Après avoir vu à la télé une émission
Consacrée à la situation que nous vivons
Tous dans nos vies, dans nos familles, nos professions
J’ai envie de crier mon merci à plein de gens
À commencer par ceux de la première ligne de front
À toi personnel de santé et soignant
Que vous soyez prof agrégé ou assistant
Médecin généraliste ou grand patron
Chef de service, infirmier ou résident
Pharmacien, aide-soignant ou intendant
Secrétaire ou tout autre métier y afférent
Exerçant en ville ou dans une institution
Citoyen africain, européen ou de tout autre continent
La Covid-19 a remis les horloges à l’heure en nous rappelant
Que, de cette Terre, nous devrions être les solidaires enfants
Un signe en est que la plupart parmi nous suivent, en temps réel, scotchés, sa propagation
Avec la peur au ventre qu’il les contamine, avec leurs ascendants et descendants
Et, sûrement, il va remettre beaucoup de choses en question
Seront mises en cause, beaucoup d’habitudes, beaucoup de convictions
Conséquence, entre autres, des interactions humaines directes, avec leur réduction
Et leurs impacts sur le vivre-ensemble, l’économie et son internationalisation
Et du fait qu’il est devenu crise sociale, économique et politique, simultanément
La crise sanitaire qu’il a déclenchée a mis le monde à l’arrêt, semant la désolation
Ébranlant nos certitudes, notre quotidien, notre rapport aux autres, suspendant le temps
Nous forçant à reconsidérer nos besoins courants, dans un général ralentissement
Sur fond de confinement, amplifiant les fragilités de notre civilisation
Situation inédite qui pourrait la conduire jusqu’à la rupture, jusqu’à l’éclatement
Nous invitant urgemment d’arrêter, de ce que nous avons hérité du passé, le bilan
De veiller à y séparer le bon grain de l'ivraie et de ne garder que ce qui est bon
De tirer profit de nos erreurs et d’en tirer les nécessaires enseignements et leçons
Pour bâtir un modèle redonnant un sens au progrès, avec un solidaire horizon
Comme on dit chez nous « Le croyant ne se fait pas piquer par le même scorpion, doublement »
Toutes ces crises s’emboîtant dans l’état de notre affect et de nos sentiments
Se succédant sur le terrain, tous les jours, pour confirmer une déclaration
Du Prix Nobel d’économie, Esther Duflo : «Tout ne recommencera pas comme avant» [1]
Dont le dernier livre, Économie utile pour des temps difficiles, est prophétisant
Esther, spécialiste de la pauvreté et fille de Michel Duflo, soit dit en passant
Mathématicien, académicien, ami de longue date de notre Département
l’Histoire nous a appris que les grandes peurs engendrent les grands chambardements
Débouchant sur d’inédites politiques et sociales transformations
Altérant les stratégies géopolitiques et le système financier courants
Déjà, au sein de l'UE, il a provoqué une fissure dans sa cohésion
Et affectera la répartition mondiale du travail, également
Suite à la crise des masques, des tests et des médicaments, particulièrement
Qui a montré aux États européens qu’ils ne sont pas autosuffisants
Que leur intérêt est de coopérer avec les pays qui n’ont pas d’ambition
Hégémonique et qui se situent dans leur voisinage régional, immédiatement
Surtout les pays possédant un tissus industriel et technologique conséquent
Et, je suis sûr que la proche Afrique va en tirer profit, certainement
En intégrant l’Usine du monde dominée par la Chine, actuellement
Ce qui pourrait aboutir à l’émergence d’un partenariat régional pertinent
Façonnant autrement les certitudes ancrées de l’actuelle mondialisation
Mondialisation qui nous a fait découvrir son pire et son meilleur à l’occasion
De cette pandémie qui a bouleversé l’ensemble des internationales relations
Le pire c’est qu’un affecté zéro arrive à menacer l’humanité, globalement
Le meilleur c’est la certitude que notre salut n’est acquis que solidairement
Contre la Covid-19, ensemble, nous gagnerons, ou, ensemble, nous perdrons
Face à cet ennemi, nous devrions nous coordonner unitairement
