«Ayons pitié de ce pauvre pays et de son peuple »
Interview exclusive de Saïd-Ahmed Saïd-Abdillah
Président du Parti Comores Alternatives (PCA)
www.lemohelien.com: Que vous inspire la situation politique du Zimbabwe?
Saïd-Ahmed Saïd-Abdillah:
Je vous remercie, vous et votre équipe qui gérant ce site. Robert Mugabe a été un leader politique de la cause de l’Afrique pour l’indépendance. Il a été l’un des soutiens solides de la lutte contre l’apartheid en Afrique du Sud. Mais, il a oublié une notion fondamentale de la vie et de tout homme politique : le temps. Tout homme politique doit savoir que le temps est à la fois pour lui et contre lui. Il faut dans ce sens savoir s’arrêter.
www.lemohelien.com : Tiens ! On dirait que
C’est la notion de mandat dans nos constitutions et de la mort dans notre vie. Dans la sourate le royaume, verset 2 Allah dit, « Celui qui a créé la mort et la vie afin de vous éprouver (et de savoir) qui de vous est le meilleur en œuvre, et c’est Lui le Puissant, le Pardonneur.. » Ce verset montre le mandat de notre existence limité dans le temps. Robert Mugabe a ignoré le temps qui cadrait et valorisait ses actions et a détruit l’œuvre qu’il avait construit en voulant rester au pouvoir contre vent et marré. Les militaires – à défaut des politiciens et du peuple - ont fait leur devoir, que je trouve tardive mais nécessaire pour l’avenir de leur pays.
www.lemohelien.com: Partout, les acteurs politiques aiment le pouvoir, mais pourquoi faut-il que ça soit en Afrique, y compris aux Comores, où les dirigeants tripatouillent la Constitution et les élections pour rester indéfiniment au pouvoir, et toujours pour le malheur de leurs peuples?
Saïd-Ahmed Saïd-Abdillah:
L’amélioration d’une constitution n’est pas l’apanage de l’Afrique. Il n’est pas mauvais en soi de le faire afin de l’adapter aux besoins et aux réalités du moment. Nous avons vu qu’en France la constitution adopté le 4 Octobre 1958 par le Général de Gaulle avait été modifié le 6 Novembre 1962. Il a voulu encore le modifié en 1969 mais les français ont dit non et il a démissionné de son pouvoir. Mais cela n’a pas empêché d’autres révisions de cette même constitution comme celui du 26 Octobre 1974. Il ne faut pas voir le diable partout et surtout le situé uniquement dans nos pays d’Afrique noir, en particulier les Comores.
La volonté de vouloir rester d’une manière permanente au pouvoir est une question de culture, lié au peuple, aux hommes politiques et aux dirigeants. Il n’est pas encrée chez les africains seulement mais aussi chez les orientaux, les asiatiques, les américains (Amérique latine) et aussi les européennes. Vous pouvez regarder l’Allemagne d’Angela Merkel. La question n’est pas donc de la durée mais de l’action que mènent ces dirigeants politiques aux pouvoirs. On peut prendre l’exemple de trois dirigeants qui ont resté longtemps au pouvoir. Prenons le cas de Fidel Castro, président du Cuba (16 février 1959-24 février 2008 ) , de Lee Kuan Wee , premier ministre de Singapour ( 5 juin 1959-28 Novembre 1990 -31 ans et 5 mois de règne )et de Robert Mugabe , président du Zimbabwe(37 ans de règne (1980-2017) . L’unique a transformé son pays en modèle économique est le Singapourien et les deux sont restés dans l’histoire comme des vautours malgré leurs début glorieux, pleins d’espoirs et enthousiasmant.
www.lemohelien.com: Vous suivez avec une attention soutenue les déboires des assises. N’avez-vous pas le sentiment qu’elles partent en charpie, surtout à la suite de leur sévère condamnation par Anjouan, Mohéli et une bonne partie de la classe politique de la Grande-Comore? Des absences très symboliques ont été remarquées au cours de l’investiture du Comité du Pilotage, et cela ne vous inquiète pas?
