On en apprend de belles en lisant la presse étrangère ! Le New York Times nous narre les malheurs du fisc britannique, qui a voulu récupérer les milliards déposés par les fraudeurs britanniques dans les banques suisses. Le gouvernement de Sa Majesté espérait rapatrier 8.4 milliard de dollars pour renflouer ses caisses. Il n’en est rentré que 1.7. My God ! Comme tous les gouvernements européens, Londres recherche désespérément des sous dans les paradis fiscaux où ses riches contribuables ont planqué leur fortune. Selon le New York Times : « en 2012, le gouvernement britannique estimait que les Britanniques avaient amassé plus de 40 milliards de livres dans les banques suisses. « Selon d’autres estimations, « sur le plan mondial, le montant planqué dans les paradis fiscaux et échappant aux aux gouvernements pourrait atteindre 21 000 milliards de dollars - plus que le PIB des Etats-Unis ».
Loin de la plaque, les British ! Incompétents, maladroits, les fins renards du fisc de Sa Majesté ? Pas du tout : Jim Harra, directeur général de l’autorité fiscale explique : « C’est un souci que nous avons eu depuis que l’accord avec les Suisses a commencé à mordre, les gens ont viré leur argent ailleurs. Et le New York Times de conclure, en citant le titre du célèbre film de Woody Allen : « Take the money and run ». En français moderne : « Prends le pognon et casse toi ! ». Ah, les mauvais citoyens, les riches égoïstes qui laissent leur gouvernement se débattre avec la dette, le chômage et qui planquent leurs milliards non déclarés au soleil des paradis fiscaux ! Le fisc britannique est vraiment d’une candeur incroyable : les accords internationaux conclus entre 60 pays pour mettre fin à l’évasion fiscale n’entreront en vigueur qu’en 2017 ! Seize mois de préavis, c’est largement suffisant pour mettre votre fortune à l’abri dans d’autres paradis fiscaux ou d’investir dans l’or, les oeuvres d’art, les assurances ou d’autres trusts offshore ou des fondations gérées par des avocats étrangers.
Selon l’accord avec la Suisse, environ 18 000 fraudeurs britanniques se sont dénoncés. Ceux qui ont refusé ont payé 34% pour régler leurs impôts. La Suisse a créé une retenue d’impôt sur les intérêts pour le compte du gouvernement britannique. Obligeants, les Suisses ont même fourni à Londres une liste des pays qui ont reçu l’argent des Britanniques avant déduction d’impôts : Singapour, Dubaï, les Seychelles, l’île Maurice et Hong Kong.
Le quotidien new-yorkais détaille un cas célèbre : celui du milliardaire Bernie Ecclestone, 83 ans, patron de la Formule 1. Il est accusé d’avoir versé 44 millions de dollars à un banquier allemand pour l’empêcher d’avertir les autorités britanniques que c’était lui, Bernie, et pas son ancienne femme, qui contrôlait un trust familial au Luxembourg, un célèbre paradis fiscal. Evidemment, Bernie nie tout et accuse le banquier de lui avoir extorqué les millions. Mais les finances du trust sont si opaques que les limiers britanniques sont dans le brouillard. Le New York Times explique à l’usage des nuls de l’évasion fiscale. Accrochez-vous : « Selon l’accord de divorce de 2009, l’ex-épouse de M. Ecclestone a accepté de lui verser 100 millions de dollars par an. Selon les autorités, c’est une sorte de pension alimentaire inversée. M. Ecclestone est domicilié à Gstaad, en Suisse, où les autorités fiscales ne donnent aucune information sur les résidents légaux. Et son ex-épouse est Croate et pas citoyenne britannique, ce qui a permis à M. Ecclestone de mettre son argent à l’abri du fisc britannique ». Une merveille de montage financier !
Quel dommage que le New York Times n’ait pas enquêté sur les milliards planqués par les Français dans les paradis fiscaux. Il aurait probablement nuancé les cocoricos de Michel Sapin, le triomphant ministre des Finances, qui affirmait que la France allait récupérer 5 milliards d’euros des repentis fiscaux, dont 2 milliards en 2014. La Suisse a signé un accord de coopération fiscale avec la France, mais sa ministre des Finances a nuancé. Pas de pêche aux renseignements, les demandes françaises devront remplir des critères : les Suisses ne signaleront que les fraudes survenues avant février 2013. « Les demandes individuelles ne contenant ni nom ni adresse pourront, elles, être faites seulement pour les périodes fiscales après le 1er janvier 2010. » Le diable est dans les détails ! Largement le temps pour les fraudeurs avisés et leurs excellents conseillers financiers de virer des milliards vers d’accueillants paradis fiscaux exotiques. Mais cela n’empêche pas les hommes politiques français de proclamer régulièrement que les paradis fiscaux, c’est fini ! Comme Sarkozy en septembre 2009 ou Hollande en 2013. C’est curieux, cette habitude de langage des politiciens français : je déclare, c’est comme si c’était fait !