Faire front commun et surmonter nos divergences, différences et divisions
Mettre en place une solidarité sanitaire internationale, impérieusement
Aboutir à une sécurité sanitaire mondiale, tôt ou tard, nous devrions
Les problèmes des uns sont ceux des autres, le SARS-CoV-2 l’a prouvé, trivialement
Ce microscopique organisme est venu nous le rappeler, morbidement
Ce que la malnutrition, entre autres, n’a pu le faire, bien qu’elle décime terriblement
Une dizaine de millions d’êtres humains dont le tiers sont des enfants, annuellement
Conséquence de notre indifférence à l’égard de ce qui se passe ailleurs, lointainement
Comme si nous n’étions pas égaux devant les souffrances et les malheurs, par relativisation
Comme si l’impact que pourrait avoir tout fléau dans des sociétés plus prospères est plus grand
Comme si mourir de faim serait banal, alors que mourir de la Covid-19 est affligeant
Terrible constat qui n’a fait que croître l’indifférence, voire la déshumanisation
Il a pu le faire, car, il est à nos portes et nous fait penser à la mort journellement
Il fait rôder la faucheuse dans nos contrées, du nord au sud, du levant au ponant
Que l’on soit le champion du PIB ou sa lanterne rouge, sans distinction
Une fois vaincu, il est probable qu’il nous poussera à vivre plus humainement
Pour remporter cette guerre, collectivement nous devons répondre présent
Il n'y a aucun doute qu’ensemble nous tomberons ou nous résisterons
Profitons-en pour faire évoluer l’Humanité significativement
Vers un ordre où la place de l’humain prime sur les nations en compétition
Et le réflexe du « chacun pour soi » dont se nourrissent les populismes rampants
En la soustrayant à la concurrence et aux rivalités entre les puissants
Qui ont fait de l’ONU, dans la crise sanitaire que nous vivons, le grand absent
Instance dont la raison d’être et la mission sont de gérer les crises, justement
Mais la Covid-19 exacerbe leurs antagonismes qui étaient déjà présents
Mais, en attendant, sachez que votre pays vous est reconnaissant
Pour les efforts que vous déployez en ce moment
Confrontés à une charge de travail sans précédent
Dans la fatigue, les répits devenus inexistants
En raison des urgences, se succédant régulièrement
Alternant les gardes et les auto-confinements
Loin de ceux que vous aimez, généralement
Pour leur éviter une éventuelle contamination
Travaillant dans un cadre professionnel des plus stressants
Afin d’éviter cette hécatombe commençant
À investir certains pays, certaines régions
En vous donnant à vos malades entièrement
En sacrifiant votre vie sociale de parent
De père ou mère, de conjoint ou de soupirant
En mettant en danger vos propres vies, continûment
Côtoyant le SARS-CoV-2 quotidiennement
Exposé sans cesse, à tout instant, à la contagion
Avec une protection insuffisante, le plus souvent
Rendant le quotidien de vos proches angoissant
L’OMS n’a-t-elle pas reconnu, il n’y a pas longtemps
Lors de l'épidémie d'Ebola, il y a six ans
Que vous avez 20 fois plus de risques, minimalement
D'être infectés que la normale population [2]
Merci pour votre formidable mobilisation
Mettant tout en œuvre pour remplir votre mission
Malgré des moyens de première nécessité manquants
En dépit de la pénurie d’essentiels équipements [3]
Vous êtes l’espoir du retour à notre vie d’avant
Vie tranquille avec travail, loisirs et bon temps
Respects pour votre service rendu à votre Nation
Avec noblesse, abnégation et dévouement
Dans un hostile et dangereux environnement
En souhaitant que vos gouvernants se rappelleront
Une fois la pandémie vaincue définitivement
La situation revenue, un tant soit peu, normalement
Que la Santé publique ne doit pas rester le maillon
Faible du système qu’elle a été jusqu’à maintenant
En améliorant vos conditions sur tous les plans
En mettant à niveau vos sanitaires établissements
Qui souffrent aujourd’hui d’un manque de ressources important
Surtout que SARS-CoV-2 n’est pas probablement
Le dernier virus dévastateur que nous verrons
Que tous ces officiels qui font assaut de compliments
