Par Abdenour Dzanouni
Annapurna, mardi 14 Octobre 2014 : Une tempête de neige a soufflé sur le col de Thorong au Népal. Trente-neuf personnes ont été tuées et une soixantaine d’autres sont portées disparues. Parmi elles, Tamar Ariel, une religieuse devenue pilote de l’armée Israélienne. Elle avait participé, durant l’été 2014, aux bombardements de la ville de Gaza et, pour cela, mérite notre attention particulière. Notre sermon funèbre vient tempérer les oraisons dithyrambiques de la presse israélienne à une criminelle de guerre.
Combien étiez-vous à arpenter ces pentes enneigées,
Pèlerins à piolet qui aiment à célébrer le culte du Névé ?
Et toi, Tamar qu’es-tu donc venue faire sur l’Annapurna ?
Qu’avais-tu besoin de tutoyer les cimes ?
Toi la pilote de l’armée, pirate écumant le ciel de Gaza,
Quelle musique écoutais-tu, le casque sur les oreilles,
Peinarde dans ton cockpit et la nuit étoilée?
« Tu tueras ! » a commandé le rabbin de Tsahal
Et tu décollais le ventre rempli de bombes,
Et volais vers la ville de Gaza.
Là bas, les enfants t’attendaient
comme d’autres le marchand de sable.
Allongés sur le dos, les yeux ouverts et rivés au plafond,
Ils comptaient les bombes,
Qui pleuvaient sur leur ville
Comme d’autres enfants dans le monde
Comptent les moutons pour dormir.
Combien ne se sont jamais réveillés ?
Ah Gaza… Guernica, Dresde, Londres, Nagasaki, Hiroshima, Deir Yacine, Hanoi, Baghdad et puis Gaza…
Il fait beau Tamar et tu marches dans la neige,
Tes bottes s’enfoncent en crissant,
dans les pas du sherpa, pas à pas,
Tu respires à fond l’ivresse
Et tu respires à fond la vie.
Quelle bouffée de puissance
Gonflait tes seins, obus chargés.
Quand du ciel étoilé de Gaza
Tes bombes tombaient sur les maisons,
C’était toi, un doigt sur un bouton.
Tamar, vois le soleil qui flamboie
Et la neige qui poudroie
Comme si c'était la dernière fois.
Regarde au loin, ce nuage sombre,
Chargé de fureur qui roule son fracas !
Ses ténèbres couvrent ton corps de neige
Et glacent ton cœur d’effroi.
Survivrons-nous ?
Demandes-tu terrifiée.
C’est ce que se demandait la grand-mère palestinienne
Serrant ses petits enfants contre son sein
Pour les protéger de tes bombes.
Et toi, Tamar, tu appuyais sur le bouton assassin.
Même le prophète Moshé ne pourrait te sauver.
"Survivrons-nous ?"Dis-tu terrifiée.
Ah, Tamar, ce n’est pas la mort que tu dois craindre
Mais ce que tu as fait de ta vie qui doit t’épouvanter.
AD