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Macron et Tshisekedi : la conférence de trop sur l’Est congolais
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Macron croit-il vraiment à ce que dit Tshisekedi ?
Emmanuel Macron et Félix Tshisekedi pensaient sans doute donner un signal fort à la communauté internationale en organisant une conférence sur la situation humanitaire dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC). En réalité, ils n’ont fait que s’enliser dans un piège diplomatique soigneusement tendu par Kinshasa — et dans une mise en scène qui, faute d’acteurs crédibles, tourne à la farce.
Une rencontre sans emprise sur le terrain
Organisée par deux présidents en perte de vitesse dans leurs pays respectifs, cette réunion prétendait aborder la crise humanitaire dans une région que ni Paris ni Kinshasa ne contrôlent réellement. Aucun représentant local, aucun acteur directement concerné par le drame de l’Est congolais n’a été invité. Deux capitales éloignées ont donc parlé à la place des premiers concernés, dans une sorte de dialogue à huis clos sur un théâtre qu’elles ne dominent plus.
Le symbole est fort : alors que Kinshasa a depuis longtemps perdu la main sur la zone, aucun chef d’État d’Afrique de l’Est n’a fait le déplacement. Les rares délégations présentes se sont contentées d’observer, conscientes qu’il s’agissait d’une énième conférence sans lendemain. La prudence aurait pourtant dû alerter Macron et Tshisekedi : une réunion sur l’Est du Congo sans l’Est du Congo, cela relevait déjà du non-sens diplomatique.
Un pari risqué : rouvrir Goma sans concertation
Le geste le plus spectaculaire — et le plus malvenu — est venu de Paris. Emmanuel Macron a décrété la réouverture de l’aéroport de Goma, sans consulter les véritables autorités du terrain : le mouvement armé AFC/M23, qui contrôle la région. Une décision jugée irresponsable, voire provocatrice, par nombre d’observateurs.
Le chef de la diplomatie rwandaise, Olivier Nduhungirehe, n’a pas mâché ses mots : « Paris ne peut pas rouvrir un aéroport alors que les principaux acteurs sont absents. »
Macron et Tshisekedi feignent d’ignorer que la ville de Goma est jumelle avec la ville de Rubavu du Rwanda, dans une zone où les tensions restent explosives. Tant que Kinshasa continuera à s’appuyer sur les milices FDLR — composées d’anciens génocidaires rwandais — tout en menaçant Kigali, la méfiance du Rwanda restera légitime.
Tshisekedi, entre calcul politique et impasse militaire
Sur le terrain, la réalité est implacable : la guerre que Tshisekedi prétend gagner est depuis longtemps perdue. Le président congolais bloque lui-même les négociations entamées à Washington et à Doha, ordonnant à ses délégués de se retirer dès qu’un accord semble proche. Pourquoi prolonger un conflit qui détruit son propre pays ? La question reste entière.
Pendant ce temps, dans les zones sous contrôle de l’AFC/M23, le calme est revenu, les déplacés sont rentrés chez eux, et le mouvement armé revendique une gestion locale « stabilisée ». À l’inverse, dans les provinces toujours tenues par Kinshasa — Ituri, Tanganyika, Kasaï, Maï-Ndombe, et même la capitale — la population vit dans une misère profonde, aggravée par la corruption et les abus des autorités civiles et l’armée congolaise elle-même.
L’hypocrisie humanitaire
Sous couvert d’aide humanitaire, la conférence de Paris s’apparente à un exercice de communication politique. Si la volonté d’aider était sincère, Tshisekedi aurait commencé par rétablir le paiement des salaires suspendus des fonctionnaires de l’Est du pays, rouvert les banques et ordonné à ses forces et milices alliées de cesser leurs attaques contre les civils.
En réalité, cette rencontre « humanitaire » a surtout servi à donner l’illusion d’une action diplomatique, là où la lucidité s’imposait : sans reconnaître les acteurs de terrain, aucune solution durable n’est possible.
Un échec diplomatique retentissant
Le boycott quasi total des chefs d’État de la région — Paul Kagame (Rwanda), Évariste Ndayishimiye (Burundi), Yoweri Museveni (Ouganda) et William Ruto (Kenya) — illustre le discrédit de cette initiative.
La conférence Macron-Tshisekedi n’a accouché que d’une souris. Pire : elle a mis en lumière l’isolement croissant de deux dirigeants qui, faute d’avoir prise sur le réel, préfèrent encore la mise en scène à l’action.
Conclusion :
Macron et Tshisekedi ont voulu jouer les médiateurs d’une crise qu’ils ne maîtrisent pas. Ils en sortent affaiblis, déconnectés des réalités du terrain et de plus en plus marginalisés sur l’échiquier régional.
Dans l’Est congolais, la seule aide véritable ne viendra ni de Paris ni de Kinshasa : elle viendra d’un retour à la paix — et d’un dialogue honnête avec ceux qui tiennent réellement le terrain.
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