Après l'effroi, la tristesse, la colère, place à la réflexion.
Le vendredi 13 novembre 2015 se sont produits les terribles attentats de Paris. Ces attentats revendiqués par les fascistes de Daesh, d'une extrême barbarie et d'une extrême lâcheté m'ont particulièrement touché. Différents sentiments se sont succédé, l'effroi, la tristesse, la colère, l'indignation... Devant les images, les vidéos , les récits, j'étais passif et incapable de réfléchir. Il est bien connu que sous l'émotion, nos capacités d'analyse et de réflexion sont amoindries voir annihilées. J'étais sous le choc, effrayé. Puis après l'effroi, c'est la tristesse qui a pris le dessus avec l'annonce des 130 morts. 130 innocents qui désiraient seulement passer une bonne soirée, à la terrasse d’un restaurant, dans un bar, dans une salle de concert ou seulement traverser une rue. Comme l'a si bien dit Julien Salingue "Vos guerres, nos morts". La tristesse laissa place à la colère, à l'indignation. Une indignation, de la colère contre Daesh, mais aussi contre nos gouvernements et leurs politiques impérialistes, capitalistes, incohérentes au premier abord. Il est pourtant très important de réfléchir aux causes de ces tragédies qui se sont produites à Paris, en Turquie, au Liban, en Syrie, en Irak, au Mali...
Ne pas réfléchir aux causes, aux erreurs du passé, c'est se condamner à revivre les mêmes tragédies.
Cet article a pour objectif de mettre en lumière les nombreuses incohérences des politiques extérieures de la France, des Etats-Unis et plus globalement de l'OTAN, face aux djihadistes, aux régimes totalitaires islamistes depuis de nombreuses années, ce qui a permis à Daesh de devenir le monstre qu'il est aujourd'hui. Incohérences au premier abord, mais en creusant le sujet, ce sont les logiques du capitalisme qui sont en cause. Une politique internationale qui fait passer les intérêts des divers groupes capitalistes, les logiques financières, avant les intérêts humains, écologiques... Le capitalisme est fondé sur l'accumulation du capital, la recherche de profit, l'économie de marché, la propriété privée des moyens de production, la concurrence... Ce sont des logiques basées sur le court terme et qui ne prennent pas en compte les dimensions sociales, écologiques, humanitaires... Le capitalisme n'est pas un système qui recherche l'intérêt commun et la théorie d'Adam Smith sur la main invisible est totalement obsolète. Et c'est bien pour cela que les politiques internationales sont impérialistes, basées sur la protection des intérêts capitalistes. Les puissances impérialistes qui s'affrontent au Moyen Orient peuvent très bien utiliser des groupes djihadistes telles des marionnettes. Seulement comme nous le verrons, le monstre Daesh est devenu incontrôlable.
Il est important de se remémorer l'empire colonial de la France. Ceci afin de comprendre pour quelles raisons la France intervient ou non dans certaines zones, sous couvert d'idéaux humanistes, alors qu'il ne s'agit que d'intérêts géopolitiques, géostratégiques, financiers, économiques, afin de protéger avant tout des lobbies présents sur ces territoires ou permettre l'implantation de nouveaux groupes.
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Comme le montre cette carte, la France possédait un vaste empire colonial. Et cette dernière a divers intérêts dans beaucoup de ces pays. Nous nous concentrerons dans cet article sur certains pays. La Libye, le Mali, la Syrie car directement touchés par le propos de cet article. Nous nous intéresserons aussi au cas de l'Irak, pays qui fut sous mandat Britannique (SDN) de 1920 à 1932 bien que des bases militaires y restèrent plus longtemps. Malgré la décolonisation, les intérêts géopolitiques, financiers pour ces pays perdurent toujours. Comme il s'agit avant tout de logiques financières, capitalistes, impérialistes, les différentes puissances n'hésitent pas à soutenir de manières incohérentes divers pouvoirs autoritaires, qui appliquent la charia comme l'Arabie Saoudite, le Qatar voir à soutenir, financer des rebelles islamistes, des djihadistes. Il ne s'agit pas de glorifier l'impérialisme russe qui lui aussi à des intérêts fort au Moyen-Orient et est déjà intervenu comme nous le verrons. Et il serait surtout illogique de faire l'apologie d'un impérialisme face à un autre impérialisme, même si la Russie semble avoir une politique plus cohérente envers les islamistes radicaux. Les puissances impérialistes que sont les Etats-Unis, la France, l'Angleterre se battent au Moyen-Orient depuis de très nombreuses années contre d'autres puissances impérialistes comme la Russie, la Chine. Ceci a pour effet de déstabiliser la région.
