salomis (avatar)

salomis

Abonné·e de Mediapart

117 Billets

0 Édition

Billet de blog 5 avril 2019

salomis (avatar)

salomis

Abonné·e de Mediapart

AU PALAIS DE JUSTICE DE PARIS: RETOUR DE L'AFFAIRE MERAT. Par Abdenour DZANOUNI

Le procès en appel du frère de Mohamed Merah, Abdelkader, son présumé mentor, et de Fetah Malki, le fournisseur d'une des armes et des munitions ayant servies aux crimes, s'est ouvert lundi, 1er avril 2019. Nous avions, il y a un an et demi, fait le compte rendu circonstancié du premier procès;

salomis (avatar)

salomis

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Notre article, étayé par des éléments d’enquête inédits, prouvait que toute la lumière n’avait pas été faite sur les assassinats de Toulouse et Montauban. Pire que la recherche de la vérité a été entravée délibérément et non pas par un vulgaire "dysfonctionnement", comme ils disent. Afin de rétablir cette vérité, nous livrons ces "Eléments pour une contre-enquête sur l’affaire Mohamed Mérat". Pour mémoire, la cour d'assises spéciale de Paris a jugé, en octobre 2017, les deux co-accusés pour association de malfaiteurs terroriste criminelle et de chef de complicité des sept assassinats perpétrés par Mohamed Mérah les 11, 15 et 19 mars 2012 à Toulouse et Montauban. A l'issue de cinq semaines d'audience, la cour spéciale avait condamné Abdelkader Merah à 20 ans de réclusion, la peine maximale pour association de malfaiteurs terroriste criminelle, et Fetah Malki à 14 ans de réclusion. Les jurés les avaient acquitté du chef de complicité des sept assassinats. Pourquoi? La cour spéciale a été saisie par le doute, doute que nous partageons, et dit la loi: « le doute doit profiter à l’accusé ». L’accusation avait fait appel.

PALAIS DE JUSTICE DE PARIS, MERCREDI 2 OCTOBRE 2017. Qui est ce jeune homme de 23 ans qu’on voit dans une séquence diffusée des centaines de fois, en boucle, sur les chaînes câblées ? Un chômeur qui joue au rodéo, sur un terrain vague, dans une carcasse de voiture si pourrie qu’on n’en voudrait pas à la fourrière. Hilare, Mérat Mohamed, est tout fier de soulever de la poussière dans un crissement de pneus, il jubile de faire un tête à queue. Cette scène éculée, imitée d’un mauvais polar, laisse deviner le mec barré, le frimeur de peu, le fanfaron misérable, « Kolèze » dirait-on en argot algérien. Ce personnage fruste, en quête d’un rôle pour exister, se fait filmer.

Délinquant occasionnel, quelques larcins le mènent aux portes du commissariat où il est astreint à pointer régulièrement pour y faire son rapport oral sur l’animation délictuelle du quartier, rien de plus que les potins de la vie délinquante ordinaire. Auprès de sa sœur Aïcha, qui témoigne à qui veut bien l’entendre, il se réclame de son fier emploi : indicateur, balance, « chékèm » dirait-on en argot algérien.

Ainsi, lors d’une de ses conversations routinières avec l’officier de police chargé de son suivi de droit commun, il se lâche et se vante d’être le parent d’Ahmed Zaoui, fondateur et chef du Groupe Islamique armé (GIA) , membre de la direction du Front Islamique du Salut (FIS), pressenti pour être ministre de l’hydraulique du premier gouvernement islamiste, avorté après les élections truquées par l’ancien président Chadli Bendjedid et son ministre de l’intérieur. Elles furent annulées après le premier « mauvais tour » joué et perdu par les islamistes,

