, le ministre de l’intérieur en déplacement à Mayotte annonce, le dimanche 11 février , une réforme constitutionnelle pour pouvoir suspendre le droit du sol dans ce département, afin de « couper son attractivité ». Voici la nouvelle solution pour régler la « crise migratoire ».
Préférence nationale, suspension du droit du sol, des services publics qui ne remplissent par leur rôle et ne respectent pas la législation. Oui, décidément, les temps sont sombres. Mais pour reprendre les mots d’Arundhati Roy, « peut-être est-il temps que nous reprenions la nuit ». Le 23 février prochain, la Coordination Étrangers Vaucluse et des nombreuses associations et collectifs appellent à un rassemblement à Avignon, devant la préfecture, pour protester contre les OQTF (Obligation de quitter le territoire français) et cette politique désastreuse du non-accueil.
La commission juridique de Rosmerta
(1) Dans la presse locale à ce sujet, voir ce reportage et cet article.