
L'entrée du 20 rue du cirque.
Par Abdenour Dzanouni
Un corse, domicilié clandestinement au 20 de la célèbre rue du cirque, m’a reproché d’avoir médit des corses en écrivant, à propos de cette adresse « Là où tous ces bandits corses viennent faire leur sieste. »* Au temps pour moi! Je reconnais la faute de colporter, avec une inconscience coupable, les préjugés sur les corses par voie de réclame. Je lui offre sur le champs réparation de cet écart de langage que ma morale réprouve. Je prends ma plume et lui dit : « Mea culpa, mon ami ! Dictez et j’écris, vos mots seront les miens ! ». L’entretien qui suit en est l’exact transcription:
_ Ce marché, dit-il, me satisfait ! Je vois à votre regard franc, ajouta-t-il froissant au passage ma pudeur, que vous êtes un homme d’honneur. J’ai comme vous en haute estime la parole donnée. Ce n’est pas la vertu particulière de ceux qui nous gouvernent. Aussi, sachez que je n’ai pas assuré la sécurité de Hollande parce que je serai membre d’un de ses larbins’ club, mais imaginez qu’il lui soit arrivé quelque chose… Ah, Mama Mia ! On ne pouvait pas avoir d’alibi, nous étions sur place. Et le comble pour un corse : j’ai sacrifié ma sieste pour veiller sur celle du président ! Je ne dormais plus que d’un œil, la nuit et le jour. Je faisais une ronde dans le quartier toute les heures… Pendant ce temps Hérault jouait de la trompette et Valls dansait sur le prélude d’une suite dite judéo-andalouse. Pour le reste, parole d’honneur: on est comme sur le drapeau, la tête du maure avec le bandeau sur les yeux : on n’a rien vu !
_ Mais vous avez tout entendu...
_ Bien sûr qu’on a tout entendu ! On ne va pas se couper les oreilles pour les beaux yeux de Julie! Nous avions la télé et quand ils criaient trop fort dans la chambre à côté, on augmentait le son, à cause des voisins, dès fois qu’ils appelleraient la police. Tu vois le cirque : tous les voisins penchés au balcon pour nous regarder embarquer dans le panier à salade et François qui téléphone à Valls pour nous sortir de là ! En attendant, Avant chaque discours public, enfermé avec elle dans la chambre, François répétait comme au théâtre. Les gens s’imaginent des choses au 26, rue du cirque… Mais quand François retournait du Mali ou du Centre Afrique, c’était pas toujours le repos du guerrier. Elle lui donnait la réplique en posant les questions et lui qui devait apprendre par cœur les réponses, répétait à chaque fois qu’elle le lui demandait. Elle lui disait comme ça : « Articule François, ne couine pas en bout de phrase ! Redresse toi, Regarde loin et droit devant, comme napoléon sur un champs de bataille, balaie du regard ton auditoire! Oublie ces « euh, euh ! » de bienheureux. Serre le poing et parle d’un ton ferme. Plus ferme ! Ah, la-la-la, quel catastrophe ! C’est ta marionnette qui va avoir du texte ! »
Lui était debout, en pyjama rayé, bleu et blanc, au col à liseré rouge. Elle, assise sur une chaise, lui faisait répéter, en professionnelle, les discours destinés aux soldats au Mali ou au Centre Afrique. « Plus martial, François ! Tu baisses le ton, tu manques de souffle à la fin de tes phrases. Mets plus de conviction dans ton final, « Vive la France ! ». Alors, lui se plaignait : « Lili, s’il te plait, j’ai mal à la tête, j’ai envie de dormir… ». « Non, disait-elle, passe encore pour connaître à peu près ton discours, mais pas avant d’avoir appris les réponses et les questions par cœur. François, tu ne peux pas regarder tes papiers pour répondre à des questions que tu es censé ne pas connaître à l’avance ! Voyons !»
François avait un bon coup de fourchette. Dès qu’elle lui accordait une pause, il venait piquer sur notre table au salon du brocciu de chèvre de la montagne qu’il faisait passer avec une gorgée parfumée de Vermentino de la plaine. Qui n’a pas goûté à ce casse-croute, ne connait pas la Corse. Pour se servir, il écartait délicatement les Beretta et les Kalachnikovs qu’on avait posés négligemment sur la table. Si ce n’était qu’il était le président, il n’était pas contrariant. Pour le reste, c’était comme « Au théâtre ce soir », quand le théâtre passait à France culture. Pour la récréation, elle lui faisait faire des impro’ par thème, comme par exemple, les inondations catastrophiques en France :
Julie ( dans le rôle du commerçant ou de l’agriculteur sinistré): Je suis ruiné Monsieur le Président, que faites vous pour nous ?
François (dans le rôle de Président) : Euh, euh, je vais demander à Dieu d’arrêter la pluie…
Julie (dans le rôle de Dieu) : « Tant que tu foutras la merde, je tirerai la chasse d’eau... ! »
Elle est plus drôle que lui, la Julie. On dit toujours que derrière chaque grand Homme, il y a une grande Femme . C’est la preuve qu’on dit souvent n’importe quoi ! La Julie a fait ce qu’elle a pu dans les règles de l’art. Ségolène et Valérie avaient essayé avant elles. Mais elles n’ont pas d’obligation de résultat! Quand on est euh, euh… On le reste ! Aujourd’hui, des journalistes de peu, accusent ces femmes, si méritantes et dévouées à la patrie. Et si ce ne sont pas les femmes qu’on montre du doigt, ce sont les corses qu’on accuse des malheurs de la république.Tout ça c’est de la propagande, selon laquelle, amateur d’attentat ou de sieste, les corses n’ont pas d’autre choix de carrière.
Comme le Pape le dirait de ses gardes suisses, François, aurait pu dire, lors de la conférence de presse à l’Elysée, « je rends hommage aux corses, d’avoir assuré , nuit et jour, ma sécurité », mais rien, pas un mot. Il félicite Valls qui n’était pas là ! Et c’est nous les bandits corses, cagoulés et une grenade à chaque main qui font peur aux bourgeois. Il y a même des gens qui ont raconté que la Corse avait donné le nom de corsaire aux pirates des mers ! Pourquoi sommes-nous désignés comme la menace des institutions républicaines, quand nous en avons protégé la principale : La présidence ? Je dirais volontiers à François, qui veut, en nous ignorant, se donner le vernis d'une morale qu'il n'a pas, ce que le pirate Diomède a dit à l’empereur Alexandre le Grand:
« Au temps où Alexandre régna
Un homme nommé Diomedès
Devant lui, on amena,
Pieds et poings liés, chaîne en laisse
Comme un larron, un écumeur
Des mers que nous voyons courir…
Il fut mis devant l'empereur,
Pour être jugé et mourir.
Alexandre l'arraisonna:
"Pourquoi es-tu larron en mer?"
Se dressant, l'homme répliqua:
"Pourquoi larron me nommer?
Pour ce qu'on me voit écumer
Seul en une petite barque?
Si comme toi j'eusse une armée,
Comme toi je serais monarque »**.
Entretien réalisé par Abdenour Dzanouni
* Ref : » Lettre ouverte à Valérie Trierweiller, sur Paris républicain.
** "Le Testament", François Villon.