Elle a raison, Nathalie, il faut repérer et traiter ceux qui ne sont pas Charlie, ceux qui dans certains établissements scolaires ont refusé la minute de silence. Les repérer, en plus, ça ne devrait pas être trop dur. Tout à fait à la portée de la DGSI. Ainsi, moi, par exemple, qui ne suis pas allé marcher dimanche. Déjà, j'ai horreur de la marche. On m'aurait dit: on va faire un footing, et ensuite on tapera un foot à la Nation avec les potes, Angela, Ali Bongo, Bibi, Manuel et les autres, je dis pas... Je serai peut-être venu. Mais se traîner à 2 à l'heure rien qu'avec des citoyens supérieurs, éclairés, conscients, bien propres dans leurs idées et qui s'appellent tous Charlie, ça m'a rien dit sur le coup. Alors, je suis allé à Ikéa, parce que j'avais besoin de trucs qu'en fin de compte j'ai pas pu acheter parce que les soldes, en ces temps pourris, c'est plus vraiment les soldes... Mais bon, j'avais besoin de ces trucs et je suis allé à Ikéa. Je m'étais dit comme ça: c'est le moment... Y aura personne, ils sont tous à la manif pour témoigner à quel point la République est en danger et à quel point on a assassiné la liberté d'expression, et à quel point on se laissera pas faire. Y aura personne, et je pourrai m'acheter mes trucs vite fait, ensuite j'irai voir sur Bêêê FM combien y avait de Charlie derrière Charlie Hollande, Charlie Abdallah II, Charlie Orban et Charlie Davutoglu.
Mais ce que j'avais pas prévu, c'est qu'en réalité, c'était bondé de non-Charlie, rien que des gens qu'avaient besoin de trucs qu'en fin de compte ils ont pas pu se payer. Et c'est là que j'ai compris ce qu'a voulu dire madame Saint-Cricq, même si elle l'avait pas encore dit: il faut repérer et traiter. Parce que, pour le coup, ça se voyait comme le nez au milieu de la figure que c'étaient que des pas-Charlie: mal rasés, hirsutes, menaçants, rôdants tels des djihadistes déguisés en consommateur suédois moyen entre les canapés et les meubles télé... Et les meufs en poussette avec des chiares à bouille d'apprentis terroristes dedans... Croyez-moi, y avait de quoi repérer et traiter, ce dimanche à Ikéa. Et quand je pense que ça devait être au moins pareil à Conforama, chez Darty !
(Bon, quelle idée aussi de défendre la démocratie pendant les soldes !...).
J'en viens à la minute de silence. J'étais en train de la commencer, tranquille, quand le portable a sonné. Bêtement, je reconnais, j'ai décroché. C'était la belle soeur. T'es où, qu'elle a dit ? Je suis dans la minute de silence, j' ai répondu. Ah bon, elle a fait, c'était juste pour savoir. Rappelle quand t'as fini.
Hier, c'est tout comme: je ne suis pas allé acheter Charlie. Quand j'ai vu la queue devant le kiosque, avec que des gens morts de honte qu'en profitaient pour planquer Closer ou Libé entre deux Charlie... Je me suis dit: y en a tellement qui se sont vendus que je vais bien en trouver un dans le métro... Mais j'ai vite arrêté de me pencher pour regarder sous les banquettes, quand j'ai vu que les gens commençaient à paniquer.
Finalement, j'en ai trouvé un, mais c'était un vieux d'avant Philippe Val, aucun intérêt.
Sur ce coup là, c'est sûr, j'ai merdé. Mais je suis bien décidé à me rattraper le coup d'après. Si y a des allumés qui s'attaquent un jour au Courrier Picard, je serai Courrier Picard sans hésitation. Et tout sera pardonné, j'espère...