Saïd-Ahmed Saïd-Abdillah:
L’évolution de la situation inquiète tout homme politique digne de ce nom. Mais on ne parlera pas de « déboire ». Il y a eu des absences remarquables que je regrette beaucoup surtout celui du gouverneur de l’île d’Anjouan. Cet absence n’a été pas dans son honneur, ni celui de l’île qu’il représente. Il y a d’abord le respect à la nation qui est représenté par le chef de l’Etat et au peuple Comorien. Chaque dirigeant Il y a eu une mauvaise interprétation de ces assises qui les brouille. Vous ne cessez pas de confondre les comoriens qui vivent dans les îles et les îles. Ce sont tous des comoriens qu’on doit tenir compte certes avec leur sensibilité. Il y a plusieurs acteurs politiques Comoriens qui confondent leurs personnes et leurs responsabilités nationales ou insulaires. Vous ne pouvez mélanger votre position politique qui désapprouve le pouvoir en place et les assises et ses objectifs. Rien n’est mauvais que de jouer avec la merde, elle vous sue toujours. Il faudra qu’on travaille sérieusement ensemble pour trouver une solution fiable et viable pour notre pays.
www.lemohelien.com: Pourquoi restez-vous dans cette fuite en avant qui vous pousse à ne pas admettre le caractère insulaire des assises?
Saïd-Ahmed Saïd-Abdillah:
Les assises, je ne cesse de vous le répéter n’ont aucune caractère insulaire. D’ailleurs, je propose aux membres de comité de pilotage de choisir comme président un homme ou une femme issue des autres îles que la Grande Comore. Tenir ces assises nous paraît très important pour l’avenir de notre pays. On ne peut reculer juste pour des raisons des égos des uns et des autres.
www.lemohelien.com: N’aurait-il pas fallu un consensus national renforcé avant de tenter d’organiser ces assises afin d’éviter les haines, cassures et distorsions dans un pays qui a tant souffert d’instabilité institutionnelle et politique?
Saïd-Ahmed Saïd-Abdillah:
Vous savez, il y a un adage très connu qui dit : on peut forcer les vaches à aller à la rivière mais on ne peut pas le forcer à boire. Ces assises ont été largement médiatisées et chacun d’entre nous ont pu comprendre leurs objectifs. Il y a eu des gens qui ont tout fait, du moment où ce ne sont pas eux qui les soutiennent et l’accompagnent pour les saboter. Au fond, ils ne visent pas les assises dont certaines ont cru trouver leur cheval de Troie mais la personne du chef de l’Etat. On ne peut pas réduire l’avenir de notre pays à notre haine, mépris et autres à une personne. Il est d’une grande valeur pour un homme politique de se maitriser et de surpasser en faisant passer d’abord l’intérêt nationale et de la majorité du peuple que la sienne. Les hommes politiques comoriens doivent savoir que notre pays manque de tout et même l’Etat n’y est pas bien bâti. Ayons pitié de ce pauvre pays et de son peuple et soyons sérieux. C’est dans la confrontation des idées et projets et non la fuite qu’on pourra trouver des solutions pour notre pays.
www.lemohelien.com: Que viennent faire encore les notables et Oulémas de Grande-Comore dans cette affaire déjà très compliquée d’associer, sans associer Anjouan et Mohéli?
Saïd-Ahmed Saïd-Abdillah:
Quand les politiques manquent de tact et de courage les autres prennent les relais. Ils pensent peut –être qu’ils peuvent constituer un pont entre les politiciens. Nous devons éviter de trop brouiller cette histoire des assises. Ils risquent de nous mener en arrière, loin de 2002. Nous devons aller vite et essayant encore de convaincre, c’est le premier d’ailleurs du comité de pilotage, les hésitants et les sceptiques. Ils ne peuvent pas laisser les autres airer en envoyant de lettre à l’OUA, à l’ONU ou ailleurs. On est entre comorien, parlons et trouvons un terrain d’attente en mettant fin nos calculs purement politicienne.
www.lemohelien.com: Votre allié Saïd Larifou dit dans les hameaux et villages que la présidence tournante est un obstacle à son «émergence», réduite à des discours creux et à de la danse? Le suivez-vous dans cette direction mensongère et dangereuse?