Peu avant les élections législatives, de janvier 1992, La FIS dont le projet était l’instauration d’un Etat Islamique déclarait que « La démocratie était impie en Islam, haram ». Cohérent, il avait appelé à boycotter le référendum portant sur l’adoption de la constitution de février 1989 qui instaurait pour l’essentiel, la liberté de presse et le multipartisme. « Notre constitution est le Coran », clamait les manifestants en chœur .« Etat Islamique » se traduisant en arabe au féminin par « Doula islamiya », ses supporters scandaient « Pour « elle » je vis, pour « elle je meurs ! » (‘Aliha nahya, ‘aliha namout ! » ). L’un d’eux me disait en ricanant : « Si le FIS ne prend pas le pouvoir par les élections, il se transformera en SIF (épée en arabe) et le prendra de force. »

Cela résume assez fidèlement la stratégie de ce parti qui se divisait en deux tendances quand à l’option à suivre pour arriver au pouvoir. L’une soutenait qu’il fallait par ruse_ La ruse étant licite en Islam, selon ses partisans_ aller aux élections puis, arrivés au pouvoir, abolir le système nouvellement institué et le remplacer par un Etat Islamique. Soit utiliser l’opportunité des élections comme une échelle pour accéder au gouvernement puis retirer l’échelle et instaurer une dictature théocratique définitive. L’autre tendance préconisait de ne pas se soumettre à la loi des hommes, pour ne pas avoir à leur rendre comptes, mais imposer par la forcela Loi de Dieu contenue dans le Coran, croyaient-ils. C’est, à la virgule près, ce que Mérah Abdelkader déclare le jeudi, 20 octobre 2017, à ses juges qu’implicitement, il ne reconnait pas.

En Algérie, les partisans de la ruse et ceux de la force se divisaient non sur l’objectif, mais sur les moyens d’y parvenir. L’échec des partisans de la ruse allait consacrer cette scission. Dans les jours qui suivirent l’annulation des élections législatives, deux organisations armées rivales sortent de l’anonymat. l’Armée Islamique du Salut (AIS) et le Groupe Islamique Armé, dont un des chefs et fondateur est Ahmed Zaoui qui allait semer la mort, partout la mort, toujours la mort, et brûler les usines et les écoles « Au nom d’Allah ».

LA FULGURANTE ASCENSION D’UNE PETITE FRAPPE

Revenons au commissariat de Toulouse où Mohamed Mérat se vante d’être parent d’ Ahmed Zaoui. Nous sommes en 2010. L’agent de police , très professionnel, transmet à sa hiérarchie, la précieuse information. Elle parvient sur le bureau du Directeur Régional du Renseignement Intérieur à Toulouse, Christian Balle-Andui. Dès lors Mohamed Mérat change d’officier traitant et sera suivi par « Hassen », analyste à la DCRI de Toulouse. L’information est remontée jusqu’au Directeur Central du Renseignement Intérieur à Paris : Bernard Scouarcini qui cumule ce poste avec celui de conseiller en sécurité à l’Elysée.

Bernard Squarcini pouvait-il ignorer la demande de Christian Balle-Andui adressée, le 15 juin 2011, au Procureur de la République chargé de la lutte anti terroriste, proposant l’ouverture d’ une instruction judiciaire concernant Mohamed Mérah ? La judiciarisation est un acte suffisamment sensible pour que Bernard Squarcini n’ait pas été, au minima,mis en copie de la demande de Christian Balle-Andui. Pouvait-il ignorer que, quinze jours plus tard, le 29 juin 2011, Christian Balle-Andui a renouvelé sa demande. S’il l’ignorait, comme il l’affirme sans vergogne, qui donc a missionné au commissariat de Toulouse. deux fonctionnaires parisiens pour auditionner Mérat en présence de son officier traitant « Hassan ». Au passage, ils déchargent celui-ci du soin de rédiger la note de synthèse, s’en chargeant eux-mêmes.