La Première Guerre d'Afghanistan et la naissance d'Al-Qaïda.
Les Etats-Unis ont été les premiers à soutenir le wahhabisme en Arabie Saoudite. Doctrine religieuse qui applique de manière la plus rigoureuse la charia et dont s'inspire en partie le djihadisme. Les Etats Unis, dans un contexte de guerre froide, promettaient via le Pacte du Quincy en 1945 de protéger l'Arabie Saoudite en échange d'une partie des ressources présentes en Arabie Saoudite. Il s'agissait pour les Etats-Unis de s'implanter durablement au Moyen-Orient face à l'URSS, tout en ayant des ressources et des débouchés économiques. L'URSS était alliée à l'Afghanistan qui avait des prétentions sur les régions à majorité patchounes. Et les Etats-Unis soutenaient le Pakistan et l'Arabie Saoudite. Mais suite à un coup d'Etat en Afghanistan du prince Mohammed Daoud Khan, l'Afghanistan s'éloigna de l'URSS petit à petit. L'URSS se mit à soutenir le coup d'Etat du parti démocratique populaire d'Afghanistan. Le PDPA au pouvoir avait des relations privilégiées avec l'URSS. Seulement les conservateurs religieux du pays n'acceptaient pas les réformes sur l'athéisme d'Etat, le droit des femmes... Les tensions s'exacerbèrent suite à des assassinats politique avec d'un côté le Pakistan et les Etats-Unis qui voulaient la chute de ce gouvernement et donc la déstabilisation du pays et de l'autre l'URSS qui entra officiellement en guerre en 1979 afin de protéger ses intérêts en Afghanistan. Pour résumer cette guerre impérialiste qui a déstabilisé la région avec d'un côté les USA, le Pakistan, l'Arabie Saoudite et de l'autre l'URSS a été un échec retentissant pour l'URSS qui se retira en 1989. Durant cette guerre, les Etats-Unis ont armé, formé les talibans, les moudjahidines. C'est d'ailleurs à ce moment là que tout commence pour Oussama ben Laden. Il est engagé et formé par les services secrets d'Arabie Saoudite mais aussi la CIA afin de combattre les soviétiques. Il part donc en Afghanistan et combat avec les djihadistes. Il veut aller plus loin dans sa guerre sainte mais est retenue par l'Arabie Saoudite et les Etats-Unis. Un autre nom à retenir, Abdelhakim Belhadj, qui lui aussi combat l'URSS en Afghanistan et jouera un rôle important dans la guerre de Libye en 2011. Le bloc soviétique s'écroule en 1990-1991 et permet à l'OTAN d'avoir le champ libre pour des politiques interventionnistes, impérialistes.
Une intervention en Irak pour préserver les intérêts des groupes pétroliers (1991).
La seconde guerre du golfe débute donc en 1991 avec l'invasion du Koweït par l'Irak et l'intervention sous l'égide de l'ONU des Etats-Unis, de la France... Avec des mensonges, la manipulation des médias afin de faire adhérer l'opinion publique américaine à cette intervention. L'Irak considérait que le Koweït était une région irakienne car ancienne possession irakienne du temps de l'empire ottoman. C'est surtout une zone riche en pétrole, gaz et peu peuplées, seulement quelques tribus bédouines y vivaient. Les pétromonarchies du Golfe que sont le Qatar, les Emirats arabes unis, le Koweït sont nées d'une volonté des compagnies pétrolières qui se sont implantées dans les années 1930 de mettre en place des pouvoirs autoritaires, dictatoriaux favorable à leurs intérêts. Il fallait donc protéger avant tout le pétrole du Koweït qui appartient à de riches compagnies pétrolières. La guerre se finit avec une défaite prévisible de l'Irak face à la coalition. Un constat, c'est une guerre qui s'est menée sous couvert d'actions humanitaires. Mais c'est bien la protection des intérêts des groupes pétroliers qui fut la principale raison de cette intervention.
