Trois cent cinquante personnes en colère, cinquante vendeurs de tamales qui dénoncent, des employés qui se plaignent, des fonctionnaires qui semblent avoir été à l’école des pédants prétentieux qui croient tout savoir, des bus qui n’arrivent pas, des fréquences de passage aléatoires, des congestions aux points d’intersection, des retards sur les lignes, des pics d’affluence à manager, des vieux bus recyclés dans le nouveau système, les femmes tripotées, des systèmes de sécurité et des caméras inutiles…voilà qui définit le Système Intégrale de Transport Public de Bogota. L’objectif initial était d’intégrer, de moderniser et de réduire le nombre d’entreprises qui fournissaient les services. Celle- ci opèrent dans autant de zones divisées par la ville. Sensé accélérer, il n’avance pas, et patine même dans las arepas, puisque la choucroute n’est pas un plat local.
Le SITP est entre autres le fameux Transmilénio dont j’ai déjà expliqué le magnifique mécanisme de "contratacion" décrit par Yesid Lancheros. L’avocat Manuel Sanchez et Emilio Tapia témoins étoiles du "Carrousel de Contrataciones", avaient dénoncés auprès du Procureur les irrégularités dans l’appel d’offre du Transmilénio et la participation de responsables du district. Rappelons : Gustavo Petro dénonce le tout et est nommé maire de la ville. Petro...de la côte nord, même région que celle des Picaros Nule, fonda un journal appelé Carta al pueblo, se mêlant avec des mouvements syndicaux à Zipaquira, où il devint "Personero municipal" avec l’aide de Eduardo Gutierrez, Conservateur lui, et roi de la pomme de terre.
Petro prit à l’époque le drapeau de l’Anapo (Parti National Populaire de l’Alliance, d’obédience communiste) au milieu d’une lutte sociale qu’il gagna en faisant distribuer des terres de la curie de Zipaquira aux paysans qui la réclamaient...la pomme de terre devint le lien entre l’église et la politique et a fait rapprocher deux extrêmes; Petro a été élu conseiller de Zipaquira! Poste qu’il a peu occupé car il devint vite "Auréliano" au service du mouvement guérillero M19. Après la prison et quelques années dans la clandestinité, il s'est démobilisé à l’issue des négociations de paix avec le gouvernement. Il devint célèbre en dénonçant la corruption politique du pays et les para-militaires liés au gouvernement d'Alvaro Uribe. Chose curieuse, le hasard de la vie veut que le ex-guerrillero, maintenant maire bien instalé et le roi de la pomme de terre se retrouvent encore en lien avec les Picaros Nule : Veronica Alcocer, troisième femme de Petro, est cousine des Nule et la sœur de la belle fille du riche potentat...
Sous l’ère du maire Petro, cinq gérants du SITP ont défilé depuis 2012 : Carlos Garcia, parti pour cause d’épuisement, Fernando Rey qui a démissionné, Fernando Sanclemente qui est parti pour faire campagne en faveur de la marionnette d’Uribe, Oscar Ivan Zuluaga; puis en juin 2014 il a la brillante idée de nommer Marco Tulio Gutierrez, parti pour cause de lien avec...le "Carrusel de Contrataciones"; mais Petro s’est ressaisi en nommant l’ex-directeur de l’aéronautique civile, Sergio Paris Mendoza. Malgré ça il n’y a pas d’accélération de la mise en œuvre du système de transport. En juin, tous les autobus seront contrôlés par le Tansmilénio. Il y a de la confusion pour les petits transporteurs et les utilisateurs. Les opérateurs de bus articulés traversent une crise économique car les opérateurs de la SITP sont en faillite.
La réalité est que ceux qui commandent sont les concessionnaires de l’opération troncal (transport massifs), de l’opération zonale (transports collectifs) et le concessionnaire de la collecte (Angelcom) qui doit finir son opération cette année en laissant les rênes à Recaudo Bogota. Pour tirer Egobus et Ecobus de la faillite, les vieux bus seront remis en service après avoir été repeints en bleu...belle avancée! Surtout que certains bus ne s’arrêtent pas pour prendre les usagers! Le système est dysfonctionnel, ne favorise pas les secteurs populaires, et les concessionnaires sont en faillite à cause du Recaudo Bogota, du service illégal des bus et la coexistence avec le bus vieillis; les anciens bus sont censés être hors circulation le 1er juin...
Pourquoi avoir intégré les petits propriétaires au SITP? Où est passé l'argent censé ameliorer le transport? Le système n’a rien généré de nouveau. En laissant les bus traditionnels opérés il n’y a pas de cohérence globale ni pour les propriétaires, ni pour les opérateurs. Grande question : qui va être candidat pour reprendre les lignes des deux concessionnaires en faillite?
Sur recommandation de ma conscience je poursuis ici ma sensibilisation sur la façon "magique" dont fonctionne le narcoétat. Dans celui ci les transports sont pris en main par ceux-là même qui risquent de mener le système dans le fossé...Défense de rire.