Cinq années plus tard, le 19 octobre 2017, Bernard Squarcini, flagorneur et contrit, jure devant les juges de la Cour d’assises spéciale de Paris, qu’il n’a pas eu connaissance de cette note. Pourtant la chaîne de transmission des services a fait ce qu’il fallait de Toulouse à Paris, et le « feedback » en est l’audition de Mérat Mohamed par les deux fonctionnaires parisiens, en présence de son officier traitant « Hassan ». La cour n’a pas cru utile pour la manifestation de la vérité de l’interroger plus avant. Mais la preuve du pudding est qu’il existe ! Bernard Scouarcini, le conseiller en sécurité de Nicolas Sarkozy, s’ est intéressé à Mohamed Mérat, au moins six mois avant les meurtres de Montauban. Alors, pourquoi dit-il tout ignorer ?

En la circonstance, comme en règle générale, la question essentielle est comment l’information a été exploitée par le décisionnaire politique. Selon qu’il est adepte des coups tordus pour réaliser un gain personnel ou soucieux de l’éthique liée à la profession de protéger ses concitoyens, vous avez la réponse. Comment le savoir? Les deux fonctionnaires de Paris, appelés ici par défaut « Dupond et Dupont », pourraient être entendus, les parties en présence leurs poser les bonnes questions et la cour contribuer ainsi à la manifestation de la vérité tant réclamée par les familles des victimes. Pourrait-on confronter, à nouveau, les témoins du Renseignement Intérieure pour lever les graves contradictions nées de leurs déclarations ?

Qu’ils nous expliquent comment un vulgaire indic, ou « zéfèf », en argot algérien, se retrouve illico pris en charge par les fonctionnaires de Paris et presto dans les petits papiers de l’Elysée ? Quel mérite justifie la promotion fulgurante d’une petite frappe de pissotière toulousaine propulsée dans une alcôve en stuc et ors à l’Elysée ! Une telle ascension, à la seule faveur d’un lien de parenté hérité, est tout simplement inespéré pour le voyou! « Aux âmes bien nées, dit Rodrigue dans le Cid, la faveur n’attend pas le nombre des années. » adapterons-nous le vers à la situation. Il ne reste plus à Mérat qu’à mériter tristement de Zaoui.

LE VOYAGE INITIATIQUE OU LE TERRORIST’TOUR

Évoquons, pour ce que nous savons, le voyage initiatique, le retour aux sources de Mohamed Mérat à Médéa, ville antique, située à une soixantaine de kilomètres au sud d’Alger et à mille mètres d’altitude. Médéa, nommée ainsi à la gloire de la magicienne Médée qui aida Jason à s’emparer de la Toison d’Or et qui, dix ans plus tard, fut répudiée par celui-ci. Pour se venger, elle tua leurs enfants. Plus près de nous, Médéa, si paisible, est sortie de sa torpeur, émue par l’enlèvement et l’assassinat, revendiqué par le GIA, des moines de Tibérine, puis elle s’assoupit à nouveau. Mérat y va, sur les traces de son tristement célèbre parent, pour le village de Zenina où réside et officie l’imam Zaoui, père d’Ahmed et ancien membre de la direction du Front Islamique du Salut. L’imam a été, à la demande du président algérien Abdelaziz Bouteflika, le médiateur de la reddition des terroristes de l’AIS et du GIA qui sévissaient dans le maquis à l’entour. Une loi scélérate, dite de « réconciliation », avait été promulguée assurant l’impunité et une pension à vie pour les assassins.

Après Médéa, Mérat fait le Terrorist’tour du Moyen Orient avec une prédilection pour les sites touristiques comme les mosquées salafistes et les séjours dans les camps d’entrainement des terroristes. Qui sont ces sponsors et promoteurs de Mohamed Mérat qui s’emploient à organiser ses voyages d’études et de formation là où la carte de visite « prestigieuse » de son cousin lui sert de coupe fil. ? La mise en parallèle du calendrier des voyages de Mérat, consignés par les visas dans son passeport, avec les auditions, notes et rapports le concernant à la DCRI, laisserait entendre une autre musique que celle d’ascenseur servie aux familles des victimes et au public depuis la tragédie. Cessons alors de les prendre, comme Nicolas Sarkozy prenait les juges, pour des « petits pois » !