La déstabilisation de l'Irak, de la région, contexte idéal pour la naissance et l'expansion de Daesh.
Oussama ben Laden qui s'éloigna entre temps de l'Arabie Saoudite et des Etats-Unis, financa et prépara les attentats du 11 septembre 2001 à New-York. Des attentats terribles d'Al-Qaïda qui permettent aux Etats-Unis sous Bush d'entrer en guerre face à l'Afghanistan dans un premier temps, puis contre l'Irak dans un second temps. L'objet de cet article n'est pas de débattre si le gouvernement américain a laissé faire ou non les attentats et les responsabilités des différents services américains. Les Etats-Unis ont manipulé les populations, la communauté internationale avec des images satellites de bâtiments contenant des armes de destruction massive et chimiques afin de légitimer leur guerre en Irak. Ces informations se révélèrent totalement fausses. Autre argument infondé des Etats-Unis pour légitimer cette intervention, l'Irak soutenait les terroristes. Jacques Chirac refusa de se joindre à cette guerre. Peut-être ses conseillers clairvoyants lui avaient dit de ne pas participer à une guerre trop dangereuse pour la stabilité du Moyen-Orient? Les enjeux de cette intervention étaient encore une fois géopolitiques. Du pétrole, des débouchés économiques... Le pays, mais aussi toute la région furent déstabilisés avec la chute du régime de Saddam Hussein en 2003. Ce dernier était loin d'être un partisan de la démocratie, mais faire tomber des régimes pour des raisons économiques, géopolitiques, ça peut poser des questions. Pourquoi l'Irak et pas le Qatar, l'Arabie Saoudite...? Vous avez compris j'imagine. C'est d'ailleurs après la chute de Saddam Hussein que Daesh arrive en Irak en 2006. Le pays est en proie à une instabilité importante, ingérable pour l'armée américaine et ses soutiens. Le gouvernement fantoche Irakien n'arrive pas à s'imposer et à stabiliser le pays. Et pour cause, ce gouvernement n'est clairement pas reconnu par une majorité de la population. Daesh et Al-Qaïda s'unissent en Irak. Le chef d'Al-Qaïda Abou Hamza al-Mouhajer prête serment d'allégeance au chef de Daesh en Irak Abou Omar al-Baghdadi. Mais les Etats-Unis n'ont pas combattu Daesh. Bien au contraire, ils voyaient en ce groupe djihadiste, un moyen de déstabiliser la Syrie, alliée de la Russie. C'est ainsi que Daesh a massacré diverses populations (kurdes, chiites, sunnites..) en Irak dans l'indifférence totale des Etats-Unis, des forces de l'OTAN. Daesh avait alors le champ libre pour son expansion. Par ailleurs, lors du renversement de Saddam Hussein, l’Arabie Saoudite, le Qatar se rejoignèrent dans la crainte commune de voir se dessiner un croissant chiite aux frontières de leurs pays sunnites. Ils regardèrent donc favorablement le développement des groupes djihadistes sunnites comme Daesh et al-Nosra sur un terreau alimenté par la déliquescence de l’Etat Irakien, une corruption endémique, et une haine profonde des chiites et des occidentaux. C'est ainsi que l'Arabie Saoudite, le Qatar commencèrent à financer Daesh. Cette déroute des Etats-Unis en Irak, ce fiasco, ce véritable chaos crée dans cette région, tout ceci pouvait laisser penser que les politiques d'ingérences allaient cesser.
L'intervention de Sarkozy en Libye, l'armement d'islamistes radicaux et l'équilibre fragile du Sahel brisé.
