Les attaques antijuives démarrent par la diffusion de rumeurs, d’accusations et une attitude de suspicion. Les Juifs antiracistes qui combattent l’antisémitisme sont soupçonnés d’avoir un agenda caché, leur combat serait un moyen détourné pour défendre Netanyahu ou justifier les massacres des civils palestiniens. Jonas Pardo est l’un d’entre eux.
Pour ses contradicteurs, Jonas Pardo a plusieurs « défauts » qui pour nous sont des qualités : il refuse de mettre en opposition la lutte contre l’antisémitisme et la solidarité avec les Palestiniens, combat l’antisémitisme d’où qu’il vienne, refuse tant sa minimisation que son instrumentalisation par les droites, ou même par le gouvernement israélien. Il combat les théories qui s’inscrivent dans l’imaginaire raciste du choc des civilisations, telle que la théorie du nouvel antisémitisme ou la théorie du philosémitisme d’État, refuse que la lutte contre l’antisémitisme ne serve de prétexte à l’islamophobie. Il s’affaire à faire converger les mémoires et les luttes antiracistes. En 2021 il organisait avec le RAAR un hommage à Ilan Halimi et toutes les victimes des crimes racistes, ce qui lui a valu d’être insulté en direct sur la chaîne I24. Parce que ses positions s’inscrivent en contradiction avec les narratifs dominant actuellement, à gauche comme à droite, il est la cible de violentes attaques. Tous les moyens sont bons pour salir son travail : mauvaise foi, diffusion de rumeurs calomnieuses, publications sur les réseaux sociaux de vidéos découpées de manière à lui faire dire l’inverse de ce qu’il défend…
Dernièrement, c’est Daniel Schneidermann qui tentait de le disqualifier lors de l’émission « Antisémitisme : et si on recadrait le débat » sur la chaîne Arrêt sur Images. Le fondateur de la webTV, sous la pression exercée tant par des réseaux proches de LFI que par la galaxie regroupée autour de l’émission Parole d’Honneur, remontait les bretelles de l’équipe qui osait s’intéresser au problème de l’antisémitisme lors d’une précédente émission intitulée « Antisémitisme : analyse d’un déni à gauche ». Pour préserver ses liens avec les partisans du déni, Schneidermann convoquait l’équipe d’ASI pour effectuer une séance d’autocritique publique sans précédent dans l’émission. Au programme : paternalisme envers les journalistes convoqués et enchaînement de poncifs et d’accusations calomnieuses s’inscrivant dans une tradition proprement stalinienne. Alors que ni Jonas Pardo ni Robert Hirsch, ne se sont jamais revendiqué du sionisme, Daniel Schneidermann leur applique ce qualificatif comme une accusation qui disqualifierait leur propos sur l’antisémitisme. L’accusation de « sionisme » appliquée à des personnes qui ne s’en réclament pas est une pratique qui s’inscrit dans une longue histoire d’attaques contre des militant·es, juifs ou entretenant une sociabilité avec des personnes juives.
Artur London, dirigeant communiste Tchèque passé par les brigades internationales a été qualifié de « sioniste » lors des Procès de Prague au côté de 13 autres dirigeants du Parti. La ligue juive contre le sionisme égyptienne a été dissoute pour prétendu « sionisme » dans les années 1950 ; Frantz fanon a été accusé de « sionisme » par un militant rival du fait de sa sociabilité avec des médecins juifs et communistes algériens, lorsqu’il soignait des blessés du FLN à Tunis. La « chasse aux sionistes » n’est pas la critique politique du sionisme, mais un procédé de disqualification utilisé contre ceux et celles qui refusent de se taire face à l’antisémitisme. Dans l’émission d’ASI, Hadrien Clouet, député du mouvement La France Insoumise qui prône la solution à deux États dans les frontières de 1967, solution sioniste par définition, ne fait pas l’objet de cette qualification.