Ceci dit en aparté, adressez-vous à la Direction Centrale du Renseignement Intérieur pour consulter les carnets de voyages et reportages photographiques de Mohamed Mérat, ! Sous cette tutelle, son passeport grossit des visas d’Egypte, Jordanie, Syrie, Irak, Afghanistan, Pakistan… et, incroyable pour un Mohamed… Un visa pour Israël ! Par quel médiation formidable a-t-il obtenu son visa pour ce pays? « Visitez Tel Aviv et Jérusalem ! » dit la publicité mais ce n’est pas, vous dira-t-on à l’agence de voyage, pour la gueule d’un Mohamed, même vieux croyant musulman rêvant d’un pèlerinage pacifique à Jérusalem! Est-ce le Grand Rabbin de France qui s’est porté garant auprès de l’autorité israélienne de l’innocuité de la visite touristique d’un Mohamed Mérah, jeune oisif sans ressource ? Si ce n’est lui, qui cela peut-il bien être? Au vu de la suite des événements dont l’assassinat à Toulouse, au seuil de leur école, de trois enfants juifs et de leur père enseignant, l’ambassadeur d’Israël à Paris doit des explications à leur famille et à ses coreligionnaires. Qui a délivré, à Mohamed Mérah, le visa pour Israël et quelle est la personnalité qui l’a recommandé ? A la faveur de ce procès, la cour de justice de Paris dont la préoccupation principale serait le soucis de la vérité, a l’opportunité d’entendre Son Excellence l’Ambassadeur. Entendrons-nous son témoignage ? Il y va de la crédibilité des institutions et des hommes et du respect de la mémoire d’enfants innocents.

Mais encore, de quelles ressources disposait Mohamed Mérat pour l’achat des billets d’avion vers toutes ces destinations au Moyen-Orient, y vivre une vie en vacances, payer un loyer pour un logement à demeure à Toulouse et se procurer des armes de guerre ? N’ayant pas 25 ans, il n’avait pas droit au Revenu de Solidarité Active de 440 euros. Il ne pouvait pas s’offrir un abonnement de transport à Toulouse intra muros, manger un steak haché hallal par semaine ni obtenir une recommandation pour la location d’un misérable meublé dans la zone. Alors, qui payait ses billets d’avion ? Qui finançait ce train de vie trépidant ? Qui s’est porté garant du paiement du loyer ? Des putois de toutes espèces se sont précipités sur les plateaux de télévisions, pour faire écran à ces légitimes interrogations, et ont crié que les ressources provenaient d’un « braquage » … Pourquoi putois? Débusqués, ces animaux projettent pour couvrir leur fuite un pet nauséabond. D’où l’appellation contrôlée en argot algérien de téchèche. Pinçons-nous le nez et poursuivons notre enquête !

Puisqu’ils sont si bien informés, qu’ils nous disent pourquoi, apprenant ce « braquage », la police ne l’a pas arrêté quand il venait pointer au commissariat, chez « Hassen », son officier traitant? Pourquoi, s’il ne venait pas pointer, la police ne l’a pas arrêter à son adresse ? Mohamed Mérat aurait-il eu des complices ou des protecteurs dans la place ? Entendons-nous: « le dysfonctionnement » et autres euphémismes, invoqués par les apprentis sorciers au pouvoir, visent à masquer une funeste cuisine.

Souvenez-vous : Nicolas Sarkozy était fort occupé, de mars à octobre 2011, par la guerre et la destruction de la Libye et son soutien aérien aux mercenaires islamistes de l’Arabie saoudite et Qatar... Mais au vu des sondages de popularité, en chute libre, au cours de cette période, la guerre trop éloignée pour le français, distrait par le chômage ou sa menace, n’a pas été très populaire en France. Les présidentielles de mai 2012 approchaient à grands pas et cela devenait bien inquiétant pour lui. En effet, de 2008 à 2012, sa côte avait dégringolé pour atteindre, en septembre 2011, 72% d’avis défavorables. Seuls 24% des Français croient encore en lui. 4% réserve leur opinion pour les urnes..

