Depuis dimanche soir, je m'inquiète encore plus du monde dans lequel mon fils de neuf ans va (sur)vivre: sommé de penser en premier de cordée, de se rêver en milliardaire jouissant de ses richesses méritées contre tous; d'avoir une Rollex avant quinze ans -sinon il aura raté sa vie-; d'avoir monté sa start-up flexible et innovante à vingt ans... ou traité en paria parce que métis, si ce sont les commandos de la Marine (Le Pen) Nationale qui sont appelés à faire la loi à l'école, dans la rue, dans les entreprises, dans les cerveaux. Et bien sûr, et en tout premier, dans les commissariats, où les forces de l'ordre, comme toujours, feront régner l'ordre, quelque soit l'ordre.
Dire que j'en veux à Cadet Rousselle, Jadot et Hidalgo d'avoir fait, en priorité, barrage à la gauche, est un euphémisme. Ces trois histrions ont en conscience provoqué l'inéluctabilité du seul "choix" dans lequel nous allons devoir nous débattre, Macron ou Le Pen:
Celui qui ne peut, congénitalement, concevoir qu'on puisse avoir envie de rester humble, modeste, dénué d'appétits carnassiers, qu'on ait juste envie d'être utile à quelque chose, à quelqu'un, à la planète... Et qu'on ne l'envie pas d'avoir "réussi", car sa réussite est un naufrage (la gloire est le deuil éclatant du bonheur, disait de Napoléon Madame de Staël). Le Président de la République Française ne devrait-il pas être un modèle, plutôt qu'un repoussoir ? Quelqu'un qui inspire, non pas qui désespère ? Qui suscite et libère les énergies collectives, et non pas les voracités pathologiques dont nous sommes accablés ?
Ou celle qui, profitant des impasses où nous ont conduit -au nom du maintien à tout prix de la "paix sociale"- des politiques inavouables, rassemble autour d'elle tout ce que le pays compte d'admirateurs et de continuateurs des "soldats perdus de la République", nostalgiques de la France coloniale, revanchards des guerres perdues pas-par-nos-armées mais par la faute d'un parlementarisme de pleutres ? Que l'on ne se permet plus de qualifier de fasciste, comme si elle n'était plus entourée que de matous câlins, et pas de nazis, néo ou tradis. Celle qui remettra au goût jour les ratonnades, au nom du maintien de l'ordre bien sûr. Celle qui, ayant tant cajolé le peuple français, le placera sans états d'âme sous le joug de petits et grands patrons amateurs d'ordre et de poigne.
Voici donc ce que l'on doit aux nains politiques que Madame Royal a si justement décrits. L'Huma d'hier n'a pas hésité à écrire que Fabien Roussel avait "redonné des couleurs à son parti".
Sans doute, mais quel est donc son parti ?