Dans la même émission, il est prétendu que Jonas Pardo ne combattrait pas l’instrumentalisation de l’antisémitisme. Or l’événement qui l’a fait connaître est la confrontation physique avec le Rassemblement National lors de la marche contre l’antisémitisme pour briser la fable de la dédiabolisation. Dans le Petit manuel de lutte contre l’antisémitisme qu’il a coécrit avec Samuel Delor, il précise que c’est en luttant contre l’antisémitisme qu’on combat le mieux son instrumentalisation, qu’il dénonce à de multiples reprises, notamment sur le plateau de « C ce soir » le 12 novembre 2023 par exemple.
Sans tracer une équivalence entre antisionisme et antisémitisme, Jonas Pardo appelle simplement à la lucidité face aux discours antisémites qui peuvent prendre le masque de l’antisionisme conspirationniste, ou prendre pour prétexte la solidarité avec la Palestine sans faire avancer d’un iota la cause palestinienne. Celles et ceux qui cherchent à le dépeindre en acteur d’un agenda caché visant à détruire la gauche et la solidarité avec la Palestine ne le lisent pas, ne l’écoutent pas, ou bien de manière sélective et malveillante. Il suffirait pour eux d’ouvrir le Petit manuel imprimé en juin 2024 pour y lire une dénonciation des massacres à Gaza : « Des membres du gouvernement israélien multiplient les déclarations déshumanisantes envers les palestinien.nes, plaident publiquement pour une politique d’épuration ethnique et la colonisation de Gaza […] Le débat public et médiatique est saturé d’expressions de soutien au bombardement intensif de la bande de Gaza, alors même que les civils dont une grande partie d’enfants sont assassinés en masse, que les infrastructures sont détruites et qu’un blocus alimentaire menaçant de famine est mis en place par l’armée israélienne ».
Non, la critique des errements de la gauche en matière de lutte contre l’antisémitisme ou la dénonciation de propos et autres visuels antisémites ne sont pas un complot contre le mouvement social ou de solidarité avec la Palestine, mais un moyen de les renforcer et une exigence politique légitime.
Premières signatures :
Samuel DELOR, militant syndicaliste, co-auteur du « Petit manuel contre l’antisémitisme »
Martine LEIBOVICI, Maitresse de conférences émérite en philosophie, membre du RAAR
Bruno QUELENNEC, Enseignant-chercheur et membre du RAAR
Nonna MAYER, chercheuse émérite CNRS/CEE Sciences Po Paris, politiste
Christian PIQUET, membre du comité exécutif national du PCF
Fabienne MESSICA, sociologue, LDH
Bora YILMAZ, membre du conseil national du PCF
Brigitte STORA, essayiste et autrice
Alain POLICAR, Politiste (Science Po)
Cécile MOSCOVITZ, Journaliste
Claude SARCEY, co-président de l’Union des Juifs pour la Résistance et l’entraide
Sara HORCHANI, musicienne, militante associative
Philippe MARLIERE, Politiste, membre du RAAR
Nathalie RAOUX, historienne
Régis LAGRIFOUL, syndicaliste aux finances publiques en Haute-Garonne
Ludovic RIOUX, syndicaliste
Dita EL HARAR, CPE et membre JJR
Sylvain CREPON, Maître de conférence en science politique, Université de Tours
Bruno QUELENNEC, Enseignant-chercheur et membre du RAAR
Mathilde LOISEAU, syndicaliste et antifasciste, Rennes
Nicolas LEBOURG, chercheur en sciences sociales
Eva ILLOUZ, EHESS, Paris
Eden SOUSSANA, Président de la section étudiante du Hadash Jerusalem, membre du secrétariat de Maki et Hadash Jerusalem
Tauba ALMAN, retraitée, secrétaire de l’Union des Juifs pour la Résistance et l’entraide
Pablo KRASNOPOLSKY militant syndical et antiraciste.
Jean-Yves PRANCHERE, professeur de théorie politique à l'ULB.
