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« Je m'aperçus que l'on n'aboutit à rien si l'on ne s'entretient pas de ce qui est connu de tous. Est naïf celui qui ne comprend pas quelle injure il inflige à ses semblables en leur parlant de ce qu'ils ignorent. On pardonne une telle outrecuidance uniquement au journaliste, à l'écrivain, au poète. J'avais compris qu'une idée nouvelle, voire un aspect inhabituel, ne peut se faire admettre que par des faits. Car des faits, laissés à l'abandon, n'en demeurent pas moins ; ils ressurgissent un beau jour, révélés par quelqu'un qui en comprend la portée. Je compris qu'au fond, faute de mieux, je ne faisais que pérorer au lieu d'apporter des faits, qui, d'ailleurs, me manquaient totalement. Car, je n'avais rien en main. Plus que jamais j'étais poussé vers l'empirisme. J'en voulais aux philosophes de parler de tout ce qui était inaccessible à l'expérience et de se taire chaque fois qu'il se serait agi de répondre à une expérience. Il me semblait bien que j'étais une fois et en quelque lieu tombé dans une vallée de diamants mais je ne pouvais convaincre personne et même pas moi-même, à y regarder de plus près, que les échantillons de pierres que j'en avais rapportés étaient autre chose que du simple gravier. »
C.G. JUNG - « Ma vie »

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