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Billet de blog 28 janv. 2023

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Fiat lux !

Pour les malvoyants de France et de Navarre

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

J’ai une vision de 4 sur 10 à un œil et de 2 sur 10 à l’autre. Une redoublante, quoi !

Pris en juillet dernier, mon prochain rendez-vous avec mon excellente ophtalmologue aura lieu fin février. Ça approche, ça approche, après 7 mois d’attente et… d’aggravation.

Mais ce n’est pas cette réalité délétère des soins en France contre laquelle je viens d’attraper de nouveau ma souris d’ordinateur. C’est pour partager avec vous ma peine et mon chagrin de vieille parisienne maltraitée.

Voici ce qu’il m’est arrivé hier, et ce n’est absolument pas nombriliste :

J’allais en consultation chez mon tout aussi excellente docteure généraliste. Pour pénétrer dans l’immeuble qui abrite son cabinet – un petit joyau d’un goût exquis – il faut appuyer sur des boutons que je ne distingue plus sans ma lampe de poche, indispensable aussi lors des courses dans « les grandes surfaces ». Nécessaire encore pour traverser le grand hall d’entrée, où l’électricité avait, bien entendu, été coupée. À la fin de la consultation, la super-doctoresse m’amène jusqu’à la sortie. Quand je vous dis qu’elle est unique, je sais de quoi je parle !

Le pire étant toujours possible, l’heure d’entre chien et loup était là. Un loup qui ne m’a pas loupée, vu que je me suis égarée dans ce quartier que je connaissais comme mes poches.

Paris, ville lumière, la bonne blague !

Sr un trajet d’une demi-heure à pied en flânant, j'ai dû errer pendant deux heures et demie avant de trouver la porte d’entrée de l’asile pour « seniors autonomes et indépendants » où je crèche, l’abus d’euphémismes étant une spécialité française non seulement chez ceux qui nous gouvernent.

Paris plongé dans noir, économies de bouts de chandelles. Qui, elles, de toute façon, n’éclairerait rien sous la pluie. Des pavés bringuebalants sur lesquels je risque de trébucher et me casser un os ou un autre. Je ne distingue pas les noms des rues ni les numéros des bus dans ces ténèbres.  Mais quels bus ?  Pas de bus car pas de conducteurs, puisque payés au lance-pierres sur des itinéraires labyrinthiques conçus pour un peuple de taupes par une Maire de la Ville atteinte de la folie des grandeurs olympiques.

Arrivée enfin dans ma piaule, je ne peux que lécher mes plaies. Aller à la pharmacie est au-dessus de mes forces, et la bonne docteure, n’étant pas voyante pour lire l’avenir dans le marc du café, n’avait pas prévu ma congélation parisienne et ses suites.

Tout ce périple et ces détours pour hurler contre l’injustice majeure, celle de nous ignorer, nous, les malvoyants percevant encore la lumière.

C’est mon deuxième appel : unissons-nous ! Une armée de malvoyants en tête de la prochaine manif. Bruegel et sa Parabole des aveugles.

 Mon troisième viendra de l’outre-tombe.

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