Mais ce n'est pas le cas. Et c'est du côté de la France sous la présidence de Nicolas Sarkozy qu'il faut regarder. Au début de sa présidence, Nicolas Sarkozy était très généreux avec le régime libyen du dictateur Mouammar Kadhafi . On se souvient de la complaisance dont faisait preuve Nicolas Sarkozy avec le dirigeant du régime libyen au point de céder à tous ses caprices lors de sa venue à Paris en décembre 2007. Tout le monde se souvient de la fameuse tente plantée dans les jardins de l'hôtel Marigny.
D'après de nombreuses révélations de Médiapart, le régime libyen aurait financé en partie la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy de 2007. On peut comprendre alors sa grande complaisance pour le régime dictatorial et la réception de Mouammar Kadhafi en décembre 2007.
Puis, une guerre civile éclata en Libye en 2011 lors du Printemps arabe. Au début, il s'agissait de manifestations contre le régime en place. Puis suite à la répression violente des manifestations par le régime, c'est une véritable guerre civile qui éclate. Des questions sont posées au sujet du fait que les rebelles seraient noyautés par des groupes d'islamistes radicaux. Mais la France et l'OTAN considèrent que le danger est minime et ils interviennent. La France et l'OTAN décident de ne pas intervenir au sol mais de seulement bombarder les forces loyalistes, avec un soutien logistique et l'armement des forces rebelles. Plus le temps passe et plus les islamistes radicaux prennent une place importante dans les forces rebelles. Des massacres de populations noires ont lieu de la part des rebelles dans l'indifférence totale. Des massacres qui sont à déplorer d'un côté comme de l'autre. La France comme les Etats-Unis ont armé des islamistes radicaux, le Qatar finance aussi les opérations. La France, en coordination avec le Qatar, a joué un rôle décisif. En juin 2011, selon une révélation du Figaro, elle organise plusieurs parachutages d'armes dites légères dans l'ouest et le sud du pays pour créer un nouveau front. Ces armes « légères », ce sont des lance-roquettes, des fusils d'assaut, des mitrailleuses et des missiles anti-char Milan. Officiellement, elles auraient été envoyées à des rebelles berbères sur les hauteurs du Djebel Nafousa, aux portes de Tripoli. La réalité, c'est que le maquis passe rapidement sous contrôle d'Abdelhakim Belhadj et de sa « Brigade du 17 février ». Cet homme, dont nous avons parlé durant la guerre d'Afghanistan contre l'URSS, a continué sa lutte pour l'islamisme radical. En 2003, il combat aux côtés de Abou Moussab Al-Zarqaoui (autre djihadiste formé en Afghanistan), le responsable d'Al-Qaïda à Bagdad. Il est arrêté et est accusé d'être un des responsables des terribles attentats de Madrid en 2004. Puis il est relâché en 2009 pour amnistie. La Brigade du 17 février est formée pendant trois mois au Qatar au début de la Guerre libyenne, financée et armée par le Qatar, les Emirats arabes unis et la France. Disciplinée, bien formée, au moral à toute épreuve, la Brigade de Belhadj fait la différence et prend Tripoli en août 2011 marquant la fin du conflit.
Comme nous le voyons, la France a armé, soutenu des groupes islamistes, des djihadistes avec l'aide du Qatar. Pour quelles raisons, Nicolas Sarkozy a changé sa politique vis-à-vis du régime libyen? Le financement supposé du régime libyen pour sa campagne présidentielle en 2007 devenait un fardeau bien trop lourd? Un désir du gouvernement français de redonner du prestige, un poids international à la France? Des raisons économiques, géopolitiques? En tout cas, après la victoire du CNT en Libye, des informations vont dans ce sens. L'industrie pétrolière Total avait des intérêts en Libye.
La conclusion de cette guerre, c'est que la Libye est toujours en guerre civile. Le pays est devenu une plaque tournante pour les islamistes et le trafic d'armes suite à la déstabilisation du Sahel. La charia a été mise en place directement après la chute de Kadhafi. C'est la victoire des islamistes radicaux.
Des interventions au Mali, en Centrafrique, en Syrie et la montée en puissance de Daesh.