S’est-il souvenu de la mise en scène du sauvetage des vingt écoliers d’une maternelle de Neuilly qui avaient été pris en otages, les 13 et 14 mai 1993, par « Human Bomb », un informaticien de 42 ans, au chômage et dépressif ? Erick Schmitt, de son vrai nom, menaçait de se faire exploser s’il n’obtenait une rançon de 100 millions de francs . Fringant maire de Neuilly, porte parole du gouvernement et secrétaire du budget, Nicolas Sarkozy négocia la libération des otages et , portant à bout de bras un enfant, surgit de la classe crevant les caméras. Après avoir été drogué par un somnifère versé dans son café, Erick Schmitt fut exécuté dans son sommeil par les tireurs d’élite du GIGN. Pour Nicolas Sarkozy : « Le jour de gloire est arrivé… »

A 8 mois des élections, en Septembre 2011, quelle idée fumeuse a irradié son cerveau secoué par la tourmente des sondages? Il l’avait déjà emporté en 1997, face à la campagne bucolique « Désir d’Avenir » de Ségolène Royal, en empruntant au Front National son arsenal de peurs du musulman, de l’émigré et des enfants d’émigrés. Il plagie Le Pen appelant, les bras en croix, Jeanne d’Arc à bouter ces « étrangers » hors de France. Une bonne peur bleue, soufflée pendant quelques jours, en directe par les chaînes d’information continue, pourrait booster sa côte et renverser la tendance. Pourquoi ne pas rejouer une séquence de « Terreur sur la ville » ? Le principe retenu, quelle serait la faisabilité d’une opération du genre?

Ecoutons, à ce propos, au tribunal, le policier « Hassan » du commissariat de Toulouse, chargé de suivre régulièrement Mérat depuis 2 ans ? Il témoigne de la venue de deux fonctionnaires parisiens de l’audition, en sa présence, de Mérat en octobre 2011. Il ajoute : « En janvier 2012, l’ordre vient de Paris, de cesser toute surveillance de Mérat. Trois mois plus tard, en mars, a lieu le massacre. », dit-il, la gorge nouée comme par le remord de ne pas avoir pu empêcher l’irréparable.

Qui d’autre que le Directeur de la DCRI, en l’occurrence Bernard Squarcini, pouvait donner un tel ordre au Directeur de la DRRI de Toulouse, Christian Balle-Andui, son subordonné direct ? Ce dernier avait, en juin 2011, lancée tout azimut une alarme quand déjà, en tout le pays, les forces de sécurité étaient sur le qui vive ? Toutes les questions n’ont pas été posées ce 19 Octobre 2017 au Directeur de la DCRI.

QUI EST DERRIÈRE “LE LOUP SOLITAIRE” ?

Dans l’après-midi du 11 mars 2012, vers 16 heures, Mohammed Mérah avait rendez-vous sur un parking dans le quartier de Montauban, au sud-est de Toulouse, avec Imad Ibn Ziaten, un militaire français d'origine marocaine du 1er régiment du train parachutiste. Les enquêteurs témoignent : « Sur la vidéo réalisée par Mérah avec une caméra Gopro fixée sur la poitrine, on l’entend poser des questions à son interlocuteur : « T'es à l'armée ? T'es militaire ? » Ensuite, tout va très vite. Le ton monte : « Mets-toi à plat ventre. Allonge-toi », insiste Mérah qui arme son pistolet, un 11.43. Ibn Ziaten ne baisse pas la garde: « Tu ranges ton arme. Je ne me mettrai pas à plat ventre. Tu dégages. » Mérah insiste mais Ibn Ziaten ne bouge pas : « Tu vas tirer ? Ben vas-y, tire ». . Il le tue d’une balle dans la tête. Imad Ibn Ziaten n’est pas seulement un français de religion musulmane, il est l’honneur des français et des musulmans. Quand Nicolas Sarkozy et François Hollande se mettent à plat ventre devant l’émir du Qatar et le sultan de l’Arabie saoudite, parrains avoués du terrorisme, la tristesse vous envahit, la honte aussi. Songez alors au martyr de Imad Ibn Ziaten.

