Laurent Berger a commis une erreur qui restera comme l’une des plus grandes de l’histoire du syndicalisme en ayant confondu régime universel et retraite par points. Ne pas avoir compris, comme François Hollande avant lui, la duplicité d’Emmanuel Macron, va jeter pour longtemps le discrédit sur la CFDT. L’intérêt d’un système de retraite par points pour un gouvernement libéral était pourtant expliqué par François Fillon en 2016 devant les patrons :
« Le système par points, en réalité, ça permet une chose, qu'aucun homme politique n'avoue :
ça permet de baisser chaque année la valeur des points et donc de diminuer le niveau des
pensions ».
L’erreur de Laurent Berger s’explique par l’assurance qui lui a été donnée que la valeur du point ne pourrait pas baisser, que ceci serait écrit dans la loi. Malheureusement ne pas baisser la valeur du point ne suffit pas car il y a l’inflation. Il suffit de regarder l’historique sur les 20 dernières années du point de la fonction publique pour comprendre le holdup qui se prépare :
Revalorisation du point de 2000 à 2020 : 10,3 %
Inflation de 2000 à 2020 : 33,1 %
PERTE DE VALEUR DU POINT : 22,8 %
Rapportée à l’échelle d’une carrière légale de 43 ans, la perte sur les pensions serait de 49% :
Concrètement cela signifie qu’avec une carrière professionnelle identique, en supposant une variation du même ordre du point de retraite, un jeune d’aujourd’hui partira avec une pension de retraite inférieure de moitié en pouvoir d’achat à celle d’un retraité d’aujourd’hui.
Il est ahurissant de voir qu’un syndicat aura agi involontairement contre l’intérêt des travailleurs par l’aveuglement de son secrétaire général et il est probable que la CFDT ne s’en remettra pas.
Pourtant le régime universel n’imposait pas une retraite par points : Un régime universel, peut très bien être basé sur lessalaires en appliquant la même méthode de calcul à tout le monde.
Le choix d’un système de « retraite par points » est celui du gouvernement qui, dans un objectif avoué, veut se servir du point comme d’une variable d’ajustement pour maintenir la part des pensions à 14% du PIB, ce qui n’a strictement rien à voir. C’est un choix purement
financier à tel point qu’il préfère recréer les régimes spéciaux en les renommant « spécifiques » pour faire passer une réforme ainsi vidée du sens affiché au départ.
Le gouvernement s’ingénie à réduire le débat à un antagonisme entre le système actuel avec ses régimes spéciaux et le « régime universel ». Il dénonce avec une rhétorique bien rodée, le corporatisme de ceux qui s’accrochent à « leurs privilèges ». Il mélange très habilement les termes « régime universel » et « retraites par points » par la contraction « régime universel par points » et nous vend de l’équité.
Il veut qu’on regarde ailleurs pour faire passer sa retraite par points. Mais l’historique du point de la fonction publique montre qu’en guise d’équité, pour ceux qui sont jeunes aujourd’hui, ce sera la diète pour tous.