En 2012, François Hollande remplace Nicolas Sarkozy. Mais les politiques extérieures demeurent les mêmes. C'est ainsi qu'il intervient au Mali en janvier 2013, en Centrafrique et en Irak/Syrie. L'intervention française au Mali révèle que des armes livrées en Libye se retrouvent au Mali dans les mains des djihadistes. C'est ainsi que des soldats français se battent contre des armes françaises. Selon des sources convergentes maliennes, dès août 2011, les touaregs maliens avaient mis la main sur une partie des armes parachutées par les forces françaises dans les montagnes de l'ouest libyen. Les raisons de l'intervention françaises sont multiples. Le Mali est une ancienne colonie française. Le gouvernement français désire un gouvernement "coopératif" avec les capitalistes français présents sur le territoire. La Françafrique ne s'est jamais arrêtée. On y découvre que le Mali possède des réserves d'uranium et que la compagnie Areva est présente dans la région et a des intérêts importants au Mali mais aussi au Niger.
La Syrie est aussi touchée par le Printemps Arabe en 2011, le régime de Bachar el-Assad est contesté. Des séries de manifestations se succèdent , manifestations réprimées violemment. L'armée de Bachar el-Assad est accusée d'avoir utilisée des armes chimiques, mais les sources sont contradictoires à ce sujet. L'OTAN, la France soutiennent les rebelles et veulent plus que tout la chute du régime de Bachar al Assad allié de la Russie. Avec des armes livrées à des islamistes radicaux et plus précisément au Front al-Nosra, un groupe de salafistes djihadiste. Ce groupe était allié au début à Daesh avant de s'allier à Al-Qaïda (rivalités entre djihadistes). Mais ce qu'il faut savoir, c'est que les armes ont sans doute circulé entre le Front al-Nosra et Daesh, car ce sont des groupes très proches. Mais peu importe, il fallait combattre plus que tout Bachar el-Assad, c'était la cible numéro un. D'ailleurs Laurent Fabius avait clairement avoué qu'il fallait se battre contre Bachar el-Assad, "Monsieur Bachar El Assad ne mériterait pas d’être sur la terre" et avait soutenu que, "le Front al-Nosra fait du bon boulot". La France livre des canons de 20 mm, des mitrailleuses, des lance-roquettes, et des missiles antichars à l'ALS. Hors on se rend compte que l'ALS ne pesait rien. Au final, le gouvernement français ne sait pas qui a récupéré les armes. Les Etats-Unis sont accusés par les services de renseignement russes de jouer un double jeu. D'armer et combattre Daesh en même temps. Pendant que l'OTAN était occupée à combattre Bachar el-Assad, Daesh devenait de plus en plus fort. En effet, ce groupe a été financé par le Qatar, l'Arabie Saoudite. Les Etats-Unis se sont servis de Daesh comme moyen de déstabilisation de la Syrie, alliée de la Russie. C'est pour cela que la France, les Etats-Unis arment des sunnites djihadistes dans la région. Seulement, la marionnette s'est libérée et est devenue incontrôlable comme ce fut le cas avec Al Qaïda et Oussama ben Laden. Ceci peut expliquer pourquoi la puissance impérialiste russe combat si farouchement les sunnites djihadistes. La Russie est alliée aux chiites de la région et soutient le projet d'un croissant chiite dans la région. Les pétromonarchies (soutenues par les Etats-Unis et l'OTAN) désirent la chute du régime syrien laïque et y mettre un régime sous domination d'islamistes radicaux pour des raisons idéologiques. Mais pas seulement, le projet de pipeline afin d'acheminer le pétrole iranien jusqu'en Méditerranée entre l'Iran, la Syrie, l'Irak dérange fortement les pétromonarchies. D'après Alain Juillet, ancien directeur du renseignement de la DGSE : "L’Arabie saoudite et le Qatar prennent très mal l’idée d’un pipeline qui pourraient concurrencer leurs livraisons de pétrole. Ils vont se dire : mais dans le fond le problème c’est Bachar. Il est en train de signer un accord qu’il ne devrait pas signer avec l’Iran. Donc c’est un personnage extrêmement dangereux. Donc il faut renverser Bachar ". Mais c'est aussi une zone riche en pétrole, en gaz, phosphate, orge, blé, coton qui intéresse les puissances en jeu sur le territoire. Daesh possède aujourd'hui un territoire aussi grand que la Grande-Bretagne.