Quatre jours plus tard, Le 15 mars 2012, en début d’après-midi, les militaires, Abel Chennouf, français catholique d'origine algérienne, âgé de 26 ans, Mohamed Legouad, français musulman, d'origine algérienne âgé de 24 ans, Loïc Liber, un antillais âgé de 28 ans, retirent de l'argent à un guichet automatique bancaire situé à proximité de la caserne où ils sont cantonnés à Montauban. Mérat, arrive en scooter, dans le dos des victimes, et leur tire une balle dans la tête en prenant le temps d'achever l'une d'elles à terre. Sur place 13 douilles, similaires aux munitions utilisées lors du premier meurtre, sont ramassées. Les deux premiers militaires sont tués et le troisième, grièvement blessé à la tête, restera tétraplégique à vie. Mérat a filmé la scène avec sa caméra fixée sur sa poitrine. Mais se trouvant, cette fois ci, devant un guichet de retrait bancaire, il a été filmé.

Le même jour, dès l’information de la tuerie connue ainsi que sa proximité avec le distributeur de billet, Christian Balle-Andui demande à voir les images de vidéosurveillance de l’attentat. L’accès lui est refusé. Hallucinant ! Avec sa connaissance du milieu délinquant et salafiste local, il estime qu'il aurait pu "à 60%" identifier le tueur au scooter au vu de sa silhouette. Il aurait pu le mettre sous surveillance. Il aurait pu empêcher l’assassinat, quatre jours plus tard, d’un adulte et de trois enfants. Tous les regrets du monde ne pourront pas le consoler d’avoir été écarter de l’enquête alors que sa fonction le désigne pour des événements qui se sont déroulés dans son périmètre administratif. Qui donc a refusé, à Christian Balle-Andui, l’accès à la vidéo et pourquoi cette obstruction?

Quatre jours plus tard , le 19 mars 2012 vers 8 h du matin, Mohamed Mérat arrive à bord du scooter devant l'école de la rue Jules-Dalou, dans le quartier de La Roseraie, au nord-est de Toulouse. Il porte la caméra sanglée sur la poitrine. Il descend de la moto et ouvre le feu. La première victime est un rabbin et professeur de l'école, Jonathan Sandler, âgé de 30 ans, abattu sous les yeux de ses deux jeunes fils, Gabriel, 3 ans, et Aryeh, 6 ans qu'il essaie de protéger du tueur. Les caméras de vidéosurveillance montrent que le tueur assassine l'un des enfants alors qu'il rampe à terre aux côtés des corps de son père et de son frère. Il entre ensuite dans la cour d'école et poursuit Myriam Monsonégo, la fille du directeur de l'école, âgée de 8 ans. Il l'attrape par les cheveux et pointe son pistolet qui s'enraie à ce moment. L'assassin change alors d'arme et tire à bout portant dans la tempe de la fillette . Il s'enfuit ensuite à scooter.

Le lendemain, Nicolas Sarkozy, sombre et ému, est allé à Roissy, présenter ses condoléances aux familles meurtries et saluer les corps des quatre victimes qui seront inhumés à Jérusalem. Posant la question face aux caméras: “Qui peut accepter cela?” Il répond sans vergogne: “ Personne!” Mais si, Monsieur Sarkozy: en plus de celui qui a commis les crimes, celui qui les a commandité! Et vous qui n’avez pas protégé vos concitoyens comme vous le devez à votre charge, vous exprimez sans frais votre horreur de la sauvagerie et de la cruauté devant les caméras. Sans frais mais non pas sans rapport électif dans les urnes! Requinquée par la tuerie de Toulouse, votre côte de popularité de 24 % a décollée en flèche, mais trop tard ou pas assez vite, et deux mois plus tard, vous trébuchiez, au deuxième tour, sur la dernière marche à 48% contre 52% pour François Hollande. Une semaine de plus et vous rempliait pour cinq ans. Il y avait là comme une erreur de timing. N’est-ce pas, monsieur Sarkozy ? Mais on ne peut pas impunément, dit le dicton, “chasser avec le loup et pleurer avec le berger!”

