Les échos de l’actualité m’ont renvoyé ces mots de titre, premiers mots de L’oncle Archibald, de Brassens.
Chacun aura remarqué l’emploi systématique, fallacieux, maniaque, qui est fait du mot vrai par une caste habituée à une longue tradition d’imposture et pressée désormais de se donner une apparence d’honnêteté, comme s’il était possible avec quelques pincées de bicarbonate de dissiper les effluves putrides d’une charogne de bœuf.
Un vrai sentiment, une vraie idée, une vraie volonté, une vraie décision, un vrai programme, un vrai courage, une vraie joie, un vrai ceci, un vrai cela, interminable et pauvre liste mise bas par une clique charlatanesque. Il n’y a plus une phrase sans ce mot presque toujours inutile, sans ce grimage semblable à celui que doit s’appliquer une hétaïre décatie pour camoufler ses rides, ses yeux caves et son morne désœuvrement.
L’arracheur de dents, Jan Steen, 1651
Ce mot invariablement placé en épithète, c’est une incontinence verbale, une diarrhée chronique, une épidémie de poux propagée par l’engeance politique - relayée par une certaine meute de journaleux de cour -, pour tenter de dissimuler les monstrueux édifices de mensonges qui menacent maintenant de s’effondrer, mangés par les mêmes parasites qui les ont érigés.
Depuis des décennies que les arracheurs de dents installés à la tête de la Cité font leur métier de tromperie et de mystification, il ne faut pas s’étonner que le petit peuple qui les écoute sagement, bravement, parfois même avec une sincérité touchante, y ait perdu un peu de sa denture.