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Conclusion : Daesh, créature des politiques capitalistes et impérialistes?
Daesh est devenu le monstre que l'on connaît aujourd'hui. C'est l’organisation terroriste la plus riche de l’histoire et a réussi à se forger une indépendance financière. Ceci grâce en partie aux politiques extérieures de la France, des Etats-Unis, de l'OTAN. Au final, les islamistes radicaux ne dérangent pas nos gouvernements à partir du moment où ils ont une économie libérale propice aux intérêts capitalistes. Comme avec le cas du Qatar, de l'Arabie Saoudite. Nos gouvernements ont armé, peut-être même financés des djihadistes directement ou indirectement pour des raisons géopolitiques, géostratégiques, économiques, financières. Ils ont déstabilisé le Moyen-Orient de part leurs politiques impérialistes, d'ingérences, ceci a laissé de la place pour Daesh. Ils se sont servis de Daesh, mais le monstre est devenu incontrôlable. Ils ont laissé et laissent toujours le Qatar, l'Arabie Saoudite aider financièrement Daesh. Seulement quelques jours après les attentats du 13 novembre, notre gouvernement préparait la venue du Qatar. Ils sont d'une complaisance outrancière avec les pétromonarchies du Golfe, ceci révèle leur cynisme politique. Ils laissent la Turquie, membre de l'OTAN, acheter du pétrole à Daesh. La Turquie d'Erdogan (membre de l'OTAN) préfère combattre les Kurdes, principales forces au sol à combattre Daesh. Ce pétrole transite en Irak, Syrie, Turquie et pourrait être acheté par certaines entreprises et pays européens. Est-il possible que du pétrole, du coton, du phosphate de Daesh circulent en Europe? Qui sont les clients de cette organisation terroriste? Est-il pensable que les pays qui dénoncent Daesh bénéficient directement de cette manne inattendue qui casserait littéralement les coûts de production et améliorerait les marges bénéficiaires des entreprises? En tout cas, le Figaro constate que si le pétrole s’échangeait en 2014 autour de 100 dollars le baril, il se traite actuellement à moins de 50 dollars. Mais Daesh offre un discount redoutable qui passe de 25 dollars le baril l’année dernière à 15 dollars actuellement environ assure Jean-Charles Brisard. On peut alors se demander comment les transactions financières se font? Avec du cash? Avec de telles sommes en jeu? 24 banques qui sont sous le contrôle de l’Etat Islamique opèrent toujours sur la scène financière internationale selon Jean-Charles Brisard. Le système de shadow banking (la finance de l’ombre) est légal dans la finance internationale. Ceci permet d'agir sans réglementation. Le système bancaire parallèle pesait 80.000 milliards de dollars fin 2014 selon un rapport du Conseil de stabilité financière. Ces sommes ne sont évidemment pas comptabilisées dans les bilans des grandes banques mondiales. Daesh, grand partenaire de la finance mondiale? Autre question en suspens, les membres de Daesh prendraient une drogue que l'on nomme le captagon, amphétamine qui diminue l'impression de fatigue, le stress, la peur, la douleur tout en augmentant l'activité et la concentration intellectuelle. Qui sont les laboratoires qui fabriquent et fournissent Daesh? S'agit-il seulement de laboratoires clandestins? Certaines sources s'interrogent sur des laboratoires de l'OTAN en Bulgarie. Qui sont les riches donateurs de Daesh? Faut-il s'arrêter au Qatar, à l'Arabie Saoudite, à la Turquie ou d'autres pays (40) ont financé Daesh comme l'a déclaré Vladimir Poutine?