MÉRAT NEUTRALISÉ, POURQUOI L’EXÉCUTER ?

Allons au dénouement de l’affaire ! Plusieurs dizaines de tireurs d’élite encerclent le bâtiment où, au rez-de-chaussée, réside Mérat pour le moment absent. A la tombée du jour, il passe le filet policier et rejoint son appartement, sans être inquiété ni être inquiet. Curieux comportements des deux côtés ! Tout près, à l’abri du danger, l’état major de l’opération réunit Claude Guéant, ministre de l’intérieur, François Molins, le procureur de la république de Paris chargé du terrorisme, Bernard Squarcini, conseillé à la sécurité de l’Elysée et Directeur Central du Renseignement Intérieur et Amaury de Hauteclocque, patron du Raid. A l’endroit où est plantée la caméra, la scène est masquée par les immeubles. On peut entendre la bande son en direct. Une autre vidéo, filmée par un voisin et diffusée plus tard par les chaines, montre, dans le prolongement d’un passage entre deux façades d’immeubles, la fenêtre à vasistas du logement de Mérat. De longues heures d’entretien suivent dont quelques extraits seront diffusées plus tard. Sur les deux films, nous entendons distinctement une grosse explosion accompagnée d’un flash intense, puis après moins de vingt secondes, deux coups de feu secs localisés à l’intérieur du logement, et, une minute plus tard, de la mitraille sans répit pendant cinq bonnes minutes.

Un long silence, puis dans un bruit de bottes impressionnant, des dizaines d’agents du GIGN se retirent au pas de course. Claude Guéant, épaulé par François Molins, se présente devant les caméras pour dire que le forcené a refusé de se rendre. Il a tiré en direction des forces de l’ordre. Il a tenté de s’enfuir en sautant par la fenêtre, tout en continuant de tirer. Les forces de l’ordre ont riposté. L’individu a été abattu. Le procureur prend le relais pour dire qu’il donnera une conférence de presse l’après-midi à 15 heures. Pour l’instant, il dit se rendre sur la scène recueillir les éléments pour confirmer ce qu’a dit le ministre de l’intérieur. On n’est pas avancé !

Amaury de Hauteclocque, ancien patron du Raid, donnera, devant la cour d’assise spéciale de Paris, le vendredi 6 octobre 2017, une version corrigée des faits, par rapport au communiqué de Claude Guéant. La main sur le cœur, il témoigne que les ordres étaient de le capturer vivant! Il y jure ses grands Dieux qu’il a tout fait pour obtenir la réédition de Mérat. Son insistance sur ce point en devient suspecte surtout que personne à la cour n’a émis de doute à ce sujet. Mais quel est donc le négociateur de la DCRI qui a pris le relais dans la discussion avec Mohamed Mérat? Bernard Squarcini? Un des deux visiteurs du soir? Ou un troisième larron?

Doit-on faire appel à des experts « spécialistes en tout » pour qu’ils nous lisent ces vidéos comme les inspecteurs du Bureau d’Enquête et d’Analyse de l’aviation déchiffrent les boites noires après un crash ? Sans prétendre à l’expertise, l’explosion très forte et le flash lumineux intense qui a suivi, révèlent l’utilisation d’une grenade assourdissante appelées Grenade à Saturation Sensorielle ou flash bang en anglais. Cette variété de grenade n’a pas vocation de tuer mais de troubler la vue et l’ouïe assez pour réduire à néant les capacités à réagir de l’adversaire.