Lucie CARIES, Réalisatrice
Jonathan HAYOUN, Auteur, réalisateur
Raymonde BARON, née GRYNBERG, Union des Juifs pour la Résistance et l’entraide
Robert HIRSCH, historien et militant du RAAR
Eve TOLEDANO, revue Daï
Philippe CORCUFF, professeur des universités en science politique à Sciences Po Lyon
Christiana RÜTTIMANN, artiste et militante
Denis CHARBIT, professeur de science politique, The Open University of Israel
Dan ZISSO, collectif Golem
Laurent PEREZ, traducteur
Ludovic ARBERET, syndicaliste
Sylvain BERTRAND, éditeur
Maxime DAUTEL, militant contre l'antisémitisme, Forum civique Européen France
Pascal BUSQUETS, éditeur militant
Milo LEVY-BRUHL, docteur en philosophie politique
Paul LEVY, militant RAAR
Julien CHANET, membre du RAAR
Emmanuel REVAH, Humoriste, membre du Raar
Aurélie PAVIS, membre du RAAR
Estelle GAURON, mécanicienne cycle
Stéphane JULIEN, participant à la revue La Révolution prolétarienne
Yves COLEMAN, éditeur du site npnf.eu
Julie SAMIT, libraire et membre du RAAR
Laurent EDEL, Trésorier Boussole Antiraciste
Yael OUAKI, documentaliste et membre des JJR
Damien DAVY, militant syndicaliste antifasciste, Finistère.
Sébastien HAMONIC syndicaliste CNT-F, syndicat des travailleurs et
travailleuses de l’éducation d’ille et Vilaine
Olivier CUZON (Solidaires 29)
Adrien SANGLA, militant syndical dans le Tarn
Jean-claude KERNIN, enseignant, syndicaliste CNT35
Joscelin GUTTERMANN, Syndicaliste et militant antifasciste au sein de Solidaires
David SAUZÉ, enseignant, militant Sud Education
Henri BLOTNIK, directeur de la Presse Nouvelle Magazine
Charlotte AYACHE, professeure des écoles
Tristan NAVAILH-HAMZA enseignant et syndicaliste dans les Bouches-du-Rhône
Sébastien CHATILLON, militant à l’Union syndicale Solidaires
Jean-François NEGRI, syndicaliste antifasciste, enseignant dans les Bouches du Rhône
Jan FEIGENBAUM, bibliothécaire, syndicaliste et militant antiraciste
Ben ASSOR, hôtelier et militant antiraciste
Denis MARX, militant associatif Lyon
Jean Paul RAVAU, Militant syndicaliste et antifasciste
Grégory BENZEKRY, syndicaliste et musicien (Dubamix)
Daniel APTEKIER-GIELIBTER, membre du comité d'animation du RAAR et du bureau de l'UJRE
Daniel PERETZ, militant CGT et JJR
Emmanuel SANDERS, JJR
Clément HOMS, éditions crises et critiques
Léa COHEN, JJR
Zoé GRUMBERG, enseignante et chercheuse post-doctorante (Fondation pour la Mémoire de la Shoah).
John BARZMAN, Professeur d'histoire contemporaine émérite
David NOËL, Président de la fédération LDH du Pas-de-Calais
Sylvaine BULLE , sociologue, enseignante-chercheuse.
Judith COHEN SOLAL - Psychanalyste, auteure
Ludovic PAUTIER, Enseignant à la retraite & poète en vie
Christian LEBLANC, militant CGT et anti fasciste
Arnau PONS, poète et traducteur
Gérard CARDELLA-SCHOEFTER, militant libertaire
Philippe CHAMEK , syndicaliste à Sud PTT et membre du RAAR
Anna C. ZIELINSKA, MCF en philosophie, Université de Lorraine / Sciences Po Paris / Nancy
Sébastien LEBRET, militant Place Publique 13
Johannes VOGELE, traducteur, Editions crise & critique, revue Exit!
Valere STARASELSKI, écrivain
Clotilde O'DEYE, anthropologue
Bernard ADRIAN, retraité
Gérard DELAHAYE, Commission confédérale CGT des travailleuses et travailleurs migrant.es, UD CGT Paris
Sylvain DRESSLER
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Pour signer : tribunesoutienjonas@gmail.com