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Billet de blog 18 décembre 2022

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Identité plurielle, arabesque et Lions de l’Atlas

L’épopée marocaine lors de cette coupe du monde 2022 est venue donner les preuves tangibles qu'aujourd'hui comme hier les porteurs d’une identité plurielle participent au-delà des frontières à l'édification d'un monde en tant que lieu de rencontre, lieu d’échange et lieu de paix durable.

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 Identité plurielle, Arabesque et Lions de l’Atlas

L’épopée marocaine lors de cette coupe du monde 2022 est venue donner les preuves tangibles qu'aujourd'hui comme hier les porteurs d’une identité plurielle participent au-delà des frontières à l'édification d'un monde en tant que lieu de rencontre, lieu d’échange et lieu de paix durable. De par leur histoire personnelle, beaucoup de nos héros nationaux ont fait l’expérience d’une identité qui s’est construite dans l’expérience même de la frontière qu’elle soit réelle ou symbolique. Ainsi, notons que d'une part quatorze des vingt-six joueurs de notre équipe nationale du Maroc sont des binationaux et notons par ailleurs que la plupart de nos héros ont pu faire l'expérience de la migration de manière direct ou indirecte ainsi que / ou de plafonds de verre dans leur sociétés d’accueil ou de naissance. Outre leur exploit historique sur le terrain, l’une des plus grandes victoires que nos Lions aient remportée au niveau monde lors de cette compétition est celle d’être parvenu à déconstruire une conception totalement exclusive, imperméable et infranchissable de la frontière. En mode chaâbi Abdelaziz Stati 3tiwni lvisa ou lpassport ! Une autre grande victoire a été de nous avoir ouvert sur un espace entre-deux qui à l’heure de la mondialisation est à être entendu dans son sens étymologique d’intérieur-de-deux en mode bien à l’aise dans leurs crampons que sont le Maroc et leur pays d'accueil ou de naissance. Merci Puma !

L’un des premiers remarquables buts que nos joueurs ont marqué lors de cette coupe du monde a été de présenter la frontière en tant que limite commune. Ce qu’est venu chuchoter à nos cœurs l’épopée marocaine lors de cette coupe du monde est que la frontière n’est ainsi pas à être envisagée exclusivement en termes de séparation mais également en termes de lieu commun que je partage avec l’autre. En témoigne le soutien chaleureux et plein d’espoir qu’ont reçu nos Lions de l’Atlas de la part de Marocains mais également de millions de citoyens originaires de pays allant du Sénégal à l’Indonésie, en passant par l’Italie, la Turquie, les Emirats, la Palestine et Israël tous unis l’espace de quelques matchs derrière le fameux slogan Siiiiiiir (Allez !). De quoi faire tomber des murs insh’Allah! Nos lions de l’Atlas ont incarné dans tout leur être le porteur d’une identité plurielle qui ne cesse durant son périple de prendre conscience dans son expérience de la frontière que si cette dernière constitue bien une ligne de séparation, elle n’en demeure pas moins une ligne constituée d’une multitude de petits points de convergence et de rencontre potentiels avec cet autre qui fait partie de sa communauté de destin. Ya zina diri latay diri latay !

Dans la même trajectoire, un autre but décisif que nos joueurs ont marqué lors de cette coupe du monde a été de présenter la frontière en tant qu’espace entre-deux dans son sens d’intérieur-de-deux. La frontière vient ouvrir sur une réalité commune entre diverses appartenances dont le porteur d’une identité plurielle se fait l’ambassadeur. Ainsi Walid Regragui le sélectionneur de l’équipe marocaine déclare dans une interview portant sur les binationaux de son équipe: “ils parlent aussi le néérlandais, le français, l’italien ou l'espagnol. Mais au final ils ont tous un cœur marocain. (...) Hakim Ziyech, Noussair Mazraoui, Sofyan Amrabat et Zakaria Aboukhlal sont nés aux Pays-Bas. Ils ont été formés là-bas et vous pouvez le voir. (...) Ce sont des joueurs créatifs qui pensent d’une certaine manière.” Le porteur d’une identité plurielle porte en lui cette ouverture sur l’intérieur de plusieurs mondes. Le porteur d’une identité plurielle porte en lui une ouverture sur un espace créatif et inclusif de reformulation de normes et de valeurs intégrées. Le porteur d’une identité plurielle fait de cette frontière une arabesque. Si si on a osé le mot! Une arabesque dans son sens d’une ligne directrice idéale nous ramenant au cœur du beau comme en témoignent nos Lions de l’Atlas de tout leur art sur le terrain pendant les matchs. Une arabesque qui nous ramène au cœur de notre humanité même en mettant à l’honneur la place des femmes dans le monde patriarcal du football et en rendant aux mamans ce qui est aux mamans, à savoir chaque victoire de nos vies ! 

Coup de sifflet! Stop ! Arrêt de jeu! Some people can’t take it anymore! Bezaf ! Une petite pause s’impose ici ! Lions de l’Atlas, Maroc, identité plurielle, limite commune, point de convergence, intérieur-de-deux, arabesque, ligne directrice idéale, beau, humanité, femmes…De quoi faire sortir de leur orbite les yeux d'un certain Z comme zero et autres partisans de la haine et de frontières en tout genre! Panique! Ils risqueraient de sentir leur cœur battre à nouveau à l’unisson avec le monde ! 

Racontée par nos Lions avec une majestueuse humilité et dévorante passion sur le terrain, cette épopée marocaine présente au monde l’histoire de cette rivière née de la fonte des neiges et des blocs de glace dans les montagnes de l’Atlas au Maroc qui tout en déconstruisant toutes perceptions exclusives des frontières, nous jette avec elle par la force du destin dans l’océan de l’Amour et du Beau. Avoir une identité plurielle c'est porter en soi le cadeau en puissance que nous fait le ciel de pouvoir vivre deux fois une première fois. Tout cela avec la même ardeur, le même émerveillement, la même innocence. Merci donc à nos Lions d'avoir été les ambassadeurs de la magie de la Vie. Merci pour ces premières fois. Merci pour ces moments d'émerveillement, pour ces moments d'innocence, pour cette passion. Merci pour les sourires que vous avez dessinés sur les visages ainsi que pour les mains que vous avez fait se joindre. Merci pour cette aura, pour cette alchimie, ces valeurs d'humilité, de persévérance, de respect et de solidarité. Merci pour ce rêve collectif éveillé. Merci pour le beau ! Merci pour ce torrent d’Amour qui nous a emporté avec vous ! Vous avez gagné nos coeurs, déconstruit les frontières, marqué l'histoire et conquis le monde ! 

Salima Bouyarden, Docteure de l'Université de Strasbourg
Spécialisée sur les questions de l'Identité et de la Mondialisation

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