L'hypocrisie de nos gouvernements au sujet de Daesh est à vomir. Ils en profitent même pour mettre en place un Etat policier en utilisant la stratégie du choc mais aussi pour accélérer la mise en place de réformes ultra-libérales. Les actions politiques, les discours post-attentats du gouvernement français ressemblent étrangement à ceux du gouvernement des Etats-Unis après les attentats du 11 septembre. Les révélations d'Edward Snowden auraint dû nous servir de vaccin. Mais ce n'est pas le cas. Pourtant ces personnes qui nous gouvernent aujourd'hui étaient les premières à critiquer le gouvernement américain en 2001. Il est impératif qu'une enquête soit menée sur les liens existants entre Daesh et les divers groupes militaires, financiers, économiques, industriels, affairistes, politiques du monde.
Des solutions pour combattre Daesh?
Pour détruire Daesh, il faut une politique extérieure plus cohérente pour commencer. Ne plus soutenir des groupes djihadistes, des islamistes radicaux, des régimes qui pratiquent la charia. Ne plus mener des politiques impérialistes, laisser les peuples disposer d'eux mêmes et des richesses de leur territoire. Mener une enquête sur le pétrole de Daesh, qui sont les clients? Mener une enquête sur cette finance internationale, ne plus permettre aux banques de Daesh de faire partie de la finance mondiale et bloquer les comptes. Il faut les isoler. Faire pression et sanctionner les pays qui financent Daesh comme l'Arabie Saoudite, le Qatar. Ces actions seront plus utiles que des frappes aériennes obsolètes. Les frappes aériennes tuent des innocents. Elles peuvent radicaliser des populations, permettre à Daesh de recruter encore plus en Syrie comme ailleurs. Combattre le terrorisme demande des solutions innovantes. Le terrorisme n'a pas d'Etat, il ne s'agit pas d'une guerre contre un Etat. Le terrorisme mute, change d'aspect, il faut s'adapter et arrêter d'utiliser des techniques, des plans d'actions qui ont échoué ces dernières années. Il faut lutter contre le trafic et les ventes d'armes. Seulement comme nous l'avons vu la France, les Etats-Unis, l'OTAN globalement, la Russie sont les principaux vendeurs d'armes et profitent pleinement de ces guerres.
Pour la politique intérieure de la France, il faut combattre le racisme, l'exclusion sociale, la marginalisation de le jeunesse des banlieues , le chômage. Il faut continuer à aider les réfugiés qui sont les premières victimes de ses monstres. Il faut détruire le récit de Daesh, récit rempli de mythes. Il faut donner plus de moyens aux actions sociales, mettre en place des structures de déradicalisation. Il faut combattre la propagation des vidéos de Daesh sur internet. C'est par l'éducation que les jeunes peuvent se protéger de la propagande. Il ne s'agit pas de légitimer les actions de ces gens. Rien ne peut excuser ce genre d'actes abjectes. Mais il faut s'attaquer à la source du problème. La surveillance de masse est un danger pour nos démocraties et ne nous protégera pas contre ce genre d'actes imprévisibles. L'Etat d'urgence n'est pas acceptable, ni utile. Il y a déjà des lois qui permettent de lutter contre le terrorisme sans avoir à violer la constitution. Depuis la loi sur le renseignement, le pouvoir judiciaire est de plus en plus mis à mal. C'est le pouvoir exécutif et les services de renseignements qui décident si des personnes doivent être surveillées ou non. Nos libertés individuelles sont bafouées et ça s'accélère avec l'état d'urgence, manifestations interdites, manifestants réprimés violemment, assignations à résidence et presquisions arbitraires. Hors toute démocratie a besoin d'un contre pouvoir, qui est caractérisé par le pouvoir judiciaire, gardien de nos libertés. Toute démocratie a besoin de débats politiques, de manifestations... Il est impératif aussi d'enquêter sur nos services de renseignements qui ont failli magistralement à plusieurs reprises en moins d'une année, pour les attentats de Charlie Hebdo mais aussi pour les attentats du 13 novembre. Aucune sanction, aucun changement à la tête des services de renseignements français.
Plus globalement, il serait temps de remettre en cause les logiques du capitalisme qui ont permis à Daesh de devenir un tel monstre et d'abattre le capitalisme.
Julien Dinant.