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Tribune 15 novembre 2025

Une vague de résistance en soutien au Sommet des Peuples

Le 15 novembre, journée mondiale de mobilisation pour le climat, marque le milieu de la COP30 et du Sommet des Peuples, où syndicats, organisations environnementales et peuples autochtones sont rassemblés pour remettre la justice climatique au cœur des négociations. Les membres de Women Wave et Amnesty International appellent à soutenir ce sommet.

En ce 15 novembre, journée mondiale de mobilisation pour le climat, alors que les négociations de la COP30 arrivent à mi-parcours, nous, activistes climatiques, féministes, anti-racistes et ONG pour les droits humains, voulons amplifier l’appel du Sommet des Peuples de résistance contre les responsables de la crise climatique et de solidarité avec les personnes, les peuples et les pays en première ligne de ses impacts.  

Le Women Wave Project, soutenu par Amnesty International, est né de cette volonté de faire entendre la voix de celles et ceux qui exigent la justice climatique et sociale, raciale et féministe, face aux intérêts économiques qui dominent lors des négociations internationales sur le climat. Traverser l’Atlantique en voilier pour s’inviter là où les lobbies sont les bienvenus, prendre la parole et renforcer celle des femmes, des personnes racisées, des communautés LGBTQI+, des habitant·es des quartiers populaires, des zones rurales et des territoires dits d’Outre-Mer, c’est un acte de résistance pour le climat et pour nos droits.

Parce que depuis dix ans, nos chef·fes d’Etat piétinent impunément leur engagement à limiter le réchauffement climatique à 1,5°C au-dessus des niveaux préindustriels. Pourtant, d’après la Cour international de justice, l’action climatique n’est pas un choix, c’est une obligation juridique.

Parce que les intérêts économiques des responsables de la crise climatique continuent d’être choyés. Moins d’un mois avant la COP, la compagnie pétrolière publique brésilienne Petrobras a obtenu l’autorisation du gouvernement pour un projet d’exploration pétrolière en eaux profondes, au large de l’Amazonie.

Parce qu’à 1,5°C de réchauffement, les conséquences du changement climatique sont déjà dramatiques et injustes. Chaque dixième de degré additionnel, ce sont des milliers de décès dus aux vagues de chaleur et d’enfants déscolarisés, des millions de personnes en insécurité alimentaire ou qui doivent quitter leurs terres.

Parce que la répression des personnes qui s’opposent à la destruction de leurs terres et à un futur invivable s’accélère partout dans le monde : menaces, interdictions de manifestations, violences contre des manifestant·es, criminalisation, retraits de financements, surveillance, attaques physiques, disparitions forcées, assassinats. L’Etat du Pará au Brésil qui accueille la COP30 est celui où il y a le plus de violences contre les défenseur·es des droits humains et de l’environnement, dont beaucoup sont issus des peuples autochtones et des Quilombolas (communautés d’ancien·nes esclaves auto-affranchi·es).

Les décisions prises pour nous ne peuvent plus l’être sans nous.

Les COP peuvent paraître techniques, loin de nous, voire inutiles, mais si c’était le cas, comment expliquer la présence des lobbies des énergies fossiles à chaque COP ? Ils étaient plus de 1770 à la COP29 à Bakou et plus de 2400 lors de la COP28 à Dubaï. La COP30 est accueillie sur un continent abritant parmi les groupes les plus impactés par la crise climatique mais aussi en première ligne des actions de protection des terres : peuples autochtones, populations afrodescendantes, paysan·nes et communautés rurales, communautés riveraines de projets extractivistes, jeunes. Elle doit non seulement visibiliser leurs luttes, leurs savoir-faire et leurs connaissances mais aussi leur laisser une réelle place à la table des négociations. Car comment éteindre le feu quand on écoute les pyromanes et qu’on fait taire les pompiers ?

Des décisions essentielles pour notre futur doivent sortir de cette COP, sur la sortie des énergies fossiles, la transition juste, le financement climatique, le genre, la protection des forêts tropicales, etc. Mais qu’attendons-nous quand les personnes dont le mode de vie et la survie même dépendent de l’ambition de ces décisions n’obtiennent pas de visa, n’ont pas les moyens pour se rendre à Belém, ne sont pas accréditées, n’ont pas accès aux salles de négociations ou ne sont autorisées qu’à de brèves interventions en plénière ?

La participation des personnes affectées et de la société civile permet de changer de paradigme, en centrant les discussions sur les droits humains et sur la nécessité urgente d’élargir la lutte contre le changement climatique pour y intégrer les questions de justice sociale, raciale et de genre. Pendant ces quinze jours, nous serons dans les salles de négociations pour rencontrer les délégations et amplifier les luttes des personnes en première ligne, et au Sommet des Peuples pour échanger avec des activistes sur la justice climatique de demain.

Notre résistance et notre solidarité ne se limitent pas aux quinze jours de la COP, nous n’oublions pas que l’Amérique latine est le continent le plus dangereux pour défendre le climat, les défenseur·es de l’environnement y risquent leur vie chaque jour. Nous ne détournerons pas le regard en quittant Belém et continuerons à exiger la protection des défenseur·es et la prise en compte de leur parole partout où des décisions climatiques seront prises. Sauver la planète ne pourra pas se faire sans celles et ceux qui la protègent.

Signataires :

Coline Balfroid, vidéaste et réalisatrice, Women Wave Project  

Adélaïde Charlier, activiste pour la justice sociale et climatique, Women Wave Project 

Camille Etienne, activiste pour la justice sociale et climatique, Women Wave Project    

Lucie Morauw, activiste pour la justice sociale et climatique, Women Wave Project 

Maïté Meeûs, activiste féministe, Women Wave Project   

Mariam Touré, activiste pour les droits humains et pour les quartiers populaires, Women Wave Project 

Margot Jaymond, chargée de plaidoyer sur la justice climatique, Amnesty International France