Envers vous sachent que vous avez besoin principalement
Des moyens pour remplir votre mission correctement
Pour pouvoir soigner vos patients convenablement
Qu’ils sachent que vous ne vous êtes dérobés nullement
Sur les secours à leur apporter, urgemment
Malgré le manque flagrant de matériel de protection
Vous avez tiré la sonnette d’alarme, des années durant
À propos du système hospitalier et sa dégradation
Qui a vu la compression de son coût de fonctionnement
Et s’il tient encore, c’est parce que vous fûtes résilients
Et, pour vous aider, plions-nous au confinement
Contrainte insignifiante face à votre engagement
Face aux souffrances des « covidés » en réanimation
Mais, principale mesure pour stopper les infections
Sinon, c’est Al Kâfn [4] qui, au bout des rues, nous attend
Son non-respect risque de vous transformer en patients
Scénario-catastrophe dépassant toute imagination
Combattons ces « déconfinés » prématurément
Ne respectant pas les sociales distanciations
Pressés de retrouver leur vie comme avant, insouciants
Abrutis, irresponsables, du danger, non conscients
Qu’ils soient citoyen lambda, ministre ou président [5]
Je ne pourrais terminer ce poème consacré à un sujet qui a tant
Bouleversé la vie de l’humanité entière, radicalement
Sans une pensée pour ceux qui ont fermé les yeux lors du confinement
Qu’ils soient partis emportés par la Covid-19 ou autrement
Sans avoir eu droit à un adieu, qui sont partis dans l’isolement
Foutu virus qui a imposé ses conditions dans les enterrements
Qui a altéré nos conditions de vie et notre sociale dimension
Ainsi que les relations qui font notre humanitude, profondément
Saloperie qui a montré qu’elle ne fait aucun cadeau, absolument
Imposant à sa victime ses attaques venant de partout, à tout instant
Enfantant des infections opportunistes, même hors des poumons
Apparaissant donc comme plus qu’une simple pulmonaire affection
Véritable Cheval de Troie qui avance en se dissimulant
Comme une métastase, s’activant dans l'organisme silencieusement
Avant de l’exploser, de façon foudroyante, dans toutes les directions
En l’asphyxiant, dégradant les reins, le cœur et le centre de la raison
De mémoire d’archiatre et d’historien, on n’a jamais vu pareillement
Elle a gagné en privant les défunts de leurs proches, totalement
En privant leur famille, leurs amis,….de se soutenir collectivement
En leur faisant perdre les marqueurs de leurs sentiments, de leur attachement
Sans moment de recueillement partagé, ni de tactiles interactions
Ni de poignées de mains, ni d’accolades, ni d’au revoir, physiquement
Au partant au ciel, sans lui donner un dernier baiser, sur le front
Sans lui tenir la main pour le réconforter, tout simplement
Salah HORCHANI
[3] Un inventaire non exhaustif des besoins peut être trouvé dans le lien suivant :
plus explicitement, « ces besoins sont de deux genres :
- Un matériel de protection du personnel : masques FFP2, masques chirurgicaux, blouses chirurgicales, casques visières, sur-chaussures, gants propres, gants stériles…
- Un matériel de prise en charge des patients : une ambulance médicalisée, des respirateurs de réanimation, des respirateurs de transport, des moniteurs de surveillance, des stations de pousse seringues électriques, des oxymètres, des thermomètres infrarouge, des appareils électroniques de prise de la tension artérielle des échographes mobiles, des échographes portatifs, des lits de réanimation à trois articulations, des matelas anti-escarres adaptés à ces lits, des débitmètres d'oxygène avec barboteur, des kits d'aspiration murale, des aspirateurs mobiles, des appareils de radiographie, des lits brancard, des brancards de déchoquage », des équipements de surveillance à distance (scope) pour diminuer les entrées et sorties dans les chambres infectées, etc.
[4] « Al Kâfn » est la transcription phonétique du mot arabe « الكفن» qui signifie « linceul ».
[5] https://www.universnews.tn/a-la-une/les-mauvais-exemples-viennent-de-saied-et-mekki/