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Billet de blog 11 mai 2021

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Macron : la grande illusion

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« Le plus important aux Jeux olympiques n’est pas de gagner, mais de participer ». Cette belle citation du baron de Coubertin, créateur des Jeux olympiques modernes, a certainement inspiré le président Macron lorsqu’il a lancé l’idée d’une démocratie participative en créant la Convention citoyenne pour le climat et en demandant à 150 Français de plancher pendant des mois pour accoucher de 150 propositions censées réduire de 40 % les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030, "dans un esprit de justice sociale". À l’arrivée, une loi Climat et Résilience que le gouvernement français présente comme "une première mondiale" ! C’est à pleurer, il vaut mieux en rire : menus végétariens dans les écoles, interdiction des terrasses chauffées, pas de pub pour les énergies fossiles, interdiction de prendre l’avion quand un trajet en train de moins de 2h30 est possible. Tout ça pour ça ! Les belles illusions des 150 citoyens et les belles promesses du président ont été passées au hachoir des parlementaires et des groupes d’intérêts. Je n’en ai jamais douté. La démocratie participative, c’est une belle idée, c’est surtout une grande illusion.

Vous ne me ferez jamais croire que 150 citoyens enthousiastes sont capables de faire des propositions pour faire entrer l’écologie dans le quotidien, alors que des experts du climat planchent depuis des dizaines d’années avec compétence sur le sujet. Les propositions détaillées des experts finissent régulièrement dans un tiroir, parce que le gouvernement sait bien que les Français ne sont pas prêts à accepter les lourds sacrifices d’une transition énergétique efficace. Souvenez-vous : en 2013, quand le gouvernement avait proposé une écotaxe sur les poids lourds, la Bretagne des bonnets rouges avait déclenché une fronde pendant trois mois. Aux oubliettes, pas d’écologie punitive ! En octobre 2018, quand le gouvernement avait voulu augmenter la taxe sur les produits énergétiques, la France avait basculé dans la révolte des gilets jaunes. Touche pas à ma bagnole ! Macron avait dû capituler en rase campagne, après avoir lancé un grand débat national et avoir annoncé une baisse d’impôts pour les classes moyennes.

La démocratie participative, c’est quand les gouvernants bousculés par les mouvements sociaux s’interrogent sur les limites de la démocratie représentative. Pour calmer la contestation, on associe les citoyens au processus de décision politique. Ça marche assez bien au niveau local avec les comités de quartier, les États généraux, les budgets participatifs et le droit de pétition local. Demander aux habitants comment ils veulent aménager le territoire, organiser des débats publics sur les infrastructures ou consulter par Internet sur les décisions concernant l’environnement, c’est une bonne idée que de nombreux maires ont mise en application, surtout à la veille des élections. La démocratie participative, comme son nom l’indique, ça fait participer à la vie publique les citoyens qui votent et qui s’engagent pour que les choses changent. Bien sûr, ça intéresse surtout les retraités et les citoyens engagés dans des mouvements écologiques. C’est-à-dire, une minorité de la population.

Où ça se gâte, c’est quand on prétend donner aux citoyens le droit de référendum d’initiative partagée (RIP) sur le plan national. Ce drôle d’oiseau juridique, qui prétend rénover la démocratie, combine le référendum et le droit de pétition. Il a été inscrit dans la Constitution française en 2008. Mais on dirait que tout était fait pour qu’il capote. Pour organiser un référendum sur une proposition de loi, il faut qu’il soit présenté par 20 % des parlementaires et soutenu par 10 % des électeurs. Ce référendum ne peut porter que sur l’organisation des pouvoirs publics, la politique économique, sociale et environnementale. Il ne peut pas abroger une loi promulguée depuis moins d’un an. C’est l’échec garanti : il faut que 4,7 millions d’électeurs remplissent un formulaire et que les deux chambres du Parlement examinent la proposition de loi. Comme on pouvait s’y attendre, le premier projet de référendum a été un fiasco total. Il portait sur le projet de statut des aéroports de Paris. En neuf mois, les promoteurs du RIP ont été incapables de réunir les millions de signatures et les aéroports de Paris ont été privatisés. RIP : Requiescat in Pace - repose en paix ! 

La démocratie participative, je la connais assez bien et je la pratique depuis ma majorité, en tant que citoyen suisse. J’ai le droit de lancer une initiative populaire pour modifier la Constitution fédérale à condition de réunir 100 000 signatures d'électeurs, j’ai aussi le droit de soumettre à référendum une loi acceptée par le Parlement, si je réunis 50 000 signatures. Ça existe en Suisse depuis 1848 où les droits populaires ont été inscrits dans la Constitution. C’est un arme politique de la démocratie directe qui permet aux électeurs et électrices de participer aux décisions politiques sur le plan cantonal et fédéral. Sans le corset juridique qui paralyse le droit de référendum d’initiative partagée (RIP) français. Mais Macron, toujours inspiré par le baron, ne se décourage pas. Pour préparer sa présidence de l’Union européenne, en 2022, avant l’élection présidentielle, il va organiser des "consultations citoyennes" de Français tirés au sort sur l’avenir de l’Europe. Toujours la démocratie participative. Coubertin disait : "Le plus important n’est pas de gagner, mais de participer". Gagner et être réélu, ça n’est pas mal non plus !

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