Schindma37 (avatar)

Schindma37

Journaliste suisse retraité dans l’Herault

Abonné·e de Mediapart

355 Billets

2 Éditions

Billet de blog 1 juillet 2010

Schindma37 (avatar)

Schindma37

Journaliste suisse retraité dans l’Herault

Abonné·e de Mediapart

CNN : Larry King raccroche ses bretelles

Schindma37 (avatar)

Schindma37

Journaliste suisse retraité dans l’Herault

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Après 25 ans de talk-show sur CNN, Larry King, le célèbre intervieweur raccroche ses

fameuses bretelles. A 76 ans, King était devenu une légende des médias américains. A 21

heures, tous les soirs, il recevait en studio les présidents, les monarques, les célébrités du

showbizz, du sport et de la politique. Toujours en chemise, derrière un gros micro à

lʼancienne, avec ses fameuses bretelles et sa voix éraillée à lʼaccent populaire de

Brooklyn. Il a interviewé plus de 40 000 invités sur CNN : tous les présidents américains -

de Gerald Ford à Barack Obama - mais aussi Gorbatchev, Jacques Chirac, Tony Blair,

Madonna, McCartney, Malcolm X.

Cʼest la fin dʼune époque pour CNN. Avec son style détendu, ses coudes sur la table, son

regard acéré derrière ses grosses lunettes, King était le symbole de ces talk-shows à

lʼancienne dont raffolent les Américains. Cʼest lui qui avait mis en vedette la TV par câble

et habitué les Américains à se brancher sur CNN pour suivre son show. Le problème pour

CNN, cʼest que Larry King nʼa pas compris que le monde des médias avait changé. Son

show intéressait de moins en moins de téléspectateurs : 1.4 million lʼan dernier, 771 000

cette année. Il en était conscient, selon le Washington Post : “Vous vous sentez toujours

mal quand les taux dʼaudience baissent. Mais je nʼai jamais senti de pression. CNN nʼa

jamais fait pression sur moi.”

En réalité, il ne sʼappelait pas Larry King, mais Lawrence Harvey Zeiger, fils dʼimmigrés

juifs de Biélorussie. Il nʼavait aucun expérience des médias quand il a été engagé par une

radio locale en Floride, dans les années 1960. Mais cʼest ainsi que la plupart des

animateurs de la TV américaine ont commencé : David Letterman, du Late Show sur CBS,

Johnny Carson, du Tonight Show sur NBC ou Oprah Winfrey, lʼanimatrice la plus célèbre

et la plus riche de la TV américaine. Tous ont débuté dans une station locale, à 1000

dollars par mois.

Ce qui a fait le succès de Larry King pendant un quart de siècle, cʼest sa gouaille et sa

capacité à interviewer nʼimporte quelle personnalité. Il se vantait de ne jamais lire les livres

de ses invités et de ne jamais préparer ses questions. Son équipe préparait ses dossiers

et il improvisait. Il affirmait que sʼil nʼétait pas surpris par son invité, il ne posait pas les

bonnes questions. Il était toujours sympa avec ses invités, jamais agressif, mais il

renvoyait toujours la balle. Il avait demandé à Sarah Ferguson, la duchesse d'York, qui publiait un livre sur

les régimes, si elle avait un problème de poids. Comme elle essayait de se dérober en

affirmant quʼelle était gênée par les lumières du studio, la voix de Larry King avait

claqué :”Back to the question” (Revenons à la question).

Larry King nʼétait jamais complaisant mais parfois complice. Les politiciens américains, qui

depuis longtemps ont déserté les débats politiques pour les tak-shows, adoraient Larry

King Live, qui leur offrait une plateforme pour leurs idées et une large audience. Pour les

politiciens, cʼétait le moyen dʼéviter les journalistes, qui connaissaient leurs dossiers et

posaient des questions embarrassantes. Bill Clinton, invité trois fois dans les deux

premières années de sa présidence, a déclaré au Washington Post : “Larry King mʼa libéré

en me permettant de parler directement aux Américains.” Aujourdʼhui, la politique

américaine sʼest radicalisée, pour ou contre Obama. Les talk-shows ne sont plus

consensuels, ils sont devenus partisans. Avec la départ de Larry King et dʼautres vedettes,

CNN va devoir modifier complètement ses programmes de la soirée pour garder ses

téléspectateurs et ses annonceurs.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.