Quelques secondes après cette explosion, deux coups de feu rapprochés ont claqué. Claude Guéant a déclaré que le forcené a fait usage de son arme contre les forces de l’ordre. Cela est tout simplement impossible car le dit « forcené » était incapable après l’explosion de faire le moindre geste. Demandez aux manifestants de Notre Dame-des Landes, qui ont, cinq mois plus tard, subit en plein air les effets de cette grenade, de vous en parler. Jugez alors de son impact dans le milieu confiné où se trouvait Mérat. Dans l’état où il se trouvait, il ne pouvait ni appuyer sur la gâchette ni sauter par la fenêtre. Alors, si ce n’est lui qui est l’auteur des coups de feu, qui cela peut-il être ? Qui est l’exécuteur et pourquoi l’avoir exécuter quand il était hors d’état de nuire ? Le corps de Mérat, sans vie, a été jeté au bas de la fenêtre et, avec lui la possibilité de remonter la filière jusqu’aux donneurs d’ordre. Vivant, il pouvait parler ! Qui avait intérêt à le faire taire ?

Vint ensuite la mitraille, un feu nourri pendant de longues minutes, un barouf du Diable! Plus de trois cents cartouches, selon la police, ont été tirées. Plus ! selon les habitants de la cité, accrochés à leur balcon pour le spectacle. Dans un cas comme dans l’autre, c’est jeter l’argent par la fenêtre pour le contribuable! Publiée par Paris-Match, « Le choc des photos… » Mérat est sur le dos, aucune trace de sang autour de son cadavre et son corps semble plutôt épargné par les centaines de balles tirées. Si Claude Guéant dit vrai, ce n’est pas fameux comme carton pour des tireurs réputés d’élite.

Oh, des journalistes sans aveu et des « experts en tout » qui meublent d’ordinaire les plateaux des télévisions vont protester la bouche en cul de poule et crier à la « Théorie du complot » ! Admettons, mais alors apporter vos arguments si vous connaissez la vérité. Réfléchissez un peu, pas trop pour ne pas risquer une crampe du cerveau, mais réfléchissez quand même. Nous le devons à ces enfants et ces militaires sans armes, chrétiens, juifs ou musulmans qu’importe ! Nous leur devons la vérité si nous avons une once de respect pour leur mémoire et plus infime encore du respect pour nous-mêmes. Que ceux qui désirent cette vérité, la cherchent ardemment et que ceux qui savent et en détiennent une part s’avancent et la disent haut et clair !

ÉPILOGUE

L’Elysée a demandé à El-Mouradia, d’accueillir le cadavre encombrant de Mohamed Mérat, craignant que sa sépulture ne devienne un lieu de rencontre pour de jeunes toulousains abusés. Pour le gouvernement algérien, il n’était pas question de se prêter à faire d’un vulgaire indicateur de Toulouse, devenu assassin, un marabout à Médéa. Il y a pléthore dans tout le pays, pas un hameau qui n’aie son petit cube, surmonté d’une coupole, blanchi à la chaux ! Au coquet cimetière de Médéa, le fossoyeur avait déjà creusé la tombe devant accueillir Mohamed Mérat. Au bord du trou béant, il s’appuyait debout, le menton posés sur le manche de la pelle. Il avait empaquetés les ossements dans un tissu blanc, pour faire de la place au nouveau. Les pierres tombales, fichées sur le monticule de terre fraîchement remuée, étaient gravées, en arabe et en français, au nom de ses grands parents, Zaoui et son épouse née Mérat. Les pierres en marbre se dressaient comme deux mains ouvertes vers le ciel. Elles semblaient supplier : « Allah, le clément, le miséricordieux, faites que ce meurtrier, ce voleur de vies, ne viennent pas occuper notre dernière demeure et nous priver de notre repos pour l’éternité. Nous sommes innocents de ses crimes et ne méritons pas ce châtiment terrible. Dieu, sauvez-nous des méchants ! »

Et Dieu entendit leur prière.

AD

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.