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Billet de blog 13 octobre 2020

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StopCovid - un flop en or

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Les informaticiens sont des gens épatants. Avec nos impôts, ils ont développé l’arme fatale contre le virus : StopCovid. Depuis le 2 juin, cette application doit « vous protéger, protéger les autres, et soutenir les efforts des soignants et du système de santé pour stopper au plus vite les chaînes de contamination et éviter une seconde vague de l’épidémie de Covid-19 ". Le principe est simple : « StopCovid permet de gagner de précieuses heures pour alerter toutes les personnes utilisatrices de StopCovid avec qui vous avez été à proximité ». Cent trente chercheurs d’entreprises privées et d’organismes d’État ont travaillé à l’œil pour développer ce fleuron de la technologie française ! Mais l’hébergement chez une filiale de Dassault et la maintenance coûtent bonbon : près d’un demi-million d’euros en quatre mois. 

StopCovid restera dans l’histoire du virus comme un flop magistral. À peine 2,6 millions de Français l’ont téléchargée sur leur smartphone. Et un million l’ont déchargée. Même le Premier ministre et plusieurs de ses ministres ne l’ont pas installé. Alors que les Allemands et les Britanniques l’ont téléchargée 18 millions de fois.  Résultat : en France, 7969 personnes ses sont déclarées positives et 472 notifications ont été envoyées. Pour un pays de 66 millions d’habitants, c’est un flop en or massif ! 

Si le père du StopCovid, le secrétaire d’État au numérique, Cédric O, avait consulté un psychologue, il aurait compris qu’il allait dans le mur. Le génie administratif de la France précisait : » si vous avez été testé positif, vous recevez un code avec le résultat. Vous choisissez de prévenir tous ceux avec qui vous avez été en contact pendant plus de 15 minutes à moins d’un mètre et ils sont immédiatement prévenus et peuvent être pris en charge ». Formidable, non ? Sauf que personne n’a vraiment envie de prévenir ses voisins, ses amis, son boucher, son garagiste ou sa petite amie qu’il est malade, parce qu’ils devront être testés et confinés.  Personne non plus ne veut que le gouvernent sache où il était quand il a été contaminé, dans quel bar et avec qui il a passé la soirée. En mai, les députés s’étaient écharpés pendant quatre heures avant d’adopter le bébé. Certains ont hurlé : « application mort-née, cache-misère, mauvais romand “espionnage, nouveau machin ». C’était mal parti. Le syndicat des jeunes médecins généralistes était monté au créneau : le StopCovid « représente un réel risque d’atteinte aux libertés fondamentales  et il n’a pas été démontré scientifiquement qu’il avait un véritable intérêt dans la maîtrise de la pandémie ».  

Les militants de l’association « La Quadrature du Net » ont été les plus virulents contre une application qui centralise les données personnelles. Ils jurent que StopCovid fait partie d’une campagne de traçage de la population : « Tout est mis en œuvre dans l’idée que l’ennemi est le peuple. On lui ment, on le surveille, on le trace, on le verbalise s’il sort de chez lui. » Bref, StopCovid, c’est pire que « Big Brother » dans le célèbre roman de George Orwell « 1984 ». Sauf que, en 2020, la France est un pays où tout le monde envoie sur Instagram, Facebook ou Whatsapp des photos, des histoires et des millions de données personnelles à Google, Apple et aux autres géants du Net. Alors, la peur de StopCovid, moi, ça me fait marrer !

Le Premier ministre, dans un bel euphémisme, a reconnu que StopCovid « n’a pas obtenu les résultats espérés ». Alors, on arrête les frais ? Pas du tout, on va proposer une nouvelle version de l’application « Alerte Covid ». Amélioration majeure : au lieu de 15 minutes, le temps de contact est réduit à 5 minutes. Défense de ricaner, au fond de la classe ! 

Si ça peut consoler Jean Castex, l’application SwissCovid ne marche pas mieux dans mon pays, la Suisse. Elle a été développée en Suisse, mais c’est Apple ou Google qui la font fonctionner. Ses concepteurs  affirment qu’elle est « la première application de masse respectueuse de la vie privée ». Les données personnelles restent dans le téléphone et  ne sont pas centralisées. Mais les Suisses se méfient. Une majorité estime qu’elle est inutile et qu’elle ne respecte pas leur vie privée. Ceux qui l’ont téléchargée reçoivent des messages peu clairs. Et ceux qui ont un vieux smartphone ne pourront pas la télécharger. 

L’application de traçage des porteurs du virus est emblématique. Dans cette crise, les meilleurs techniciens ont été mobilisés pour créer des outils technologiques sophistiqués pour tracer les porteurs du virus. Le problème, c’est que plus personne ne fait confiance aux gouvernements et tout le monde rejette les applis scientifiques. Nous sommes tous devenus un peu paranos : nous croyons plus les réseaux sociaux que les médecins, qui d’ailleurs, ne sont pas d’accord entre eux. Nous avons peur d’un virus qui a tué un million de malades, mais nous souhaitons que les bars et les salles de sport restent ouverts. Au nom de notre liberté ! 

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