Voici plusieurs années (je n'ose dire bientôt trois décennies) qu'un rituel immuable m'amène sur la route de Marciac. D'un coin perdu des Pyrénées jusqu'à ce beau village du jazz, la route n'est pas longue: soixante-dix kilomètres mais le temps passe vite, car d'année en année nous égrenons nos souvenirs ou faisons le constat malheureux (comme cette année) des passages ravageurs de la grêle ou de l'absence d'articles dans une presse régionale bien au-dessous de tout.
Puis arrivés dans un des nombreux parkings de la petite city!, nous laissons notre carosse pour rejoindre la place centrale et trouver le restau avant de rentrer sous le chapiteau. Je me délecte toujours de ces moments passés à regarder les dernières nouveautés artisanales livrés à l'oeil des curieux, et à étudier avec minutie les cartes des nombreux restaurants dont certains ne nous serviront pas toujours en temps et en heure, mais c'est une autre histoire. Non, ce soir je vais encore découvrir ce jeune prodige qu'est Tigran Hamasyan. Il y a deux ans je l'avais déjà vu, seul sous cet immense chapiteau avec son piano: tout un orchestre était pourtant là et la virtuosité de ses doigts me confirmait son goût pour cette musique du passé telle qu'elle fut incarnée par un Debussy, un Ravel ou Fauré car hier soir, les chants mélodieux et entêtants de son accompagnatrice m'ont transporté comme les multiples variations d'un Gabriel. Merci à l'artiste et à son exceptionnelle créativité!
Grand moment, donc, d'un plaisir qu'il a su faire partager à un public, qui, comme il y a deux ans, a été transporté dans son univers, entre jazz, musique classique et électro... La musique n'a pas de frontière intellectuelle au sens où elle peut mener sur des sentiers loin d'être balisés! L'essentiel reste l'émotion qu'elle procure à chacun et à l'oubli de soi et des autres, cette catharsis que l'homme a toujours recherché. Musique vivante, le jazz l'est et continuera à l'être grâce à de tels artistes dont les sources sont multiples et sans cesse revivifiées. D'un groupe suédois comme le regretté (et c'est peu de le dire!) E.S.T. à Ahmad Jamal que j'admire, j'aime le jazz et ce qu'il peut apporter de nouveauté indicible mais réelle à tous les autres courants musicaux. Selon l'adage mozartien, la musique est entre les notes; le jazz, lui, est entre toutes les oreilles où que l'on soit et sans qu'on y prête garde. Merci JIM (Jazz in Marciac) et j'espère de tout coeur avoir encore autant de moments à partager...