Saïd-Ahmed Saïd-Abdillah:
Je pense que chaque d’entre nous à sa manière de voir la situation de notre pays. Il explique son point en amenant sa contribution et sa vision des choses aux Comoriens. Je le respecte et je l’encourage à continuer. Est –ce que la « tournante » est un obstacle à l’ « émergence » de notre pays ? Je pense qu’il n’est pas la seule personne à y penser sauf qu’il le lie à une objectif précis. Ce qui est noble de sa part. Je ne vous rappelle pas le premier à mobiliser tous les Comoriens en voulant supprimer la « tournante » c’est le président Ahamed Mohamed Abdallah Sambi. A défaut d’avoir gagné, il s’est octroyé une année de plus en violant la notion élémentaire de droit que vous connaissez mieux. Je vous le redis le problème des bruits que vous attendez aujourd’hui ne sont pas liés aux assises ni aux projets. Il y a des gens aux Comores qui croient eux, ils peuvent tous faire et tous réclamer et les autres non. Nous ne pouvons pas accepter cela, jamais.
L’émergence c’est quoi ? C’est le développement économique et social de notre pays jusqu’à arriver à un niveau plus proche des pays développées. Pour cela, nous devons avoir une politique économique nationale en harmonie avec une croissance élevé, plus de 5 pas 1 comme actuellement. Pour y arriver, nous devons favoriser la production en ayant une gestion saine de nos ressources et surtout en mettant en ordre nos institutions et notre administration nationale. On peut avoir le plein emploi aux Comores d’aujourd’hui, en mettant tout le monde au travail mais pas avec nos institutions d’aujourd’hui : quatre exécutifs, quatre parlements et quatre gouvernements et trois vice-présidents pour juste 856.000habitants et moins de 20.000 fonctionnaires. Vous pensez réellement qu’on peut faire émerger un pays dans ce désordre ? Nous sommes dans un pays où l’horaire hebdomadaire de travail n’est pas connu, 35 heures, 45 heures comme nous le proposons ou 15 heures comme nous le voyons au pays. Dans nos villes et villages, nous ne connaissons pas qui est agriculteur, qui est pêcheur, qui est qui et combien il gagne par mois ? Comment établir une analyse économique fiable et réelle dans ce désordre ? Il nous faut s’asseoir et les assises en ont une chance pour nous afin de parler et de trouver une solution réelle pour mettre en place des institutions et un Etat viable et fiable. Nous avons beaucoup de chantier devant nous et arrêtons de top palabre et mettons-nous à l’ouvrage.
www.lemohelien.com: Le désastre économique, social et institutionnel actuel (n’oublions pas la suppression de la Commission anticorruption et de la Cour constitutionnelle) ne vous inquiète toujours pas, et y continuez-vous à soutenir «l’émergence verbale et dansante»?
Les Comores se comportent mieux aujourd’hui qu’hier même si tout n’est pas rose. Pour la commission d’anticorruption, je pense qu’il n’avait aucune utilité sauf à creuser encore plus les caisses de l’Etat. Le problème de notre pays n’est pas lié aux pléthores des institutions qui n’ont aucun rôle que la figuration en augmentant la corruption. Je m’inquiète plus pour vos attitudes à vouloir voir le mal partout et en essayant de l’attiser un peu plus. Je pense et j’en suis convaincu que les Comores ont plus besoin de notre unité que de notre division. Personne ne saint et chacun à un lot de défaut qui lui colle au cou. Mais prenons l’homme d’action comme un bœuf qu’on a égorgé où rien n’a été jeté même le sang et les merdes (à servis comme engrains). C’est en ayant cette esprit d’unité et d’implication et surtout de la parole de notre prophète Muhammad, paix et bénédictions d’Allah soient sur lui et sa famille qui dit « Soutiens ton frère lorsque il accomplit la justice et l’injustice. » Les compagnons du prophète lui avait posé la question que dans l’action juste, on sait comment faire mais dans l’injustice ? Il a répondu, il faut l’arrêter de le faire. A aucun cas nous ne pouvons manquer à notre devoir, celui de servir notre pays. Certes, en servant le pays, on aide le chef de l’Etat, mais avant tout les Comores et le peuple comorien. N’ayons pas toujours la vue sur les personnes devant nous mais la tâche qui nous incombe afin d’accomplir notre devoir. Si à chaque soldat qui s’engage regarde d’abord qui est son commandant, aucune guerre n’aura été gagnée.
Propos recueillis par ARM